Je suis étonné qu’en ces temps de débats sur les limites des dépenses sociales en France, en ces temps ou le lien lien avec l’immigration est parfaitement tracé , on ne ressorte pas le texte inaugural de Soros de 2015.
SOROS
L’Union européenne doit admettre sa propre responsabilité dans l’absence de politique commune en matière d’asile, absence qui a cette année changé une situation gérable d’arrivée croissante de réfugiés en une nouvelle crise politique majeure.
Chaque État membre s’est égoïstement concentré sur ses propres intérêts, au point d’agir bien souvent au détriment des intérêts d’autrui. C’est ainsi qu’est née une panique chez les demandeurs d’asile, au sein de l’opinion publique, et du côté des autorités en charge de l’application de la loi, une situation dont les demandeurs d’asile sont les premiers à souffrir.
L’UE a désormais besoin d’un plan global de réponse à cette crise, qui réaffirme l’efficacité de la gouvernance sur les flux de demandeurs d’asile, afin que les migrations puissent s’effectuer dans l’ordre et la sécurité, à un rythme adapté aux capacités européennes d’absorption des réfugiés.
Afin d’être complet, ce plan devra s’étendre au-delà des frontières de l’Europe. La situation est moins chaotique, et beaucoup moins coûteuse, lorsque les demandeurs d’asile potentiels demeurent au sein ou proches de leur localisation actuelle.
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De même, ce plan européen devra s’accompagner d’une réponse mondiale, sous l’autorité des Nations Unies et avec la participation de ses pays membres. Ceci viendrait répartir la charge sur les épaules d’un plus grand nombre d’États, tout en permettant l’instauration de normes mondiales pour la gestion des difficultés plus largement liées aux déplacements forcés.
Les six composantes de ce plan global doivent être les suivantes.
Premièrement, et au cours d’un avenir proche, il appartiendra à l’UE d’accepter au moins un million de demandeurs d’asile chaque année. Pour ce faire, il lui faudra répartir la charge de manière équitable – principe enfin approuvé par une majorité qualifiée lors du sommet de mercredi dernier.
Un financement adéquat se révélera crucial. Il s’agirait pour l’UE d’apporter 15 000 € par demandeur d’asile au cours de chacune des deux premières années, afin de contribuer à couvrir le logement, la santé et les coûts d’éducation de ces populations – et d’inciter plus activement les États membres à accepter les réfugiés.
L’UE pourrait lever ces fonds en émettant des obligations à long terme via sa capacité d’emprunt AAA largement inexploitée, ce qui aura pour bénéfice ajouté de susciter une stimulation budgétaire fort nécessaire à l’économie européenne.
Il sera tout aussi important de permettre à la fois aux États et aux demandeurs d’asile d’exprimer leurs préférences, en usant le moins possible de la contrainte. Le placement des réfugiés là où ils le souhaitent – et là où ils sont désirés – constituera une condition sine qua non de réussite.
Deuxièmement, l’UE doit conduire l’effort mondial d’apport d’un financement adéquat au Liban, à la Jordanie et à la Turquie, afin de venir en aide aux quatre millions de réfugiés vivant actuellement dans ces pays.
Jusqu’à présent, seule une part minime des financements nécessaires aux soins les plus basiques a été levée. Si l’on y intègre l’éducation, la formation et d’autres besoins essentiels, les coûts annuels s’élèvent à au moins 5 000 € par réfugié, soit au total à 20 milliards €. L’aide actuelle de l’UE à la Turquie, doublée la semaine dernière, ne s’élève encore aujourd’hui qu’à 1 milliard €. Il s’agirait également pour l’UE de contribuer à la création de zones économiques spéciales, bénéficiant d’un statut commercial privilégié dans la région, y compris en Tunisie et au Maroc, afin d’attirer l’investissement et de créer des emplois à la fois pour les locaux et les réfugiés.
Il appartiendrait à l’UE de s’engager financièrement en faveur des pays frontaliers, à hauteur chaque année d’au moins 8 à 10 milliards €, le reste des financements provenant des États-Unis et du reste du monde. Ceci pourrait s’ajouter au montant des obligations à long terme émises en soutien aux demandeurs d’asile en Europe.
Troisièmement, l’UE doit immédiatement commencer à bâtir une Agence des migrations et du droit d’asile, et plus tard un corps commun de gardes-frontières en son sein.
L’actuel patchwork de 28 systèmes distincts en matière d’asile ne fonctionne pas : il se révèle couteux, inefficace, et produit des résultats extrêmement incohérents sur le plan de la détermination des personnes admissibles au droit d’asile. Cette nouvelle agence pourrait ainsi progressivement harmoniser les procédures ; instaurer des règles communes en matière d’emploi et d’entrepreneuriat, ainsi que des avantages adaptés ; et élaborer une politique efficace de retour au pays pour les migrants non admissibles au droit d’asile, dans le respect des droits de la personne.
Quatrièmement, il est nécessaire d’établir des voies sécurisées pour les demandeurs d’asile, en commençant par leur permettre de passer de Grèce et d’Italie vers leur pays de destination. Il s’agit là d’une urgence extrême si l’UE entend mettre un terme à la panique. L’étape suivante logique consisterait à étendre ces voies sûres jusqu’aux régions frontalières, en réduisant ainsi le nombre de migrants entreprenant une traversée périlleuse de la Méditerranée. Si les demandeurs d’asile peuvent avoir une chance raisonnable d’atteindre enfin l’Europe, il est alors peu probable qu’ils restent là ils se situent. Ceci exigera une négociation avec les pays situés en première ligne, en coopération avec l’Agence de l’ONU pour les réfugiés, afin que puissent y être installés des centres de gestion – avec pour priorité la Turquie.
Les arrangements opérationnels et financiers développés par l’UE devront être utilisés aux fins de l’instauration de normes mondiales pour la gestion des migrants et demandeurs d’asile. Il s’agit là de la cinquième composante du plan global.
Enfin, afin de pouvoir absorber et intégrer plus d’un million de migrants et demandeurs d’asile chaque année, l’UE devra mobiliser le secteur privé – ONG, organismes humanitaires, et entreprises – afin que celui-ci apporte son parrainage. Ceci exigera non seulement des financements suffisants, mais également les capacités humaines et technologiques nécessaires à la mise en contact de ces migrants et soutiens privés.
L’exode né d’une guerre syrienne déchirante n’aurait jamais dû se changer en crise. Accentué au fil du temps, facile à entrevoir, cet exode aurait pu être pleinement gérable pour l’Europe et la communauté internationale. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a lui aussi récemment présenté un plan en six points de réponse à la crise. Seulement voilà, en subordonnant les droits humains des demandeurs d’asile et migrants à la sécurité des frontières, ce plan menace de diviser et de détruire l’UE, en lui faisant renoncer aux valeurs sur lesquelles elle s’est bâtie, et violer les lois censées la gouverner.
Il est grand temps que l’UE réagisse en produisant une politique de droit d’asile véritablement européenne, afin que puissent cesser la panique et les souffrances humaines inutiles.
George Soros
George Soros is Chairman of Soros Fund Management and the Open Society Foundations. A pioneer of the hedge-fund industry, he is the author of many books, including The Alchemy of Finance, The New Paradigm for Financial Markets: The Credit Crisis of 2008 and What it Means, and The Tragedy of the European Union: Disintegration or Revival? His most recent book is In Defense of Open Society (Public Affairs, 2019).
Voici une analyse, intessante sur ces questions; cette opinion pretend que la question humanitaire est non pas vraiment humanitaire, mais politique au plus haut niveau, l’idée eatnt que l’oncrée volontairemt une crsie afind epourssera une reaction poitiqued eniveau superieure . Lisez
Soros, Cloward-Piven et la politique de crise
Lorsque George Soros a publié son plan de « Reconstruction du système d’asile » pour l’Europe en 2015, il se présentait comme un projet humanitaire.
Mais sous la compassion, la logique faisait écho à la stratégie Cloward-Piven, apparue pour la première fois dans The Nation en 1966.
Cloward et Piven affirmaient qu’en inscrivant le plus grand nombre possible d’Américains pauvres à l’aide sociale, le système pourrait être ainsi surchargé jusqu’à l’effondrement, obligeant Washington à intervenir en créant un revenu minimum garanti.
Il n’a jamais été question de réparer l’aide sociale en l’état, mais de fabriquer une crise pour parvenir à une transformation politique que le débat normal ne permettrait jamais.
Le plan de Soros reflétait cette architecture de surcharge. Il appelait l’Europe à absorber indéfiniment au moins un million de demandeurs d’asile par an, financée par des dizaines de milliards de dettes et gérée par une agence européenne centralisée pour l’asile et un corps de garde-frontières.
Les systèmes nationaux, déjà mis à rude épreuve par l’immigration, seraient contournés et subordonnés à Bruxelles.
De même que Cloward et Piven cherchaient à submerger les bureaucraties locales pour forcer la main à Washington, la logique de Soros pousse l’UE vers un contrôle supranational plus profond en présentant la centralisation comme la seule issue au chaos.
Les résultats de cette expérience sont visibles dans toute l’Europe. Le puissant État-providence allemand, mis à rude épreuve par sa politique d’ouverture, a dû faire face à des pressions en matière de logement et d’intégration, qui ont alimenté la montée des mouvements nationalistes.
Les généreuses prestations sociales suédoises ont attiré des flux de demandeurs d’asile par habitant parmi les plus élevés d’Europe, provoquant des pénuries de logements, une flambée des coûts et des bouleversements politiques qui ont propulsé les Démocrates suédois au premier plan.
La Norvège, longtemps l’État-providence le plus avancé au monde, compte désormais plus de 20 % de sa population née à l’étranger, une transformation démographique qui a bouleversé la politique nationale.
La France a connu des flambées de troubles à répétition dans les banlieues à forte densité d’immigrants, où la dépendance à l’aide sociale, le chômage et la dislocation culturelle se heurtent aux foyers de tensions policières.
Même les États-Unis, dotés d’un filet de sécurité sociale moins étendu, ont subi les mêmes pressions, face aux pressions migratoires record dans les États frontaliers et les grandes villes, creusant de profondes divisions politiques.
Les parallèles avec Cloward-Piven sont frappants.
Les deux stratégies reposent sur la même séquence : submerger les systèmes existants, observer la panique monter, puis présenter la centralisation comme la seule réponse rationnelle.
Cloward-Piven a adopté une approche ascendante, mobilisant les organisations populaires pour inonder les bureaux locaux d’aide sociale.
Soros, quant à lui, a adopté une approche descendante, proposant un schéma technocratique visant à canaliser les migrations vers des structures que seule une autorité centralisée peut administrer.
L’une a utilisé le langage des droits civiques, l’autre celui de la gestion des crises humanitaires, mais toutes deux considèrent la crise non pas comme un échec à prévenir, mais comme un levier pour pousser les systèmes politiques au-delà du point de rupture et les amener à de nouvelles configurations.
L’histoire nous met en garde.
La stratégie Cloward-Piven n’a jamais réalisé son rêve de revenu garanti, mais elle a bel et bien augmenté les allocations sociales, alourdi le fardeau des collectivités locales et remodelé la politique sociale américaine.
Le plan de Soros, s’il se concrétise pleinement, risque de produire le même résultat : des budgets nationaux tendus au maximum, une cohésion sociale fragilisé, une montée des réactions populistes et une intervention de l’UE pour consolider son pouvoir au nom de l’ordre.
Ce qui apparaît comme une réponse à la pression migratoire est, sous cet angle, bien plus délibéré : l’exploitation de la surcharge comme opportunité, de la crise comme instrument et du chaos comme accoucheuse d’un nouvel ordre politique.