La guerre, la dernière ligne droite ? La prise de Pokrovsk est un enjeu clef avant les négociations- Marat Khairullin

Jamais auparavant, dans cette guerre, la situation sur le front n’avait autant dicté l’ordre du jour.

Il est clair que la semaine dernière a marqué la tendance politique principale : les États-Unis sont prêts à des négociations de paix. Et tout porte à croire que dans le contexte actuel ce ne peut etre que sur la base d’un accord global pour la coexistence sur la planète.

L’Ukraine n’est qu’un détail dont personne ne se soucie.

Nos dirigeants officiels, par l’intermédiaire de porte-paroles clés, ont clairement exposé la position générale : les États-Unis ont changé d’avis, l’Ukraine n’intéresse personne et nous pouvons la traiter comme nous le souhaitons. L’Europe résiste, mais la Russie peut, si elle le juge bon, la faire plier. Que ce soit par des frappes nucléaires ou des incendies d’usines, les États-Unis ont clairement défini leurs priorités dans ce domaine. L’hégémon n’interviendra pas pour une Roumanie ou une Pologne dévastées – pas sous Trump.

Dans ce contexte, les messages que notre camp envoie joyeusement à l’Europe sont plutôt satisfaisants : la guerre des câbles dans les pays baltes n’est qu’un début. Comme on dit, les Britanniques ne sont pas les seuls à savoir semer le trouble en catimini.

Alors que des accords de paix majeurs sont en cours de préparation, il est crucial de savoir à quoi ressemblera la dernière ligne droite de cette partie d’échecs particulière. Je le répète, le principal objectif stratégique à ce stade est d’atteindre les frontières constitutionnelles de la Russie.

Sur le plan politique, il a été clairement indiqué que les opérations militaires se poursuivront pendant la préparation des négociations sans aucune condition préalable – notre armée a toute liberté à cet égard. C’est important.

Le point de référence principal à partir duquel la situation évoluera est l’arrivée aux frontières de la région de Donetsk. La libération de Kramatorsk, Slaviansk et de tout ce qui les précède. En conséquence, l’objectif tactique principal est la prise de Pokrovsk.

Progression des forces russes à Donetsk entre le 1er juillet 2024 et le 27 janvier 2025.

Si notre armée parvient à prendre la ville dans un délai d’un mois, deux mois maximum, cela signifie que nous pourrons nous attaquer à la libération de plus grandes agglomérations. Les Ukrops, de leur côté, ont l’intention de s’accrocher à des villes comme Pokrovsk et Mirnograd et de les garder le plus longtemps possible.

Cela aura une influence sur l’ensemble du processus de paix.

Pour évaluer les chances de l’ennemi, il faut regarder Kourakhovo, Velikaya Novosyolka et Toretsk. Dans ces trois bastions, les Ukrops ont essayé de créer une supériorité locale en hommes. Sur le terrain, parfois de trois à quatre fois, ce qui témoigne que l’Ukraine a encore des réserves.

En même temps, Kourakhovo a été libérée en trois semaines et Velikaya Novosyolka en deux semaines. Toretsk est un peu différent : les combats ont commencé dès l’été. Mais c’est une agglomération très complexe dès le début : des mines de charbon concentrées et un terrain difficile. Notre armée n’a pas pu créer un grand encerclement, elle a donc dû diviser le front en petits morceaux et les nettoyer systématiquement.

Velikaya Novosyolka et Kurakhovo ont été prises en créant un encerclement classique. C’est exactement la même chose qui se passe actuellement avec Pokrovsk. En capturant Selidovo puis Kurakhovo, nous contournons tranquillement la ville par le flanc sud.

Avec la libération de Toretsk, puis de Chasov Yar, la pression sur Konstantinovka commencera, ce qui permettra à son tour de contourner Pokrovsk par le nord. Après cela, tout se déroulera comme à Ougledar, Kourakhovo et Velikaya Novosyolka : encerclement et nettoyage total.

La principale différence avec les opérations précédentes réside dans l’ampleur des combats. Nous n’avons pas encore mené de batailles de cette ampleur dans cette guerre. D’où la nécessité d’une préparation appropriée.

La visite de Valéry Gerasimov (chef de notre état-major général) au front est précisément une inspection préalable à une opération aussi critique.

Valéry Gerasimov Chef d’état-major général

Il s’agit d’une opération à plusieurs niveaux. Le périmètre extérieur, c’est-à-dire les flancs de Velikaya Novosyolka et de Konstantinovka, doit être solidement défendu afin que les forces principales puissent se concentrer sur le périmètre intérieur, encerclant ainsi l’ennemi et le repoussant de Pokrovsk-Mirnograd.

On estime que 10 à 12 armées seront déployées sur les deux fronts. Il faudra quatre groupes, comme sur les fronts de la Grande Guerre patriotique. Je vous rappelle qu’actuellement, nous avons environ 22 armées interarmes de la Fédération de Russie sur le front. Cela signifie que nous assistons à de véritables événements de grande envergure. Aucun conflit depuis la Grande Guerre patriotique n’a impliqué autant de forces simultanément.

La prise de Pokrovsk est la dernière ligne droite.

Tout le reste n’est que détails. Si nous parvenons à prendre Pokrovsk, nous pourrons tout prendre, que ce soit Kiev ou même Paris. Quant à Varsovie, nous nous « essuierons les pieds dessus ». C’est une plaisanterie, bien sûr, mais c’est un point très important que je soulève.

Si nous prenons rapidement Pokrovsk, nous prendrons probablement aussi Zaporojie et Kherson. Si l’assaut se prolonge, nous atteindrons les frontières de la région de Donetsk et déciderons alors de la suite des opérations.

D’ici mars, les premières consultations entre les groupes de travail américains et le nôtre devraient commencer. Des rumeurs laissent entendre que notre groupe de travail sera dirigé personnellement par Ouchakov ou Choïgou.

Ce seul fait témoigne de la gravité de l’événement à venir. Souhaitons bonne chance à nos guerriers – leurs actions détermineront, au sens littéral du terme, le sort du monde.

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