Editorial : ce n’est pas en arrosant les terrains de golf que l’on fait pousser les légumes des jardins ouvriers

Article Bruno Bertez du 19 février 2016

La crise que nous traversons n’est pas différente de celle des années 30.

.C’est une crise de surproduction, d’insuffisance de la demande, crise du chômage, crise de l’excès de dettes, etc., etc. Si la similitude avec la situation des années 30 n’est pas claire pour le public, c’est parce que l’on a changé les noms, les désignations. On a tordu le vocabulaire. La crise de surproduction est occultée par l’usage idéologique de son homologue pêché dans la mare gribouillesque du docteur Diafoirus, on l’appelle « insuffisance de hausse des prix », « pression déflationniste ».

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De cette façon, le public ne fait pas le lien avec la réalité qu’il côtoie chaque jour, réalité du chômage, de la destruction de son épargne et du retour en arrière sur les gains acquis dans le passé. On le plonge dans une abstraction pseudo-scientifique, afin qu’il soit incapable de faire la liaison entre ce qu’il voit, son expérience, et ce que ‘on verbalise, ce que l’on met en mots. Il faut disjoindre, empêcher de nommer, afin de tromper.

Inflation/Deflation

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Si la hausse des prix est insuffisante, si les prix ont tendance à baisser, c’est parce que l’offre est supérieure à la demande, c’est donc, en langage clair, parce qu’il y a surproduction, et ceci explique que l’on mette les usines et les travailleurs au chômage, au rebut. Cette chose magique que l’on appelle « déflation » n’est rien d’autre que cela, une crise de surproduction.

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On a investi n’importe comment, on a fait n’importe quoi, à la faveur des taux d’intérêts ultra bas, attiré par l’exploitation d’une main d’œuvre bon marché et par des marges de rentabilité supérieures à celles que l’on pouvait obtenir dans les vieux pays. Progrès technologique, crédit gratuit, mondialisation et cynisme à courte vue se sont complétés pour créer plus de capacités productives que la demande ne pouvait absorber. Innovation, productivité, argent bradé, voire donné, prix du travail serré au plus juste par la mise en concurrence féroce des travailleurs, tout cela a contribué à la formation d’un « slack », le « slack », c’est le nom que les Diafoirus donnent à l’excès des capacités de production en regard de la demande solvable. Le « slack », retenez bien, c’est l’ennemi.

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En régime économique normal, gouverné par les règles du marché non faussé, le progrès efface ses traces en marchant: les capacités de production nouvelles plus efficaces supplantent les installations anciennes et le capital que ces installations représentent est dévalorisé, détruit. C’est la destruction de ce qui est périmé par le progrès et il n’y a rien à redire, c’est normal, c’est la loi de la vie, le neuf remplace le vieux, ce qui est plus adapté remplace ce qui l’est moins. Mais si, politiquement, vous vous opposez aux destructions parce que les capitalistes concernés sont vos copains et si la Banque Centrale fournit des crédits gratuits même aux capitalistes inefficaces, alors les destructions n’ont pas lieu, le vieux est maintenu en vie artificiellement. Les installations anciennes coexistent avec les nouvelles et forcément un excédent se forme, un « slack » se constitue. Ce n’est pas la loi du marché qui produit le « slack », c’est son inverse, le fait que l’on s’oppose au jeu des marchés par la politique des copains et des coquins et par le crédit surabondant ; c’est le fait que l’on veut bien l’innovation et le progrès, mais on refuse la destruction, la mort de ce qui est obsolète, périmé. C’est la conséquence d’un non-fonctionnement du marché et la conséquence du caractère corporatiste, malthusien, du jeu politique. Le crédit bradé, la monnaie surabondante et les liaisons entre les politiciens et les milieux d’affaires sont au cœur de la crise. Ils ont laissé en vie des entreprises qui devaient fermer et s’accumuler une masse de dettes improductives qui paralyse et asphyxie l’activité.

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Tout ceci a deux aspects inséparables. Le premier est ce que l’on voit, les usines qui ferment, les hommes mis au rencart, les déclassements, les chutes de niveau de vie et le second, c’est ce que l’on ne voit pas, la croissance des passifs, des dettes, des promesses que l’on ne peut tenir et le maintien économiquement abusif des droits du capital. L’actif, c’est ce que l’on voit, le passif, c’est ce que l’on doit. Et dans un système en crise, la crise est crise de ce bilan, crise de la balance entre l’actif et le passif. On a promis: on doit plus que l’on ne peut assumer; on a laissé se gonfler des créances, des capitaux que l’on ne peut honorer, c’est à dire que l’on ne peut leur procurer la rentabilité et les remboursements promis. On confère des droits à prélever que les revenus et les cash-flows ne permettent plus d’honorer.

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Lors de la survenue de la phase aigue de la crise, en 2008, on a réagi en masquant l’écart entre ce qui était promis et ce qui pouvait être honoré par la création de monnaie, par la substitution des gouvernements et des Banques Centrales aux agents économiques en perdition et, ensuite, on a tenté de fuir en gonflant, en augmentant le crédit lui-même. On a créé une masse colossale de nouvelles dettes et on a soufflé dans le prix, on a inflaté les cours de Bourse. Pendant 7 ans! Créer une nouvelle masse de dettes, c’est créer encore plus de droits et de promesses de remboursement, faire monter les cours de bourse, c’est enfler la fortune de ceux qui ont déjà du capital et qui ont accès au crédit surabondant. Bref, on a fait deux choses, augmenter la fortune des créanciers qui ont permis la croissance de la masse de dettes et augmenter la fortune de ceux qui avaient des actifs boursiers et accès au crédit pour en acheter plus!

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C’est à dire que l’on a traité le problème de la crise en rendant le sommet, les élites, les 1%, les ploutocrates, les kleptocrates, bien plus riches qu’ils ne l’étaient avant. On a augmenté le besoin de rentabilité et de prélèvement sur les masses, on a alourdi le poids que la base devait supporter! Et pour la masse, on a imposé ce que l’on appelle l’austérité. Bref, on a augmenté la charge que l’âne devait porter en diminuant la quantité de foin à laquelle il avait droit.

Le problème est que l’on marche sur la tête et que marcher sur la tête, cela ne peut durer longtemps. L’origine de la surproduction, l’origine de la tendance à la déflation, l’origine du « slack », c’est le fait que les masses n’achètent pas assez. Ce sont elles qui font doublement tourner la machine économique: 1) elles produisent, elles travaillent, mais aussi 2) elles achètent, elles consomment, elles font rouler la bicyclette. Et la surproduction, en tant que phénomène économique, prend naissance au niveau de la masse, au niveau de la base, au niveau des 99%.

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On voit l’aberration de la politique suivie par les Gribouille qui nous gouvernent, politiciens et banquiers, ils augmentant la masse de capital (actions et dettes) dans le système, ils produisent une bulle gigantesque de droits à prélever, de capital et, en même temps, ils contractent ou tentent de contracter les ressources, les revenus, les pouvoirs d’achat de ceux qui font tourner la machine, de ceux qui tournent la roue qui permet d’extraire les cash-flows et le profit dont le capital a besoin pour se maintenir en vie!

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La déflation, la surproduction, le « slack » se forment à la base de l’économie et ce n’est pas en enrichissant la tête, le sommet, les 1%, que vous résoudrez les problèmes. Les QE, les taux zéro, les effets de richesse que vous essayez de créer au sommet ne concernent pas la base, ils n’allègent pas le fardeau, au contraire. Essayer de stimuler l’inflation, de stimuler la demande en donnant de l’argent à ceux qui en ont déjà trop et qui ne peuvent en gaspiller plus est une colossale erreur intellectuelle.

Foot prints interrupt cracks in the dried mud of the lake bed of what was Lake Meredith in the Texas Panhandle.  Tuesday, August 6, 2013.

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L’insuffisance de dépenses de la base est la cause de la situation de crise et ce n’est pas en donnant plus de pouvoir d’achat au sommet qui n’en a pas besoin que vous sortirez de la crise, vous ne ferez que la renforcer! Faire des bulles de richesse pour les ultra riches ne donne rien aux pauvres et, à partir d’un certain stade, la fable des abeilles de Mandeville est déplacée, elle ne traduit plus le fonctionnement du système. La crise prend naissance dans la rue, dans les rues, dans Main Street et ce n’est pas en arrosant Wall Street que vous ferez pousser les Green Shoots dans Main Street. Arroser les terrains de golf ne fait pas pousser les légumes des jardins ouvriers. C’est le bas, ce sont les gens d’en bas qui font la vélocité de la monnaie, ce sont eux qui la font tourner, ce ne sont pas les 1%. Ce ne sont pas les chevaux ou les Ferrari des Princes qui font que l’économie tourne vite ou pas, ce sont les ânes du peuple.

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Les QE, les taux zéro, les politiques monétaires, les effets de richesse ne jouent qu’à la marge, une marge infime et, avant même qu’ils ne soient mis en œuvre, ils étaient condamnés. Pourquoi? Parce déjà avant, la base, le peuple, était trop endetté en regard de ses possibilités de remboursement, trop endetté en regard de ses revenus disponibles. Et ce, avant même que l’on ne commence à l’appauvrir encore plus par ce que l’on fait maintenant: la destruction de ses retraites.

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Ce que nous expliquons en termes de l’homme de la rue est pointé par Steve Keen en langage d’économiste: les politiques comme les QE sont insensées, elles prétendent résoudre la crise en inflatant les prix des assets, alors que ces prix excessifs des assets constituent le symptôme même de la bulle qui a provoqué la crise.
“Rather than effective remedies, we’ve had inane policies like QE, which purport to solve the crisis by inflating asset prices when inflated asset prices were one of the symptoms of the bubble that caused the crisis. We’ve seen Central Banks pump up private bank reserves in the belief that this will encourage more bank lending when (a) there’s too much bank debt already and (b) banks physically can’t lend out reserves.”

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On ne peut continuer à rechercher un effet de richesse , un enrichissement des riches, en plongeant le peuple encore plus dans la servitude de la dette, c’est pourtant ce que va encore tenter de faire Draghi dans une ou deux semaines.

7 réflexions sur “Editorial : ce n’est pas en arrosant les terrains de golf que l’on fait pousser les légumes des jardins ouvriers

  1. Ce qui me fascine, c’est ce génie qui consiste à exploiter et appauvrir le peuple tout en évitant soigneusement sa révolte. Ce que vous décrivez devrait révolter ( au sens étymologique du terme ) ceux mis en servitude comme vous dites. Or il n’en est rien.
    Dany Robert Dufour pose une hypothèse ( http://www.amazon.fr/La-Cité-perverse-Libéralisme-pornographie/dp/2207261204) : les miettes de jouissance du peuple suffisent à le faire tenir tranquille. Les miettes qui tombent du festin financier depuis 40 ans et nous repaissent, font de nous des complices du système « à notre insu » comme disait Richard Virenque. Illusion de jouir nous aussi, comme Eux. Quand Eux « baisent » des Top modèles, nous sommes trop heureux de nous masturber devant de la pornographie, en nous imaginant à leur place. A eux « les 120 jours de Sodome », à nous « l’île de la tentation ». J’ai pris volontairement cet exemple trivial, j’aurais pu en choisir un autre, mais ces gens-là connaissent Freud, et nos perversions. En tout genre. Y compris lorsqu’il s’agit d’argent ( aides sociales et petits saupoudrages qui nous font tenir tranquilles, à eux les 1%…)
    Un jour je suis sûr que vous développerez ce thème. Il est à mon avis central dans leur technique de manipulation des peuples. Et diablement efficace. Jusqu’à quand ?

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    1. J’apprécie votre remarque parce qu’elle touche au coeur de ma problématique .

      Mon interrogation, celle autour de laquelle je tourne est la votre: comment se fait il que cela marche? Comment se fait il que les gens ne se révoltent pas?

      Avant je répondais la chose suivante: le mensonge réussit aussi bien , c’est parce que le menteur donne aux gens la « vérité » qu’ils ont envie d’entendre. Le mensonge proféré correspond à un désir d’être trompé. La vérité vous place devant votre manque, vos insuffisances, votre lâcheté d’accepter pareille sous-vie. C’est une interprétation spiritualiste, presque psychanalytique qui se fonde sur un constat que je fais souvent: au fond les gens n’en veulent rien savoir de ce qui les dérange et met en danger leur confort douillet. Ils prefèrent les chaines du mensonge aux vertiges de la vérité. Autrement dit la production de mensonges et de mystifications répond à une demande d’être trompé et mystifié. Le pouvoir politique, vu sous cet angle est le successeur du pouvoir religieux.

      Cette explication est insuffisante quand il s’agit de s’interroger sur les périodes spéciales comme la période actuelle caractérisée par la crise. Là il faut des interprétations plus « hard », plus « ancrées » dans le matériel, dans la production et le rapport des forces sociales; et le spiritualisme est insuffisant .

      J’évolue vers cette idée suggérée par Michel Clouscard que le système actuel produit la société civile. La société civile n’est plus une donnée extérieure au système , elle est produite par le système. Le système est producteur de signes, de besoins, de désirs, de théories, de fantasmes, d’idéologies , d’un ordre politique. Bref il est producteur d’une névrose sociale. Et je le répète souvent, le système produit une névrose, une aliénation, l’homme devient étranger à lui même par sa prise dans le système. C’est une hypothèse terrible car elle debouche sur cette idée que nous sommes de moins en moins exploités par les rapports de travail, mais de plus en plus par le rapport au monde. Ils , le grand « ILS » faussent notre rapport au monde! Cela ne leur a pas suffi de fausser, de dénaturer le rapport à notre activité première, le travail, ils ont faussé tout le reste. L’exploitation et ses mensonges et mystifications, ses vesssies pour des lanternes, sont devenues envahissants. Envahissants au sens que l’on donne à ce terme lorsqu’on l’emploie pour les autistes.

      De ceci témoignent de nombreuses évidences comme le role de l’école de la soi disant république mais en réalité celle de la sociale démocratie, comme les médias , comme l’art lequel montre bien l’effet destructurant de ce système: il ne veut plus rien dire, il a abandonné le sens. Il se donne comme pure subjectivité sans référence extérieure autre que sa cotation, son prix , sur un catalogue ou dans une vente publique.

      L’idée est que cette névrose nous fait marcher à coté de nos pompes, nous fait prendre les ombres pour le réel. Et ceci rejoint votre suggestion sur la masturbation devant les films pornos pendant qu’ils se tapent des stars. Vous consommez les signes manipulés qui vous sont offerts, l’élite a le privilège, encore , pour peu de temps car elle pourrit elle aussi dans cette aliémation , elle a le privilège de jouir encore un peu du réel. Un peu , pas trop.

      L’élite mange du vrai boudin blanc acheté chez Hédiard, vous, bouffez de la merde étiquetée boudin blanc par Aldi ou Carrefour.

      Pour moi, j’en suis rendu au point ou je considère que le système et ses gestionnaires qui croient en être les maitres, a évolué vers l’abstraction , il produit l’abstrait, la symbolique , les signes, puis il les disjoint de la réalité, les manipule dans le sens qui convient à sa reproduction et vous, vous consommez ces signes, vous etes traversés par eux, ils vous deviennent constitutifs.

      Pour revenir au spiritualisme de Lacan par exemple, vous êtes structuré comme un « langage » et le « langage » qui vous structure est produit par le système. Le Maître remplace le symbolique. L’imaginaire des Maîtres supplante, tient lieu de vérité.

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  2. Nous lisons vos textes parce qu’ils nous aident à voir le monde différemment et je pense que les personnes qui sont ici voient bien que c’est excellent.

    Néanmoins, permettez-moi de soumettre une objection à votre texte.
    Et si en fait il le seul but était de continuer à gonfler la masse monétaire ( pas le temps de trouver une solution, bien sûr), mais pour maintenir un peu plus longtemps le système. D’où la guerre au cash et les politiques de taux d’intérêts négatifs.

    ?

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    1. Bien sur qu’il s’agit de gonfler la masse monétaire!
      Mais ceci n’ aucun rapport avec l’analyse concrète que je fais.

      Ou alors il faut pousser cette analyse sur un plan technique et aborder la question de la vélocité de la monnaie.

      Plus on inflate la masse monétaire et plus la vitesse de circulation ralentit. Ce qui s’explique par le fait que l’argent est distribué à des agents économiques qui le stockent et non à des agents économiques qui le dépensent. La propension à dépenser des classes populaires et moyennes est bien plus élevée que la propension à dépenser des ultra riches!

      Ceci est une autre façon , plus abstraite, de présenter mon analyse.

      Vous ne présentez pas une objection, au contraire.

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  3. Superbe synthèse. Parfois votre prose est un peu trop « exaltée » si j’ose dire, voire difficile à lire.

    Mais là, non.

    C’est sobre, hyper clair, carré.

    C’est même je pense le papier définitif pour expliquer la « crise ».

    Bref, vous pouvez arrêter d’écrire maintenant. 😉

    A bookmarker et à envoyer à tout le monde.

    merci.

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    1. Vous connaissez ma réponse lorsqu’on me fait remarquer qu’il y a une barrière à l’accès de mes textes: « si vous m’avez compris, c’est que je me suis mal exprimé ». Je suis un admirateur de Lacan. La lecture c’est un travail.

      Mes textes ne sont pas d’accès facile, mais reconnaissez que j’essaie de dire à peu près simplement ce qui n’est jamais dit. Je montre une autre logique.

      La personne qui investit dasn ces textes, qui fait l’effort de lire et non pas de consommer de la lecture rapide, cette personne, si en plus elle cherche des références et des éclaircissements finit par avoir une idée plus claire de ce qui se passe dans le monde.

      Je me méfie de la simplicité, du recours aux évidences qui caratérise la communication moderne.

      Ce qui se conçoit bien quand on a des outils, un bagage théorique, une culture historique et une mémoire de l’actualité , ne se transmet pas forcément bien, en tous cas pas facilement. Ceci est le premier point.

      Le second point est que je n’ai pas pour objectif la diffusion, au contraire. Je recherche la « rareté » qui seule valorise. La diffusion déprécie.

      Le troisième point est que mon projet d’écriture n’est pas de vous donner des poissons (des idées) mais de vous apprendre à pêcher , à vous former votre jugement. Je me fiche de convaincre.

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  4. Et la grande distribution pour assassiner un peu plus le peuple a augmenté ses marges sur le bas de gamme, malicieuse et afin que le peuple ne le remarque pas, elle a réduit le poids des conditionnements, comme ce monde est merveilleux, comme il est doux de voir d’un côté les petits exploitants agricoles mourir et de l’autre la dinde s’afficher à 14.92 euros du kilo chez les mousquetaires de l’arnaque…mieux encore les bas morceaux à 6.90 du kilo, qui dit mieux ???

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