Plusieurs milliers de milliards de dollars ont déjà été investis dans l’intelligence artificielle à l’échelle mondiale (on parle fréquemment de 2500 à 4000).
Si l’on prolonge les tendances actuelles, on peut raisonnablement anticiper qu’environ 10 000 milliards auront été investis d’ici 2030 – soit près de 10 % du PIB mondial actuel.
On parle de 6700 mds de dollars d’investissement supplémentaires, rien que pour les datacenters.
L’IA génère indéniablement de la productivité ; mais quel niveau de productivité faudrait-il pour que ces investissements deviennent rentables ?
Note Par ailleurs ces gains de productivité auront pour contreparties des couts d’externalité qu’il est impossible de chiffrer à ce stade. Quid des conséquences sociales et économiques en général de ces gains de productivité?
Il faut au préalable aussi avoir à l’esprit que les acteurs qui financent cela le font au travers de systèmes à maturation de moyen terme (5 à 7 ans typiquement), ce qui nécessite un recyclage régulier des capitaux, ce qui à chaque fois induit une réévaluation des besoins de profitabilité.
Si l’on suppose que la valeur créée par l’IA se répartira pour un tiers vers les fournisseurs de technologies (pelles, pioches incluses) et pour deux tiers vers les utilisateurs, alors pour que les investisseurs récupèrent 10 000 milliards, il faudrait que l’IA génère 30 000 milliards de richesse supplémentaire à l’horizon 2030.
Mais avec un coût du capital de 7 %, ce montant doit être relevé de 50 % supplémentaires pour compenser la charge financière et le risque associé.
Autrement dit, les systèmes d’IA devraient produire 45 000 milliards d’activité économique additionnelle en quelques années. Rapporté au PIB mondial attendu pour 2030 (environ 140 000 milliards), cela reviendrait à une hausse de productivité globale d’environ 30 %, soit un rythme moyen de 5 % par an — un niveau historiquement sans précédent, y compris dans les grandes révolutions industrielles.
C’est donc hautement improbable : quand bien même les technologies deviendraient extrêmement véloces et performantes, la recherche économique nous apprend que les temps de diffusion dans le réel des innovations sont incomparablement plus long que ce que l’on suppose généralement.
L’argument « this time, it’s different » a été largement démonté à l’égard de l’IA. Il ne s’agit pas ici de contester la réalité de la révolution IA, mais sa vitesse.
La Valley est remplie de gens dont le premier talent est de savoir remarquablement bien mettre en valeur et la conséquence la plus directe est que ce qui est là bas au loin semble, par un effet hypnotique, là, ici, tout près.