Cette semaine, le rendement des obligations d’État japonaises à 10 ans a bondi de 5 points de base pour atteindre 2,02 %, un niveau jamais vu depuis le 17 février 1999.
Le ratio dette publique/PIB du Japon est passé de 130 % en 1999 à 221 % (au 31 mars 2025).
Le yen a continué de chuter, il a baisse de 1,4 % vendredi, lors de ce resserrement monétaire, atteignant son plus bas niveau face au dollar depuis le 14 janvier.
19 décembre – Financial Times :
« Les rendements des obligations d’État japonaises de référence ont atteint leur plus haut niveau depuis 1999 après que la banque centrale a relevé ses taux d’intérêt à court terme pour lutter contre la hausse des prix et des salaires.
La Banque du Japon a relevé son taux directeur de 0,25 point de pourcentage, le portant à environ 0,75 %, un niveau jamais atteint depuis trente ans, et a indiqué être prête à poursuivre le resserrement monétaire si les conditions s’y prêtent.
Cette hausse de taux, décidée à l’unanimité par le Conseil de politique monétaire, est la quatrième sous la direction du gouverneur Kazuo Ueda, poursuivant ainsi le processus de normalisation qu’il a initié l’année dernière.
Ce taux est le plus élevé depuis 1995, alors que le Japon sort de plusieurs décennies de politique monétaire ultra-accommodante menée pour tenter de combattre la déflation. Malgré la perspective de nouvelles hausses de taux, le yen s’est déprécié face au dollar après la décision de la Banque du Japon. »
Le yen a clôturé la semaine en baisse de moins de 3 % par rapport à son plus bas niveau pluridécennal de juillet 2024 (161,69) face au dollar (2 juillet 1986), atteint lors de la dévaluation du yen consécutive aux accords du Plaza de septembre 1985.
Le 15 décembre, Bloomberg :
« La ministre des Finances japonaise a mis en garde les spéculateurs après l’affaiblissement marqué du yen face au dollar, suite à la décision de la Banque du Japon de relever ses taux… “Je constate des fluctuations unilatérales et rapides du taux de change en l’espace d’une demi-journée, voire de quelques heures seulement, et je suis profondément préoccupée”, a déclaré la ministre des Finances, Satsuki Katayama… “Nous prendrons les mesures appropriées face à ces mouvements de change excessifs, conformément à la déclaration conjointe nippo-américaine de septembre”, a-t-elle ajouté. »
Fort de réserves internationales considérables, le ministère japonais des Finances, par ses menaces, capte l’attention des marchés. Cependant, l’efficacité des menaces des décideurs politiques est soumise à la loi des rendements décroissants.
Le moment de vérité se rapproche .
Sur la semaine, les rendements des obligations d’État japonaises (JGB) ont progressé de sept points de base (à 2,02 %).
Et cela concerne le monde entier car le Japon a été et est encore le hedge fund qui inonde le monde et qui à ce titre a maintenu longtemps les taux bas.
Vendredi, les JGB ont de nouveau tiré les rendements obligataires mondiaux vers le haut.
Le rendement allemand à 10 ans a augmenté de cinq points de base vendredi pour atteindre 2,90 %, son plus haut niveau depuis le 19 octobre 2023, et se situe à seulement sept points de base de son plus haut niveau de juillet 2011.
Parallèlement, le rendement allemand à 30 ans a bondi de sept points de base à 3,55 %, son plus haut niveau depuis le 21 juillet 2011.
Le rendement français à 10 ans a progressé de quatre points de base à 3,61 %, son plus haut niveau depuis le 25 novembre 2011.
Le rendement des obligations françaises à long terme (30 ans) a grimpé de sept points de base vendredi pour atteindre 4,52 %, dépassant même le pic de novembre 2011 lors de la crise obligataire européenne, et atteignant son plus haut niveau depuis le 10 juin 2009 .
EN PRIME
Le Japon traverse une période difficile. Sa dette publique brute représente 240 % du PIB, contraignant la Banque du Japon (BoJ) à plafonner les taux d’intérêt à long terme, craignant qu’une forte hausse ne déclenche une crise de la dette. Or, ce plafonnement maintient artificiellement les taux à un niveau bas, ce qui a entraîné la dépréciation du yen ces dernières années. Ceci confirme que le plafonnement des taux n’est en aucun cas une solution au problème du surendettement. Il ne fait que transformer une crise du marché obligataire en une crise monétaire.
La solution classique pour les pays trop endettés consiste à réduire les dépenses et à augmenter les impôts.
Le Japon dispose d’une troisième option : la vente d’une partie de ses actifs financiers et l’utilisation du produit de la vente pour réduire sa dette. Ces actifs sont très importants, ce qui explique pourquoi la dette publique nette du Japon est bien inférieure à sa dette brute.

Le graphique ci-dessus présente les données du FMI relatives à la dette publique brute (axe horizontal) et nette (axe vertical) des principales économies avancées mondiales en 2024. La dette brute du Japon atteint le niveau exorbitant de 240 % du PIB, tandis que sa dette nette est bien moindre, à 130 %.
Cette différence s’explique par la présence d’actifs financiers, dont certains peuvent être vendus rapidement, le produit de ces ventes servant à réduire une partie du fardeau de la dette japonaise. Une telle mesure permettrait de limiter la nécessité de plafonner les taux d’intérêt de la Banque du Japon, de stabiliser le yen et, surtout, de montrer que le Japon s’attaque enfin sérieusement à son problème d’endettement.
Si cela n’a pas encore été fait, c’est parce que des intérêts particuliers souhaitent continuer à gérer les différents actifs financiers détenus par l’État japonais. Plus vite ces intérêts seront réduits, plus vite le Japon pourra sortir de l’engrenage de la dette. Compte tenu des difficultés politiques que représentent actuellement toute hausse d’impôts et toute réduction des dépenses, c’est la meilleure solution pour le Japon.
RJ BROOKS