Peu de repreneurs pour Novo Banco

Peu de repreneurs pour Novo Banco

VENDREDI, 29.07.2016
Agefi Suisse

Portugal. La Banque Centrale Portugaise peine à trouver preneur pour la banque-relais issue du bail-in de décembre. La normalisation est difficile.

Conrad Bertez

Cette semaine, la Banque de Portugal annonçait qu’elle déciderait de la vente de la Novo Banco en septembre. Elle continue de chercher des acquéreurs, mais le prix qu’elle demande pour la banque-relais reste trop élevé pour parvenir à un accord avec les quatre investisseurs qui se sont montrés intéressés pour le moment. La date butoir pour la vente, établie par la Commission européenne se rapproche, ce qui favorise les acheteurs en améliorant leur pouvoir de négociation, mais une vente au rabais de la Novo Banco risquerait de remettre en question la stabilité du secteur financier portugais.

Les difficultés de la Novo Banco sont faciles à expliquer. La banque a été créée en aout 2014 afin de servir de relais pour la deuxième plus grande banque portugaise, Espirito Santo (BES), qui souffrait alors de dangereuses pertes. Sous l’égide de la Banque de Portugal, la BES a été scindée en deux: La dette subordonnée est restée avec la BES, devenue une «bad bank» au bilan rempli de prêts non-performants Les «bons» actifs et la dette senior ont été mis au bilan de la Novo Banco. La nouvelle banque est sous la tutelle de la Banque de Portugal, et son capital provient d’un fonds de résolution de 4.9 milliards d’euros dont les autres banques portugaises sont les actionnaires.

Le Portugal aurait pu devenir un exemple de bail-in bien ordonné en Europe, mais les difficultés ne se sont pas arrêtées là. Les stress tests de 2015 de la BCE ont révélé qu’il fallait 1.4 milliard de capital de plus à la Novo Banco pour couvrir ses risques. La banque-relais n’a pas réussi à attirer plus d’investisseurs. En décembre, la Banque de Portugal a transféré 1.9 milliard de dettes «senior» de la Novo Banco à la BES, effectuant ainsi un deuxième bail-in. Cette manœuvre a été mal perçue par les investisseurs qui se croyaient enfin en sécurité. Ils y ont vu une trahison des promesses faites sur l’intégrité des obligations de premier rang en 2014.

Cette deuxième spoliation des créanciers est importante, et pas seulement parce qu’elle en dit long sur la volonté des autorités de résolution à respecter leurs engagements. Elle met aussi en évidence la véritable situation de la Novo Banco. Même les bons actifs sont risqués. La dette non-performante représente toujours une grande partie du bilan de la banque. En mars, ils représentaient toujours plus de la moitié de ses prêts. Ses revenus sont faibles. La marge d’intérêt nette sur ses prêts n’était que de 1.19% au premier trimestre 2016. En vérité, la «good bank» n’est qu’une «bad bank» un peu moins mauvaise. Pas étonnant alors que les investisseurs ne veulent pas l’acheter au prix que demande la Banque du Portugal.

Le problème est que la Banque du Portugal n’est pas exigeante  par soif de profits pour les banques actionnaires de la Novo Banco, mais par souci pour la stabilité de son système bancaire. Les grandes banques portugaises sont mal capitalisées, et, suite au ralentissement de l’économie, et à la politique de la BCE,  les revenus n’augmentent pas.

Lisbonne est déjà en négociations avec l’Union européenne pour recapitaliser la plus grande banque portugaise, Caixa General, d’au moins 2 milliards. La banque Barclays annonçait récemment que le secteur bancaire portugais a besoin de 7.5 milliards de capital additionnel afin de résoudre sa crise systémique. Ce sont ces banques qui sont les actionnaires de la Novo Banco, et elles n’ont à l’évidence  pas assez de ressources pour absorber de lourdes pertes sur la vente de la banque.

La Banque de Portugal doit néanmoins vendre la Novo Banco d’ici aout 2017, sinon les régulateurs européens mettront la banque en «wind down», c’est-à-dire en liquidation avec de fortes pertes pour les actionnaires. Plus cette date se rapproche, plus il devient difficile pour la Banque Centrale Portugaise de négocier un prix raisonnable pour la vente de Novo Banco.

Le processus de résolution et de bail-in était supposé garantir la stabilité des secteurs bancaires. Pour le moment, il semble plutôt être à l’origine d’un étau qui se resserre autour de l’économie portugaise.n

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