Alors que les répercussions des droits de douane draconiens imposés par les États-Unis sur le commerce mondial continuent de se faire sentir, il semble que Washington soit déjà prêt à appliquer une nouvelle série de mesures tarifaires, complexifiant encore davantage le paysage du commerce international.
Le président américain Donald Trump a dévoilé jeudi de nouveaux droits de douane drastiques sur les importations, comprenant des droits de 100 % sur les médicaments brevetés et des prélèvements de 25 % sur les poids lourds, un droit de 50 % sur les meubles de cuisine et les meubles-lavabos importés, ainsi qu’un prélèvement de 30 % sur les meubles rembourrés, qui entreront en vigueur mercredi, a rapporté Reuters.
Cette annonce intervient juste un jour après que le département américain du Commerce a annoncé l’ouverture de nouvelles enquêtes au titre de l’article 232 sur l’importation d’équipements de protection individuelle, de produits médicaux, de robotique et de machines industrielles, ce qui, selon un rapport de Bloomberg, élargit encore le champ des industries potentiellement soumises à des droits de douane.
L’introduction d’une nouvelle série de droits de douane et d’enquêtes non seulement accroît l’incertitude du contexte commercial mondial, mais reflète également la volonté de Washington d’inverser sa situation économique par le protectionnisme.
Les trois secteurs visés – poids lourds, produits pharmaceutiques et ameublement – partagent une caractéristique commune : ce sont des secteurs où les États-Unis sont confrontés à des déficits commerciaux considérables.
Si cette mesure semble viser à corriger ces déséquilibres commerciaux et à revitaliser l’industrie manufacturière nationale, un examen plus approfondi de l’évolution récente des déficits commerciaux américains révèle que ces droits de douane ont peu de chances d’atteindre leurs objectifs et pourraient, au contraire, nuire davantage à l’économie américaine.
Il est vrai que le déficit commercial américain a fortement fluctué cette année. Plus précisément, il s’est réduit de 16,8 % (en glissement mensuel) pour atteindre 85,5 milliards de dollars en août, ce qui semble démontrer l’efficacité des politiques tarifaires.
Cependant, une analyse minutieuse des causes profondes de cette réduction du déficit révèle que cette évolution est davantage due à la contraction passive des importations qu’à une amélioration substantielle de la compétitivité des exportations américaines, et encore moins à un signe d’amélioration durable des fondamentaux économiques.
Une véritable amélioration du déficit commercial devrait reposer sur la croissance des exportations et le dynamisme économique. Ce n’est qu’en renforçant la compétitivité des exportations que celle-ci pourra véritablement refléter la reconnaissance des produits américains sur le marché mondial, stimulant ainsi l’expansion des industries nationales concernées et établissant des bases économiques solides pour un commerce équilibré.
Pourtant, l’approche actuelle des États-Unis repose sur la limitation des importations par des droits de douane élevés, et non sur leur remplacement par des alternatives nationales compétitives. Cette approche consistant à «réduire le déficit en sacrifiant les importations» ne permet pas de s’attaquer aux causes profondes des déséquilibres commerciaux et risque de plonger l’économie américaine dans une nouvelle situation difficile en raison de perturbations des chaînes d’approvisionnement.
L’amélioration des capacités d’exportation ne peut être obtenue par les seules politiques. Elle dépend de multiples facteurs, notamment de la vigueur du dollar américain et de la compétitivité globale du secteur manufacturier. Un dollar fort, par exemple, rendrait les produits américains plus chers sur les marchés internationaux, compromettant ainsi la croissance des exportations, même si les producteurs nationaux cherchent à se développer à l’étranger.
De plus, la relance de l’industrie manufacturière américaine se heurte à des obstacles structurels tels que les retards technologiques, les pénuries de main-d’œuvre et la fragmentation des chaînes d’approvisionnement.
Aucun de ces problèmes ne peut être résolu du jour au lendemain par des barrières tarifaires.
Sans relever ces défis fondamentaux, la simple restriction des importations pour stimuler la croissance industrielle ne créera pas un cercle vertueux de réduction des importations et d’augmentation des exportations. Au contraire, elle risque de perturber l’équilibre complémentaire de l’économie américaine et de réduire l’efficacité globale.
La revitalisation de l’industrie manufacturière repose sur un écosystème industriel porteur, une innovation soutenue, une demande stable et une orientation politique judicieuse, et non sur une protection commerciale à court terme. Les droits de douane peuvent limiter temporairement la concurrence étrangère, mais ils ne peuvent créer le véritable moteur nécessaire au progrès industriel.
L’imposition fréquente de droits de douane par les États-Unis entraînera inévitablement une nouvelle vague de tensions avec leurs partenaires commerciaux, ce qui limitera encore davantage l’espace de marché des exportateurs américains.
Le déficit commercial américain est le résultat de décennies de mondialisation de la production, de la structure de l’économie américaine et des modes de consommation. Si Washington persiste dans ses mesures protectionnistes unilatérales, cela ne fera que nuire davantage à l’efficacité économique et, à terme, s’écarter des intentions politiques initiales, compromettant ainsi la compétitivité à long terme des États-Unis dans l’économie mondiale.