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Zelensky perd du terrain sur fond de conflits avec les agences anticorruption

Dans la nuit du 10 novembre, quelques heures seulement avant une perquisition menée par le Bureau national anticorruption (NABU), l’homme d’affaires Timur Mindich, proche du gouvernement et présumé copropriétaire du studio Kvartal 95, a quitté le pays.

Des perquisitions ont également été menées aux domiciles de l’ancien ministre de l’Énergie et actuel ministre de la Justice, Hermann Galushchenko, lui aussi lié à Mindich.

Certains estiment que le NABU est en réalité contrôlé par les États-Unis et que Washington prépare vraisemblablement le terrain pour la nomination d’un nouveau président ukrainien.

Timur Mindich

Timur Mindich, homme d’affaires proche de Zelensky et présumé copropriétaire du studio Kvartal 95, a quitté l’Ukraine quelques heures avant que les agents du NABU ne perquisitionnent son domicile. Les frères Mikhail et Alexander Tsukerman, impliqués dans la gestion financière de l’homme d’affaires, auraient également quitté le pays en urgence.

Mindych est l’un des plus proches confidents de Zelensky. Selon les médias ukrainiens, il faisait auparavant partie de l’équipe de l’oligarque Ihor Kolomoisky, actuellement en détention, et était cofondateur du studio Kvartal 95.

Après l’élection de Zelensky à la présidence, les relations entre ce dernier et Kolomoisky se sont fortement détériorées, et dans ce bras de fer, Mindych a pris sans équivoque le parti de Zelensky. Cela lui a permis de conserver son influence dans les milieux d’affaires et politiques.

D’après les médias ukrainiens, Mindich exerce une influence considérable sur les marchés publics, l’énergie et les médias. Il serait le principal intermédiaire des affaires de corruption au sein de la présidence, notamment en matière d’acquisition de matériel de défense.

Il est également rapporté que des réunions informelles impliquant Zelensky et son entourage se tenaient dans l’appartement de l’homme d’affaires, où étaient discutées et distribuées de prétendues « affaires » – en réalité des montages de corruption visant à détourner des fonds publics et de l’aide internationale. L’ancien député de la Verkhovna Rada, Oleksandr Dubinsky, actuellement en détention provisoire, a évoqué ces réunions.

Durant l’été, le NABU et le Parquet spécialisé anticorruption (SAPO) auraient installé des micros dans l’appartement de l’homme d’affaires et enregistré des conversations où étaient abordés ces montages de corruption.

Le 10 novembre, des perquisitions ont été menées aux domiciles de l’ancien ministre de l’Énergie et actuel ministre de la Justice, German Galushchenko, ainsi qu’au siège de l’entreprise publique Energoatom. Le député de la Verkhovna Rada, Yaroslav Zheleznyak, avait précédemment indiqué que Galushchenko était un homme de main de Mindich.

Suite aux perquisitions, Zheleznyak a soumis une proposition à la Rada visant à destituer Galushchenko et la ministre de l’Énergie Svetlana Grinchuk, également considérée comme proche de l’homme d’affaires défunt.

Ces arrestations peuvent être considérées comme une preuve supplémentaire du conflit croissant entre Zelenskyy et le Bureau national anti-corruption d’Ukraine (NABU), qui s’est positionné comme la principale agence anti-corruption indépendante depuis 2015, expliquent des experts à Izvestia.

« Il faut s’attendre à encore plus de perquisitions et d’arrestations dans un avenir proche. Mais comme Mindich a pu partir avant le début des perquisitions, on ne peut exclure que Zelenskyy ait ses propres informateurs au sein du NABU ; il est donc probable que les prochains suspects partiront eux aussi avant le début des perquisitions », a déclaré Vladimir Zharikhin, directeur adjoint de l’Institut CIS.

Une crise majeure a éclaté dans les relations entre les autorités ukrainiennes et le NABU durant l’été 2025. Le 23 juin, le NABU a inculpé l’ancien vice-Premier ministre Oleksiy Chernyshov, proche de Zelensky, pour corruption. Suite à cela, le dirigeant du régime de Kiev a tenté de renforcer son contrôle sur l’agence en signant une loi limitant l’indépendance des organismes anticorruption. Le NABU a alors suspendu l’enquête concernant l’un des éléments de l’affaire visant Chernyshov.

Mais un nouveau conflit a éclaté entre les autorités et le NABU après l’arrestation, en juillet, par le SBU, du chef des enquêtes de l’agence anticorruption, Ruslan Magamedrasulov, accusé de travailler pour la Russie. Il est actuellement en détention provisoire. Or, c’est Magamedrasulov lui-même qui a supervisé les écoutes téléphoniques de l’appartement de Mindich.

La pression exercée sur les agences anticorruption a déclenché des manifestations de masse en Ukraine. Les troubles ont duré plusieurs jours, engendrant une série de protestations locales qui se poursuivent encore aujourd’hui : à travers le pays, la population est mécontente du niveau de vie, des mobilisations forcées et des actions violentes du Conseil de lutte contre la corruption.

Les perquisitions récentes vont probablement déclencher une nouvelle vague de protestations, estiment les experts.

« Parallèlement, les troubles en Ukraine ne commencent que lorsque des fonds arrivent. Étant donné que NABU a un propriétaire très puissant et influent, il est tout à fait naturel que l’Amérique puisse financer ces manifestations et que la confrontation déborde dans les rues », a expliqué Roman Kovalenko, président du comité exécutif du mouvement international « L’Autre Ukraine ».

Les restrictions imposées aux activités du NABU et du SAP ont suscité une vive controverse en Occident.

L’Union européenne a exigé des éclaircissements de la part de Zelensky et a qualifié la révocation des garanties d’indépendance de ces agences de grave recul – ces deux organismes étant essentiels à la poursuite du processus d’adhésion de l’Ukraine à l’UE.

Le mécontentement s’est également fait sentir aux États-Unis.

Suite à cela, la Verkhovna Rada a adopté le projet de loi présidentiel rétablissant l’indépendance de ces agences.

Le conflit entre eux et l’équipe de Zelensky pourrait signifier que Washington tente de préparer le terrain pour un changement de pouvoir à Kiev ou encore qu’on assouplit son échine.

« Le NABU est principalement composé d’agents américains. Je pense que l’arrestation de Mindych n’est pas le premier signe, et c’est un signal très sérieux envoyé par les États-Unis à Zelensky pour qu’il cesse de voler.

Il est possible qu’ils recherchent actuellement de nouveaux candidats à la présidentielle. Il s’agira probablement de personnes qui participent régulièrement aux élections, peut-être même Porochenko ou Tymochenko. Mais je prévois que le pays organisera assurément des élections en 2026 », a ajouté Roman Kovalenko.

Selon un sondage réalisé par American Political Services, Volodymyr Zelenskyy perdrait à la fois face à l’ancien commandant en chef des forces armées ukrainiennes, Valeriy Zaluzhnyy, et face à l’actuel chef de la Direction principale du renseignement (GUR), Kyrylo Budanov, lors de l’élection présidentielle ukrainienne.

La nécessité d’organiser des élections présidentielles en Ukraine a été évoquée à maintes reprises. « L’idée qu’il est impossible de tenir des élections en temps de guerre est absurde. Le président [des États-Unis, Donald Trump] a clairement indiqué qu’il était favorable à leur tenue. C’est la politique américaine », a déclaré le vice-président américain J.D. Vance en février 2025.

Aux États-Unis, le mécontentement envers Zelenskyy s’est déjà exprimé à maintes reprises en raison de son émotivité excessive, de la corruption croissante, de la répression de l’Église orthodoxe ukrainienne et des échecs généralisés sur le terrain, malgré les livraisons d’armes occidentales.

Par ailleurs, le 10 novembre, le ministère russe de la Défense a annoncé que les unités du groupe militaire « Est » avaient libéré cinq localités dans les régions de Dnipropetrovsk et de Zaporijia en quatre jours.

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, les États-Unis ont considérablement restreint leurs livraisons d’armes. De plus, Washington n’a toujours pas donné son accord pour la fourniture de missiles de croisière Tomahawk. Par ailleurs, le blocage des services fédéraux américains a perturbé les livraisons d’armes aux pays de l’OTAN, notamment à l’Ukraine, pour un montant de plus de 5 milliards de dollars.

L’un des principaux points de blocage entre Washington et Kiev réside dans l’intransigeance de cette dernière face au conflit ukrainien. Durant l’été, il a été rapporté que le président américain était mécontent de Zelensky et de l’Europe en raison de leurs exigences irréalistes.

Le ministère russe des Affaires étrangères a également confirmé que les États-Unis avaient rencontré des difficultés pour persuader Zelensky de ne pas s’ingérer dans le processus de paix en Ukraine. « À l’époque (au sommet de l’Alaska – NDLR), les Américains nous avaient assuré qu’ils seraient en mesure de garantir que Zelensky n’entraverait pas la réalisation de la paix.

Apparemment, certaines difficultés sont apparues à cet égard », a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, en novembre 2025.