Une interview récente accordée par le représentant républicain Thomas Massie (R-KY) à Matt Kibbe, diffusée le 29 octobre 2025 sur la chaîne YouTube Free the People fait grand bruit.
Massie, connu pour ses positions libertariennes et son opposition fréquente à la direction de son parti, comme Rand Paul, y explique pourquoi il soupçonne que le président Donald Trump a changé d’avis sur la publication des dossiers liés à Jeffrey Epstein.
Ces dossiers incluent des documents du Département de la Justice (DOJ) sur l’enquête concernant Epstein, son réseau de trafic sexuel et des personnalités associées, comme Ghislaine Maxwell.
Pour rappel, Trump avait promis pendant sa campagne de 2024 de déclassifier ces fichiers pour promouvoir la transparence.
Cependant, depuis son retour au pouvoir en janvier 2025, l’Administration a opté pour des publications partielles et tronquées, qualifiant l’affaire de « canular démocrate » ou d' »irrelevant ».
Massie mène une croisade au Congrès pour forcer une publication complète via une pétition de décharge (discharge petition), qui a recueilli 216 signatures (dont 211 démocrates et 4 républicains) au 3 septembre 2025, et qui pourrait bientôt atteindre les 218 nécessaires pour un vote contraignant à la Chambre.
Massie n’accuse pas Trump d’implication personnelle dans les crimes d’Epstein – il a explicitement déclaré croire que Trump n’est pas impliqué. Mais il pointe du doigt des motivations plus larges pour ce revirement.
Il donne deux raisons principales.
Raison 1 : Protéger les amis riches et influents de Trump
Massie argue que Trump hésite à publier les dossiers pour éviter d’embarrasser ses donateurs et proches associés, qui pourraient être mentionnés – non nécessairement pour des crimes, mais pour des liaisons extraconjugales ou des fréquentations compromettantes avec des victimes ou Epstein lui-même.
- Explication de Massie : « Trump ne veut pas embarrasser les amis riches et influents qui lui ont fait des dons ou qui assistent à ses dîners. Et il se peut même qu’ils ne soient pas coupables d’un crime. Ils sont peut-être simplement très gênés d’avoir eu des relations extraconjugales avec ces femmes, par exemple. »
- Contexte et exemples :
- Des donateurs majeurs de Trump, comme le milliardaire John Paulson (qui a dépensé 2 millions de dollars en publicités contre Massie dans son district), figurent dans le « carnet noir » d’Epstein newsweek.com.
- Massie a qualifié la publication partielle des dossiers en juillet 2025 de « pathétique » et de « répétition de vieux documents », similaire aux « classeurs » distribués par l’avocate générale Pam Bondi à des influenceurs – un geste perçu comme du théâtre politique pour apaiser la base MAGA sans révéler de noms compromettants .
- Des survivantes d’Epstein, comme Lisa Phillips, ont affirmé publiquement : « Nous, les survivantes, savons les noms. Beaucoup d’entre nous ont été abusées par eux. » Massie a relayé ces témoignages lors d’une conférence de presse au Capitole le 3 septembre 2025 politico.com.
Cette raison s’aligne avec des critiques plus larges : un sondage Quinnipiac de juillet 2025 montre que les républicains sont divisés sur la gestion de l’affaire par Trump (environ 50/50), et 93,7 % des répondants à un sondage en ligne de Massie (76 500 participants) exigent la publication complète
Raison 2 : L’aspect renseignement et géopolitique impliquant Israël et des « sources et méthodes »
Massie va plus loin en évoquant un niveau « plus profond » : une protection des opérations de renseignement, potentiellement liées au trafic sexuel d’Epstein, et une sensibilité diplomatique vis-à-vis d’Israël, dont un haut responsable est lié à Epstein.
- Explication de Massie : « Mais je pense qu’il y a aussi l’aspect renseignement de cette affaire qui va encore plus loin. […] Peut-être que Trump est dans un avion et qu’il pense : « Je ne peux pas embarrasser mes amis. » Mais il se peut qu’il y ait des gens dans l’administration, des carriéristes, qui pensent à un autre niveau, du genre : « Eh bien, essayons de convaincre Trump qu’il va embarrasser ses amis », essayons de protéger nos sources et nos méthodes », ce qui peut impliquer le trafic sexuel. « Et nous ne voulons pas embarrasser notre partenaire israélien, à un moment où la popularité et le soutien à sa guerre sont au plus bas. Et voilà que nous allons découvrir que son ministre de la Défense, Ehud Barak, a été photographié une trentaine de fois en compagnie de Jeffrey Epstein. »
- Contexte et exemples :
- Lien avec Ehud Barak : L’ancien Premier ministre et ministre de la Défense israélien Ehud Barak a été documenté à plus de 30 reprises avec Epstein, y compris des visites à son appartement new-yorkais en 2016. Des photos et logs de vol confirment ces rencontres, bien que Barak nie toute implication dans les crimes.
- Aspect renseignement : Des spéculations persistantes (relayées par Massie et d’autres) suggèrent qu’Epstein opérait un réseau de chantage impliquant des agences de renseignement, potentiellement liées à la CIA ou au Mossad.
- Le DOJ a nié l’existence d’une « liste de clients » en juillet 2025, mais des fuites indiquent des redirections pour « protéger les sources » selon thehill.com. Massie soupçonne que des « carriéristes » au DOJ ou à la Maison Blanche manipulent Trump sous couvert d’embarras personnel.
- JD Vance, Pam Bondi et Kash Patel : Massie affirme qu’ils n’étaient « pas au courant des détails plus approfondis » lors de leurs promesses de campagne pour la transparence.
- Bondi a distribué des « binders » de documents en juillet 2025, mais Massie les qualifie de « carburant pour un canular ». Patel, nommé directeur de la CIA, et Vance (vice-président) ont été critiqués pour leur silence récent.
Implications et réactions
- Politiques : Massie a averti que ce revirement est « vraiment mauvais pour les républicains » politiquement, risquant d’aliéner la base MAGA qui exige la transparence thehill.com +1. Trump a menacé de soutenir un challenger contre Massie en 2026, et le speaker Mike Johnson bloque la pétition au profit d’une enquête du Comité de surveillance (menée par le républicain James Comer).
- Soutien bipartisan : La pétition de Massie bénéficie d’un large appui démocrate et de figures comme Marjorie Taylor Greene ou Lauren Boebert, prouvant sa popularité auprès de la base GOP.
- Prochaines étapes : Si la pétition passe (probable d’ici fin 2025), elle forcerait une publication en 30 jours, mais Trump pourrait opposer son veto. Les survivantes d’Epstein continuent de témoigner pour maintenir la pression.
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