Marine: l’impasse ou l’histoire? Le choix qui devrait être fait.

Nous considérons que le sort des élections présidentielles en France est scellé.  Certains lecteurs s’en étonnent.  Ceci mérite donc quelques explications.

D’abord nous faisons confiance aux sondages. Les sondages Français sont dans l’ensemble de bonne qualité à condition de ne pas leur faire plus qu’ils ne disent: ils donnent une photo instantanée. Les sondages ne prédisent pas l’avenir, ils n’ont pas accès à la science infuse du futur. Leur utilité est encore plus grande quand on les suit régulièrement et que l’on se concentre sur les évolutions. Les tendances qui en ressortent sont instructives.

Ensuite lorsque nous disons que le sort des élections en  est jeté, c’est sur la base de ce que l’on connaît. Nous ne croyons pas au miracle, mais un aléa, un imprévisible est toujours possible. Fillon peut cesser d’être un pantin, une mouche dans la bouteille. Et il faut donc comprendre que ce que nous disons c’est : « sur la base de ce que l’on connaît, l’affaire est pliée ».  C’est ce qui s’est passé avec Trump ou sur la base de ce que l’on savait, il était perdant, mais un coup de théâtre, une semaine avant est venu bouleverser la donne grâce à une volte face du FBI qui a mis Clinton en difficulté.

Enfin, pour avancer cette certitude personnelle, nous tenons compte du fait que rien chez Fillon ou Marine ne montre une innovation, une inflexion dans leur campagne: ils restent accrochés à leurs thèmes, avec plus ou plus moins de conviction certes, mais ils déroulent toujours dans le même registre. Ils n’ont pas de grand mouvement stratégique en cours. Peut être que cela viendra, mais pour le moment il faut faire comme si cela n’était pas le cas.

Etablir un scénario comme je le fais ne signifie pas prédire l’avenir, non absolument pas. Etablir un scénario est une opération intellectuelle méthodique, une méthode de pensée.  Le scénario est utile pour mettre en ordre tout ce que l’on voit, tout ce qui arrive; celui qui l’a établi intègre toutes les nouvelles dans les scénarios au fur et a mesure qu’elles arrivent; tant que les nouvelles ne contredisent pas le scénario il le garde; sitôt que les nouvelles contredisent le scénario, il faut en changer. Voila la méthode. Elle repose sur la conviction que l’avenir ne se prédit pas, mais qu’établir un cadre pour raisonner est utile, à condition d’avoir la discipline d’en changer dès que le cadre se révèle inadéquat. Nous sommes totalement en dehors de la magie, nous sommes dans le rationnel.

Marine et ses militants croient au miracle. Ils veulent espérer la divine surprise.  Jean Marie lui n’y croit pas, et si il y a bien quelqu’un , qui connaît la musique, c’est lui.

Cette croyance au miracle, à la divine surprise, perdure alors même que Marine et ses amis devraient tirer la leçon de ce qui vient de se passer aux Pays Bas. Ils rêvent de presque flirter avec le pouvoir comme le FPÖ l’a fait en Autriche. Ils oublient une chose et elle est déterminante; le FPÖ a failli gagner parce qu’il a modifié sa position sur l’Europe, il s’y est converti. Il n’ a pas pris ses électeurs à rebrousse poil sur ce thème; il a collé aux électeurs. L’amalgame entre d’un côté les justes revendications des Français laissés pour compte, laminés, exaspérés et de l’autre le rejet de l’Europe est une erreur d’analyse d’abord et de stratégie ensuite.

Toutes les enquêtes montrent qu’il n’y a pas, malgré les déceptions, malgré les colères, de majorité constituable pour sortir de l’Europe, pour tourner le dos au projet européen, pour renier l’euro. Ce n’est bien sur pas une attitude positive, ce n’est pas une adhésion, non c’est de la peur, la peur de l’inconnu. Il y a une majorité que l’on peut susciter , pour une autre Europe plus respectueuse des citoyens, pour une Europe moins  tyrannique, plus sociale, moins allemande, plus nationale, moins austère, moins arrogante etc mais il n’y a pas de possibilité de faire une majorité pour la sortie. Il y a de quoi faire un slogan pour un noyau dur, mais c’est tout. Et il est vrai, il faut le reconnaître, que prendre des positions moins à l’emporte pièce, plus nuancées est toujours difficile en matière politique car lorsque l’on s’adresse au grand nombre, il faut faire simple et percutant. Donc il faut préparer les esprits de loin et de façon décentralisée.

Wilders n’a pas réussi une percée déterminante et  il en sera de même en Mai et Juin prochains pour le parti issu du le Penisme, avec la double défaite, celle de Marine Le Pen à la présidentielle, et celle du Front aux élections législatives. La priorité à la dédiabolisation était nécessaire, mais elle n’était pas suffisante. Le parti de Marine  est incapable  de nouer les alliances que celles-ci exigent au second tour des consultations.

Nous vous conseillons de lire le petit ouvrage remarquable de Védrine intitulé « Sauver l’Europe ». Contrairement au titre, volontairement positif, Védrine n’est  pas , ne se montre absolument pas européiste. Il décrit parfaitement ce qui se passe dans la tête à la fois des citoyens vis à vis de l’Europe et les erreurs, les failles des élites. On voit bien à la lecture de son ouvrage ou sont les brèches , on voit ou il est possible de tailler des croupières aux européistes. Mais cela nécessite du travail, de l’effort , de l’organisation sur le terrain, bref tout ce que le populisme répugne à faire.

Partout en Europe, les opinions publiques bien qu’elles soient déçues, ou pire encore exaspérées,, par l’Union européenne, bien qu’elles puissent être en désaccord avec son orientation économique,  commerciale ultra-libérale, avec sa politique d’immigration intense, sont, dans leurs majorités respectives, conscientes que la solidarité des peuples européens ne peut être mise en  cause ; que la division et la fragmentation seraient la pire des solutions. Personne n’imagine d’ailleurs comment pourrait se faire une transition vers la refragmentation.

C’est une réalité incontournable: le rejet de l’Europe est la cause de l’impasse populiste, c’est ce qui lui barre l’accès  au pouvoir suprême. Et les européistes en jouent, se frottent les mains  et les populistes tombent, benêts dans le piège.

 Les populistes gagneraient en crédibilité et en attractivité  à s’affirmer européens, tout en réclamant un changement d’orientation radical de l’Union européenne.

Là, ils auraient une majorité, là ils auraient des alliés. Là il feraient l’Histoire.

En Prime 

Les Français et leurs chefs d’entreprises sont en grande majorité attachés à l’euro mis en cause par des candidats à l’élection présidentielle française, Marine Le Pen en tête, selon deux sondages publiés samedi.

Selon une enquête effectuée par l’Ifop pour la Fondation Robert Schuman et Le Figaro auprès de 1.600 personnes du 22 au 24 mars, 72% des Français sont opposés à un abandon par la France de la monnaie unique et à un retour au franc, soit 10 points de mieux qu’en mai 2010.

Par ailleurs, 51% des sondés souhaitent que l’Union européenne ne fasse aucune concession aux Britanniques, qui se sont prononcés en juin 2016 pour une sortie du Royaume-Uni de l’UE, le « Brexit », dont la présidente du Front national promet de suivre l’exemple si elle était élue en mai.

Marine Le Pen fait depuis des semaines la course en tête dans les sondages sur les intentions de vote pour le premier tour de la présidentielle mais elle a été rattrapée par l’ex-ministre de l’Economie Emmanuel Macron, le plus européens de tous les candidats en lice. Et les sondages la donnent battue dans tous les cas de figure au second tour.

Selon un sondage effectué par OpinionWay du 6 au 22 février auprès de 610 dirigeants d’entreprise pour le site internet Atlantico, 56% des patrons français estiment ne pas pouvoir se passer de l’euro et 54% de la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux en Europe.

5 réflexions sur “Marine: l’impasse ou l’histoire? Le choix qui devrait être fait.

  1. C’est triste de voir que les français sont vraiment devenus des veaux!!!!
    Mais l’euro s’écroulera et ce jour là ce sera dans les pleurs et les grincements de dents.
    Une sortie sereine serait bien plus intelligente et moins dévastatrice pour tout le monde.
    Mais expliquer ça aux veaux……… peine perdue

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  2. Les français sont des cons, et sont très bien décrits par Céline : faux cul, poltrons,
    Ils auront ce qu’ils méritent : la guerre civile, la partition et peut être quelques frappes chirurgicales de nos « amis » US quand Macron aura démembré l’industrie de la défense nucléaire.

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  3. Les élections ne sont qu’un spectacle où la démagogie le dispute au simplisme ; il est de toute évidence impossible dans le bruit ambiant de parler des sujets de fond et des grandes questions stratégiques, seuls les gens qui font l’effort de s’informer comprennent les non-dits.

    Mais cela, ce n’est rien, ce qui compte vraiment sera la réaction des peuples face aux crises qui arrivent, et les décisions des dirigeants face à ces réactions (c’est une dialectique).
    Evidemment, il vaudrait mieux pour nous français avoir des dirigeants courageux, avec une vision et un cap historiques clairs, du pragmatisme, plutôt que des pantins vides et manipulables. 2017 est peut-être la dernière chance, je ne sais si cela tiendra jusque 2022.

    La tendance actuelle est un durcissement des règles, avec un glissement autoritaire possible des classes dirigeantes, voire des stratégies de la tension (font-ils actuellement venir une 5ème colonne manipulable ?), pour tenter de maintenir un système qui ne fonctionne plus.
    Si l’UE telle qu’elle a été conçue a un avenir, c’est comme IV Reich. Un tel problème de conception ne se résout pas avec des améliorations cosmétiques et accessoires à la marge, mais avec une rupture organisée, pour reconstruire intelligemment sur des bases saines. C’est mon avis.
    Cette position n’est pour l’instant pas recevable, c’est malheureux à dire, mais les choses ne vont pas encore assez mal, et l’idéologie l’emporte sur la raison. Dans ces conditions, la solution viendra du bas, pas du haut.

    Je pourrai continuer avec le constat qu’il existe maintenant plusieurs France (C.Guilluy) ; Sont-elles encore capables de se parler, de se comprendre, de se solidariser pour construire quelque chose ? Personne n’a la réponse, on jugera sur pièce.
    De ce point de vue, les élections ne seront qu’un thermomètre des poids respectifs de ces 3 France, la partie la moins lisible étant l’abstention.

    Désolé, je me laisse un peu aller, je jette ces réflexions comme une bouteille à la mer. Il y a encore des raisons d’espérer, mais il est clair que ces évènements dépassent les acteurs, à la fois nous, simples citoyens et électeurs, mais aussi les dirigeants qui naviguent à vue.

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  4. Il semble bien que Mélanchon ai compris cette stratégie; d’où sa position en deux plans pour négocier avec la Chancelière allemande.

    Ne pensez vous pas qu’il pourrait créer la surprise de cette élection malgré des sondages peu flatteurs à son égard ?

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