Editorial. Le grand absent des élections: l’état de la France. Personne n’a la solution à son affaissement et à la paupérisation de ses citoyens.

La France vote en deux tours les 30 juin et 7 juillet. Il s’agit d’élections législatives anticipées convoquées par Macron pour punir les français après que son parti a subi une lourde défaite aux élections de juin à l’Assemblée européenne.

La consultation intervient à un moment presque « crisique »; les conséquences de la gestion malavisée imposée par le Président sont en train de se révéler avec un symptôme particulièrement spectaculaire, celui de la dette. La France, si elle n’était pas pilier de la Construction Européenne serait menacé d’être mise sous tutelle! Sa monnaie serait menacée, ses emprunts d’état seraient dépréciés.

Depuis la fin des années 60 ou je pratique l’économie, la finance et la politique, jamais je n’ai entendu une appréciation positive; toujours la France a été considérée comme un pays en crise, un pays à réformer, un pays en perpétuel plan de redressement!

il y a un veritable mal français, un mal qui n’a fait que s’aggraver depuis la mise en place de la Construction Européenne parce que les remèdes que la France a pu utiliser dans le passé, comme le recours à l’inflation de la monnaie et des prix, ce remède n’a plus été autorisé, du moins il n’a plus été autorisé de façon autonome.

La création monétaire, les déficits, l’endettement sont l’huile qui permet à un système défaillant de tourner quand même, mais si vous les supprimez les défaillances deviennent beaucoup plus flagrantes!

Giscard s’est trompé sur les effets positifs de la discipline de la monnaie européenne ; la monnaie unique n’a pas déclenché de convergence positive, saine et correctrice des défauts français , le fameux cercle vertueux n’a jamais pu se mettre en place et il s’est transformé en cercle de paupérisation. Pourquoi? Tout simplement parce que la monnaie, lorsqu’elle est une simple structure déconnectée de la réalité profonde, historique du pays est un handicap au lieu de devenir un atout. L’euro n’ jamais réussi a devenir un catalyseur de l’activité économique productrice française, il n’a servi qu’à protéger les plus riches.

La France n ‘a jamais eu les moyens de rivaliser avec l’Allemagne, elle a perdu ses avantages comparatifs, et elle ne s’est jamais donné les possibilités de bien se comporter au plan international et encore moins mondial. La libre circulation des capitaux avec une monnaie qui n’était pas la sienne a été catastrophique.

Cette élection ne produit aucun débat. Elle accumule les invectives, les mensonges et promesses intenables.

Elle n’est l’occasion d’aucun diagnostic sur la situation. Personne ne se préoccupe réellement d’exposer une politique crédible, chacun étant conscient du fait que le pays est placé dans un carcan européen et mondial qui n’autorise aucune mesure forte susceptible de modifier sensiblement la dérive; chacun le sait mais le cache, le pays est voué à la glissade. Les élites et leurs alliés ne se battent que pour l’écrémage, les avantages particuliers, les prébendes, pour le reste, c’est l’étranger qui vient se servir, invité par les compradors à piller les bijoux de famille et les restes.

Le carcan européen et mondial nest pas seul responsable de l’état déplorable du pays, il faut y ajouter une caractéristique constante du système français: le pays est inséré dans la compétition internationale libérale mais la société française refuse la logique libérale choisie par les élites.

Les joutes électorales à chaque fois entérinent cette situation d’un pays plongé dans le capitalisme à l’anglo-saxonne mais qui en même temps le refuse .

L’absence de consensus sur le système et la coexistence de plusieurs logiques sociales et politiques imposent des coûts que la France peut de moins en moins assumer. Ceci se traduit par un système de protection sociale défaillant, dysfonctionnant, par une absence de spécialisation internationale positive et surtout par une faiblesse chronique du couple profitabilité/investissement.

La France va connaître deux tours de scrutin.

Selon une enquête publiée par l’institut d’enquête IFOP, le Rassemblement national (RN) est en tête avec le soutien de 35 % des électeurs. Le Nouveau Front populaire (NFP), alliance de gauche composée de socialistes, de communistes et de Verts, arrive en deuxième position avec 30 % et l’Ensemble centriste du président Macron arrive troisième avec 20 %.

Si ces résultats se confirment, aucun parti ne rassemblera suffisamment de voix pour atteindre le seuil de 289 sièges permettant d’obtenir la majorité absolue à l’Assemblée nationale. de 577 sièges.

Selon la Constitution française l’article 8 stipule que le président nomme le Premier ministre. Macron devrait proposer le poste au groupe parlementaire le plus important . Mais comme il s’agira probablement du Rassemblement National, Macron pourrait chercher à former une coalition d’autres partis. Le chef du parti RN, Jordan Bardella, a déclaré qu’il n’accepterait pas d’être Premier ministre si son parti n’obtenait pas une majorité absolue.

Le Financial Times ne rate jamais une occasion de jeter de l’huile sur le feu français; . « Au mieux, un Parlement dominé par les extrêmes politiques plongerait la France dans une période d’instabilité prolongée. Au pire, cela conduirait à l’adoption de politiques dépensières et nationalistes qui provoqueraient rapidement une crise économique et sociale en France.»

Dans le secteur manufacturier, la France était l’un des leaders mondiaux dans les secteurs de l’automobile, de l’aéronautique, du ferroviaire ainsi que des cosmétiques et des produits de luxe. Elle a lourdement décliné depuis son insertion mondiale et européenne. Elle est absente de tous les grands domaines d’excellence technologique.

Son secteur des services est vaste, mais peu efficace , dominé par le tourisme et les services financiers. La France est l’un des grands exportateurs de produits agricoles mais les directives et les normes européennes ont précipité ce secteur dans une crise qui maintenant devient sociale.

La France connaît une faible croissance de son PIB réel. La croissance annuelle du PIB réel n’a cessé de diminuer au cours des 40 dernières années. Et maintenant, dans les années 2020, cette tendance s’est dégradée vers la stagnation. elle s’est pratiquement arrêtée.

Le ratio investissement/PIB a été volatil, chutant fortement au cours des récessions successives, sans jamais vraiment remonter; il connaît actuellement une chute record.

Le ralentissement de la croissance des investissements productifs entraîne une stagnation de la productivité du travail . La productivité totale des facteurs est désormais en baisse absolue.

Comme je l’explique depuis des décennies, le mal français a pour origine l’insuffisance et la baisse de la rentabilité du capital. La rentabilité du capital français est la moitié de la rentabilité du capital allemand et un tiers de la rentabilité du capital américain. Elle chute fortement depuis le debut du siècle. La chute s’est accélérée avec les débuts de l’euro. et encore affaiblie après la Grande Crise Financière.

Source : Basu-Wasner, EU AMECO, et MR.

Les faillites d’entreprises se multiplient.

L’indice PMI manufacturier HCOB France est à 45,3 en juin 2024 contre 46,4 le mois précédent (un score de 50 signifie une stagnation). Il s’agit du 17ème mois consécutif de contraction de l’activité industrielle en France,

Les perspectives de moyen terme sont médiocres voire inquiétantes .

Même la Banque de France a dû admettre dans son dernier rapport que « l’activité économique en France devrait rester stable en 2024 (0,7 % de croissance annuelle) après un ralentissement important au second semestre 2023 ». 

Une faible croissance de la productivité et une inflation élevée ont entraîné une baisse des salaires réels. Les salaires réels moyens sont encore inférieurs de près de 3 % aux niveaux de 2019.

Source : OCDE

Et la croissance de l’emploi s’est arrêtée.

La Banque de France admet qu’en 2024 , « l’investissement des entreprises risque d’être pénalisé par une activité relativement atone, ainsi que par les coûts de financement et les conditions d’octroi des crédits ». La BdF évoque le désastre géopolitique que la guerre en Ukraine a provoqué pour la France; désastre qui a maintenu les taux d’inflation à un niveau élevé et la croissance du PIB à un niveau bas. Elle s’attend même à un ralentissement des salaires nominaux plus important que prévu début 2024 et « on ne peut pas exclure la possibilité d’une nouvelle surprise baissière sur la productivité des entreprises, qui pourrait renforcer la dynamique des coûts salariaux unitaires et donner lieu à des pressions inflationnistes supplémentaires. »

La baisse des revenus réels moyens au cours des quatre dernières années ne fait qu’aggraver les inégalités de revenus et de richesse en France; Les inégalités se sont aggravées au cours des 40 dernières années.

En 1983, 1 % des salariés les plus riches recevaient 7,5 % de tous les revenus personnels, 10 % en prenaient 30 % et les 50 % les plus pauvres n’en recevaient que 21,4 %. En 2022, la part des 1 % les plus riches a atteint 12,7 % (soit une augmentation de plus de 60 %), tandis que la part des 10 % les plus riches est passée à 34,8 % et celle des 50 % les plus pauvres sont tombés à 20,3 %.

Source : Laboratoire mondial sur les inégalités

Dans son dernier rapport, l’ Observatoire des Inégalités dresse le portrait d’un pays où les écarts de revenus et de niveaux de vie entre les plus âgés et les moins âgés se creusent. L’écart du niveau de vie minimum des 10 % les plus riches est resté environ 3,28 fois supérieur au niveau de vie maximum des 10 % les plus pauvres.

EN PRIME

La dette publique dépasse les limites du cadre budgétaire de la zone euro.

n coup dur.

3 réflexions sur “Editorial. Le grand absent des élections: l’état de la France. Personne n’a la solution à son affaissement et à la paupérisation de ses citoyens.

  1. « , le mal français a pour origine l’insuffisance et la baisse de la rentabilité du capital. La rentabilité du capital français est la moitié de la rentabilité du capital allemand et un tiers de la rentabilité du capital américain. Elle chute fortement depuis le debut du siècle. » Ce qui veut dire en clair qu’il faut donner encore et encore plus au Kapital. Ca c’est une pensée profonde et qui suffira pour bien dormir…

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    1. Si vous me lisiez et si vous étiez capable ensuite de réfléchir,
      vous comprendriez que votre persiflage est stupide;
      la politique à mener quand il y a insuffisance de profit et
      donc excès de capital -en particulier improductif et fictif-,
      c’est l’euthanasie du capital!

      C’est cette idée que j’analyse et essaie de faire comprendre
      comme étant la seule logique , depuis des décennies.

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