La menace de déflation, alibi de votre spoliation.

Déflation. Une enquête de la BRI remet en cause les raisons pour lesquelles les banques centrales s’acharnent.
.
Introduction par Bruno Bertez :
.
Le consensus selon lequel la déflation est fondamentalement mauvaise fait partie de l’idéologie des pouvoirs en place. Une idéologie de « dominants » dans un monde de capitalisme financiarisé ou l’on s’enrichit , non par l’activité productrive, mais par le brassage de signes financiers et monétaires. Le fondement du capitalisme financiarisé, que nous appelons aussi souvent le capitalisme d’arbitrage ou capitalisme anglo-saxon, ce fondement est la dette et la possibilité d’accéder à celle ci quasi gratuitement. Plus le capitalisme financiarisé progresse, plus son idéologie envahit les esprits. Ce qui est discutable et nuancé devient dogme. Un dogme qui sert à recouvrir une réalité cachée, dissimulée, a savoir :
.
-1 que rien ne prouve que la déflation est négative pour la croissance
-2 que l’idéologie anti-déflation est produite par ceux qui vivent et prospèrent du crédit
-3 que la lutte contre la déflation est un gigantesque, colossal transfert de richesse
-4 que l’idéologie sert à masquer la complicité, la communauté d’intérêts, entre les gouvernements et les débiteurs, la classe kleptocratique en général et ses alliés
-5 que la déflation est la règle économique, elle traduit le progrès humain
.
La lutte contre la déflation, laquelle est la conséquence du progrès technique, progrès des processus de fabrication, est une lutte contre l’efficacité, c’est une lutte pour protéger l’ancien, l’inefficace, le dépassé. Comme l’a dit Bernanke lors de sa rencontre avec le Ministre Britannique des Finances : « nous avons sauvé l’ordre mondial ».
.
Peu importe que cet ordre soit en réalité un désordre, les pourfendeurs de la déflation sont non pas objectifs, non pas au service du peuple et des citoyens, ils sont au service de ceux qui bénéficient de cet « ordre ».
.
Voila une démonstration claire et convaincante du fait que l ‘économie dominante est une idéologie, au service de l’ordre ancien, pas une science. Les idéologies s’imposent par la mystification, le recours aux fausses évidences comme celle, idiote du différé de consommation que la déflation susciterait. Différé imaginaire bien sur.
.
Voici un bon texte de HÖFERT.

Andreas Höfert*

Andreas Höfert (Chef économiste UBS Wealth Management)
S’il est un sujet sur lequel la plupart des économistes s’accordent, c’est que la déflation est fondamentalement mauvaise. De ce fait, il convient de l’éviter par tous les moyens possibles.
L’argument de la nocivité de la déflation s’articule habituellement autour du postulat que la croissance économique s’en trouve amoindrie.
Lors d’une déflation, la demande tend à baisser car les gens reportent une partie de leurs achats face à la perspective d’une baisse des prix future. Cette demande réduite accentue à son tour la pression baissière sur les prix, renforçant ainsi le cercle vicieux de la déflation.
Les économistes reconnaissent aussi que la déflation engendre une certaine redistribution de la richesse. Toutefois, la plupart soulignent l’impact négatif de cette redistribution sur la croissance, sans trop s’attarder sur la cause en elle-même.
En cas de déflation, la valeur de l’encours de la dette en termes de pouvoir d’achat augmentera, rendant ainsi le service de la dette de plus en plus difficile à assumer pour les débiteurs, qui risquent en dernier ressort de faire défaut. Les forces récessives s’en trouvent ainsi renforcées, aboutissant au final à une dépression.
Curieusement, s’il existe un consensus parmi les économistes au sujet de l’impact négatif de la déflation sur la croissance économique, les données empiriques sont nettement moins convaincantes.
Une récente étude de la Banque des règlements internationaux (BRI) conclut que le lien entre la croissance de la production et la déflation «est faible et largement lié à la Grande Dépression» (Claudio Borio, et al. (2015): The costs of deflations: a historical perspective, Revue trimestrielle de la BRI, mars 2015).
Pour parvenir à ce résultat, ses auteurs ont analysé un échantillon couvrant quelques 140 années (la série statistique remonte à 1870) et couvre 38 économies. L’étude a révélé que le taux de croissance des économies en déflation était inférieur de moitié à celui des économies en inflation, ce qui constitue une différence statistiquement significative.
Toutefois, si l’on répartit les données en trois sous-échantillons (avant la Première Guerre mondiale, dans l’entre-deux guerres et après la Seconde Guerre mondiale), il apparaît que ce résultat était uniquement lié à l’épisode de la Grande Dépression. Avant 1914, il n’y avait pas d’écart sensible de production entre les périodes d’inflation et de déflation et il en va de même après 1945.
Mais quid du Japon? Ce pays n’a-t-il pas connu une longue période de stagnation déflationniste et n’a-t-il pas inspiré à Ben Bernanke son fameux discours de 2002 dans lequel il pose les fondements théoriques de ce qui sera appelé plus tard «l’assouplissement quantitatif»?
L’étude de la BRI montre que si l’on prend comme référence le PIB réel par habitant ou par salarié au lieu du seul PIB réel, la performance du Japon en termes de croissance est peu ou prou comparable à celle des Etats-Unis, du moins sur les treize dernières années.
A la lumière de ces résultats, il convient de se demander pourquoi les banques centrales combattent la déflation avec des moyens extrêmes en faisant gonfler leurs bilans dans des proportions considérables. Trois réponses me viennent à l’esprit.
La première est qu’elles ignorent l’existence de l’étude de la BRI ou qu’elles ne sont pas d’accord avec ses conclusions. La deuxième est qu’elles dressent un parallèle entre, d’une part, la crise financière de 2007/2008 et son onde de choc et, d’autre part, l’épisode de la Grande Dépression et qu’elles souhaitent éviter à tout prix de refaire les mêmes choix politiques erronés qu’à l’époque.
Toutefois, dans la mesure où sept ans après la dernière crise, les économies semblent enfin se redresser, il existe une troisième explication: elles veulent éviter les effets de redistribution de la déflation.
Comme je l’ai évoqué plus haut, la déflation pénalise les débiteurs tout en bénéficiant, dans un premier temps, aux créanciers. Je dis bien «dans un premier temps» car lorsqu’un débiteur fait défaut, ses créanciers essuient la perte.
Les Etats font partie des acteurs les plus endettés, d’où leur penchant naturel pour l’inflation. C’est aussi la raison pour laquelle les banques centrales sont «indépendantes» des gouvernements.
Mais, d’un autre côté, les banques centrales font partie du gouvernement et la lutte contre la déflation, sous le prétexte qu’elle nuit à la croissance, a pour effet secondaire bénéfique de maintenir à flot des gouvernements endettés. Vous avez dit «conflit d’intérêt»?    

Une réflexion sur “La menace de déflation, alibi de votre spoliation.

Laisser un commentaire