Le rally de l’euro est un mouvement superficiel

L’euro, autrefois imaginé comme un corset d’unité et de discipline budgétaire, est devenu un goulot d’étranglement et d’asphyxie structurel, notamment en matière de défense et de réarmement souverain dans un monde multipolaire.

L’ironie est flagrante.

L’Europe est confrontée à l’épreuve militaire et géopolitique la plus profonde depuis la Seconde Guerre mondiale, et pourtant la monnaie unique limite la flexibilité souveraine nécessaire pour relever ce défi.

Pourquoi ?

Parce que l’architecture de la zone euro encourage les jeux pervers sur la mutualisation de la dette plutôt que la responsabilité budgétaire.

Les membres fortement endettés comme l’Italie et la France peuvent sous-investir dans la défense tout en s’appuyant sur les excédents allemands et les marges de manœuvre de la BCE pour maintenir leur apparente crédibilité.

Parallèlement, la centralisation de la politique monétaire sans convergence budgétaire signifie que les pays faiblement endettés sont amenés à subventionner implicitement les pays fortement endettés sans en tirer de bénéfices stratégiques.

Il en résulte un aléa moral par construction.

La stratégie dominante de chaque partenaire consiste à profiter de la stabilité collective tout en maximisant la flexibilité individuelle. À terme, le système cessera de converger et commencera à se fracturer à la marge.

C’est une « dissonance structurelle ».

La récente hausse de l’EUR/USD, franchissant le seuil de 1,15, ne reflète pas la confiance dans la solidité budgétaire ou la cohésion institutionnelle de la zone euro.

C’est une question de flux : une fonction du rétrécissement des différentiels de taux d’intérêt dû à la politique accommodante de la Fed, à la stabilité des prix du pétrole et aux améliorations transitoires des balances commerciales de la zone euro.

Cela n’a rien à voir avec les fondamentaux.

Historiquement, une telle vigueur de l’euro en période de divergence macroéconomique a précédé de brusques retournements de situation (par exemple, après 2008 et après 2014).

Cette vigueur elle-même devient insoutenable lorsque la fragilité chronique des périphériques se réaffirme sous le poids d’une croissance lente, d’une stagnation démographique et du rééquilibrage du fardeau de l’OTAN.

À l’avenir, l’euro est confronté à deux voies : soit évoluer vers une véritable union budgétaire avec une stratégie militaro-industrielle commune et des normes de dépenses contraignantes toxiques, soit commencer à se fragmenter à la marge, les États exigeant une plus grande latitude, notamment en matière de budget de la défense.

Dans ce dernier cas, la vigueur de l’euro précède le retour de la volatilité des changes.

Si la BCE ne parvient pas à maintenir le centre, le marché testera à nouveau la périphérie. L’euro ne s’effondrera peut-être pas demain, mais il dérive structurellement vers l’insignifiance en tant qu’instrument géopolitique.

Le rallye est superficiel.

ED G

Une réflexion sur “Le rally de l’euro est un mouvement superficiel

  1. L’euro est une succursale du dollar.

    Le mouvement est circonstanciel et probablement voulu par les américains.

    Il suffit d’entendre les récentes déclarations de Christine « CIA » Lagarde sur un possible avènement de l’euro comme alternative au dollar pour s’en persuader.

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