« Pourquoi Eric Ciotti a tort »

Inutile de vous dire que je ne partage pas l’analyse de Maxime Tandonnet , ce qui ne m’empêche ni de la publier ni de la respecter.

Je ne relève qu’une phrase qui justifie mon désaccord:

« Je croyais (je crois toujours d’ailleurs) que sur les cendres à venir de la politique française, dans l’apocalypse qui vient, l’espoir pourrait renaître d’une droite raisonnable, fondée sur un projet respectueux du peuple. « 

Je suis désolé mais dans mon cadre analytique personnel, l’espoir n’est pas une stratégie.

Je suis comme l’Antigone d’Anouilh. « Je hais l’espoir, votre sale espoir. »

je hais la fausse raison produite par le système, raison qui n’est qu’un tissus de rationalisations .

Seuls comptent les éléments objectifs de la situation de la France et ces conditions objectives, politiques, sociales, institutionnelles, culturelles, économiques écartent la possibilité d’une renaissance.

La situation de la France, n’est pas tombée du ciel, elle est une résultante. Elle est une résultante surdéterminée.

Une renaissance ne tombe pas du ciel, elle prend racine quelque part, s’incarne dans des forces, des organisations, or il n’y en a aucune . Il faut oser le dire. le temps de flagorner et de flatter le peuple est dépassé. On ne construit pas sur des mensonges.

A ce stade, par ailleurs, nous avons besoin non pas de personnel raisonnable , non nous avons besoin de personnel inventif, dionysiaque, libéré du poids de la fausse raison qui nous a guidé si mal.

Il faut sortir de la bouteille, de l’asile de fous, virer les psychiatres , il faut faire émerger quelque chose qui est de l’ordre des forces de vie dans un monde de petits morts ambulants, de zombies, de consommateurs, de conformistes critiques et autres rebellocrates

Il faut selon moi boire la coupe jusqu’à la lie des égouts anciens et ce ne sont pas les vestiges du passé, les structures depassées qui vont faire naitre quoi que ce soit.

J’ai soutenu l’idée de voter tactiquement pour le RN jusqu’aux élections précédentes car je les gratifiais d’un pouvoir de-structurant , perturbateur , je pensais qu’ils étaient porteurs de cette bonne négativité sans laquelle l’histoire ne peut se faire, porteurs d’une sorte de chaos positif à partir duquel quelque chose d’autre pouvait émerger; hélas le RN a perdu sa négativité; il vient au secours, il sert de béquilles au monde ancien.

Pour renaitre il faut d’abord être mort. La fonction du RN comme celle de Trump et pour les mêmes raisons était celle là, la faire mourir Washington devenue folle et faire mourir ce monde français qui n’en finit pas de gémir sans agir.

BB

Publié le 13 juin 2024 

par 

maximetandonnet

article pour le JDD.

Un président qu’il soit président de la République ou d’un conseil d’administration ou d’un parti politique ne devrait pas être un roitelet ou un tyranneau. Il a pour mission de présider, ou coordonner une équipe. La démarche isolée de M. Ciotti, un changement de cap radical, a priori sans l’accord des autres responsables de LR et sans même leur en avoir parlé, est une faute lourde. La mode est bien aux petits chefs narcissiques. Quant aux « militants », supposés soutenir sa démarche, ils ne sont pas le peuple français dont ils représentent à peine 0,001% et d’ailleurs, en l’absence d’un vote interne, qui peut savoir s’il existe vraiment un consensus sur la ligne Ciotti comme ce dernier s’en prévaut?

Son positionnement est politicien. Il consiste à vouloir sauver 60 sièges à tout prix. Il est exactement contraire aux positions prises par M. Ciotti notamment sur les retraites – et ses ronds de jambes à la macronie l’an dernier. Il illustre une vision de la politique purement opportuniste, qui consiste à faire passer la course aux prébendes, mandats ou fonctions, avant le fond des questions. Il porte un nouveau coup dur (mortel?) à sa formation, minée par les trahisons ou compromissions de 2017, 2022 et 2023 en faveur de la macronie et désormais déchiquetée et encore plus décrédibilisée par ce nouveau psychodrame

Il relève d’une approche « petit-bras » de la politique. Si le RN obtient une majorité absolue, avec un tout jeune chef de gouvernement de 29 ans sans la moindre expérience des responsabilités ni même d’un travail quelconque, dans un contexte de blocage généralisé des institutions et du pays, harcelé par un chef de l’Etat retors, il va s’effondrer en quelques mois (jours?). Et s’il n’a pas de majorité absolue (le plus probable), avec une gauche radicalisée et pro-Hamas, redevenue extrêmement puissante, l’Assemblée sera une pétaudière encore plus violente et ingouvernable qu’aujourd’hui, dans un climat apocalyptique qui ne fera qu’amplifier le dégoût des Français envers la politique et les partis.

Dans un cas comme dans l’autre, un LR réduit à presque rien électoralement et rallié au lepénisme au sommet de sa gloriole, avalé, absorbé par ce parti, dévoré, avec ses 60 députés croupions du RN, serait emporté avec lui dans son naufrage inéluctable.

Les dernier chefs de l’Etat, pas seulement M. Macron, même s’il fut le pire, ont une grande part de responsabilité dans cette course à l’apocalypse: en sacrifiant l’intérêt général à leur arrogance et démence narcissique, ils ont ouvert la voie à l’hystérisation de la politique, à la violence et la course aux extrémismes.

Mais l’air du temps est aussi diablement volatil. Le macronisme est voué à disparaître définitivement du paysage politique, comme la fin d’un cauchemar au petit matin, en mai-juin 2027. Sa disparition pourrait mécaniquement affaiblir le RN qui tient sa force d’avoir su, mieux que quiconque, incarner le rejet du macronisme et de son bilan – notamment sécuritaire. Que va-t-il se passer alors?

Je croyais (je crois toujours d’ailleurs) que sur les cendres à venir de la politique française, dans l’apocalypse qui vient, l’espoir pourrait renaître d’une droite raisonnable, fondée sur un projet respectueux du peuple. Cela fait rigoler tout le monde. « Vous voyez bien que LR est mort! » Peut-être, mais la raison et le bon sens, eux, ne sont que blessés. Et, même infiniment minoritaires, aujourd’hui, j’espère qu’ils survivront au chaos et au malheur du temps et qu’ils reviendront au premier plan sous un autre manteau. Nous ne cèderons pas à l’abêtissement en cours, nous ne nous rendrons jamais.

MT

10 réflexions sur “« Pourquoi Eric Ciotti a tort »

  1. Globalement nos partis politiques se sont plus écharpés au sujet des chansons d’Aya Nakamura qu’à propos de l’agression américaine des Nord Stream.

    Washington doit bien rigoler

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  2. Même constat et stratégie que vous Mr Bertez.

    Et comme vous je me suis trompé, quoique n’ayant pas voté RN, sachant depuis peu par la bouche de MLP que le RN est sionistes compatible et russophobe.

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  3. « faire mourir ce monde français qui n’en finit pas de gémir sans agir. »Ne vous en faites pas, avec l’excité erratique de l’Elysée et l’ectoplasme de la mollesse extrême à Matignon, il est clair que nous allons rapidement crever sur place. Raison pour laquelle je voterai sans coup férir pour ce dernier puisqu’il ne nous reste plus comme tactique que celle du pompier pyromane et comme stratégie celle d’emmerder tous ceux qui ont œuvré depuis des décennies pour nous mettre devant ce seul mur là. Sinon Malraux avait une autre définition de « l’espoir », il disait aussi « l’illusion lyrique ». C’est vrai qu’on en a soupé de celle-là ! Never again et passons aux choses triviales et sérieuses avec le seul optimisme de la volonté de qui vous savez.

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  4. Je pense que l’espoir est nourri par l’inconscience et le ras le bol. Le jour où plus personne n’aura d’espoir nous serons au fond du trou et ce sera le moment d’être attentif aux 1ers signes annonçant le printemps… il sera bien le temps de nourrir cet espoir d’une renaissance mais combien de désillusions et de souffrances avant cela ?

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  5. Le spectacle « politique française » actuel est à la fois jouissif et pitoyable…

    Je ne sais pas s’il faut en rire ou en pleurer… Le pop-corn déborde de partout, chocolat, caramel, sucré, salé…

    Le petit jeu politique n’a jamais été aussi limpide après tant d’années de fourrage de gueule… et ça continue, sans complexe, tranquille pendant que les Français pataugent dans des non-sens kafkaïens…

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  6. pour renaître il faut être mort. C’est si évident que cela se suffit d’observer notre chute et je suis anxieux car je ne distingue aucune pousse verte, l’hiver dure et perdure…

    Quand l’URSS s’est effondré et disloqué et que l’hyperinflation à frappé les russes et qu’ils connurent l’humiliation des prédateurs depecant les anciens fleurons économiques, on peut dire qu’ils buverent jusqu’à la lié la coupe de l’anarchie du déclassement social. Quand Elstine choisit Poutine, la nation se remit lentement à renaître. Chacun son tour? Pour le moment notre horizon est un abime dont on ne distingue le fond et saura t on même le voir le moment venu?

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  7. Cher Monsieur Bertez, voilà un excellent billet.
    Il est temps de lire ou relire cet article de Frédéric Lordon qui n’a rien perdu de son actualité lorsqu’il évoquait alors, en 2012, le FN comme « produit endogène des alternances sans alternative ». Frédéric LORDON, Front National, même causes, mêmes effets, in La pompe à phynance, Le Monde Diplomatique, 2 mai 2012, https://blog.mondediplo.net/2012-05-02-Front-national-memes-causes-memes-effets

    « Oui, je vous cite, le RN a perdu sa négativité; il vient au secours, il sert de béquilles au monde ancien.Pour renaitre il faut d’abord être mort. La fonction du RN comme celle de Trump et pour les mêmes raisons était celle là, la faire mourir Washington devenue folle et faire mourir ce monde français qui n’en finit pas de gémir sans agir. »

    Mais n’ayez crainte.Un peuple qui fait encore trois repas par jour ne fait pas de révolution.Il commencera à comprendre lorsqu’il n’aura plus que deux repas.

    Bien à vous, Renaud Bouchard

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