La fin de l’importante divergence

La fin de l’importante divergence

lundi, 02.05.2016   Agefi Suisse

L’évolution médiocre de la conjoncture a fait oublier ce que l’on considérait comme essentiel en 2014: la situation des USA opposée aux reste du monde.

Bruno Bertez

La croissance de l’économie américaine est tombée au premier trimestre à son plus bas niveau depuis deux ans avec la baisse de la consommation des ménages et l’impact défavorable de l’appréciation du dollar sur les exportations, montrent les statistiques publiées jeudi, mais elle devrait remonter rapidement grâce à la bonne santé du marché du travail.

Voici donc ce qu’écrivent les Agences. Elles négligent le fait que l’emploi est un «indicateur retard», c’est à dire que l’on embauche après avoir constaté l’activité justifiant l’embauche. Avant les récessions, les chiffres des inscriptions au chômage atteignent presque toujours des records … de baisse. Et Yellen le sait, elle qui souligne le ralentissement dans le dernier «press release» de la Fed et qui repousse sans cesse la normalisation monétaire. L’économie, ce n’est pas la juxtaposition des nouvelles et les amalgames, nous ne sommes pas en politique; l’économie c’est une articulation causale et temporelle. L’activité produit les embauches et non l’inverse.

Le PIB aux Etats-Unis a progressé de 0,5% seulement en rythme annualisé, le chiffre le plus faible enregistré depuis le premier trimestre 2014, selon la première estimation du département du Travail. Les statistiques mettent en évidence  l’impact négatif de l’effort continu de réduction des stocks des entreprises.

La première économie mondiale a en outre continué de souffrir de la baisse des prix du pétrole, qui a contribué à la baisse de 5,9% de l’investissement des entreprises, la plus marquée depuis le deuxième trimestre 2009, lorsque l’économie était en récession.

En revanche, malgré les attentes et commentaires, la baisse des prix de l’énergie n’a pas agi comme un rabais fiscal, elle n’a pas stimulé la consommation. Cette dernière reste «quasi structurellement» atone depuis le début de 2012 …  faute de revenus disponible pour l’alimenter. Nous ne sommes même plus dans le New Normal de la croissance modérée, nous sommes dans la croissance faible.

Les économistes interrogés par Reuters prévoyaient en moyenne une croissance de 0,7% en rythme annualisé après celle de 1,4% du dernier trimestre 2015.

La consommation des ménages, ex-principal moteur de l’économie américaine, a augmenté de 1,9% en données annualisées sur janvier-mars, sa plus faible progression depuis le premier trimestre de l’an dernier, après +2,4% sur octobre-décembre.

L’économie américaine ralentit, c’est une évidence que l’on constate malgré et au travers des statistiques erratiques. La tendance est là. C’est la même chose pour l’économie mondiale dans son ensemble

La question qui se pose, au lendemain d’une nouvelle réunion du FOMC «immobiliste», est de savoir si une hausse sera possible au cours des prochains mois, alors que l’élection de novembre se profile à l’horizon.

La fenêtre d’action pour la Réserve fédérale est de plus en plus étroite. Le fait que ces derniers jours la banque centrale ait reconnu elle même le glissement négatif de la croissance prépare peut être le terrain à une abstention totale.

Pour l’instant on s’en tient au programme révisé de deux hausses de taux cette année et si on accorde foi aux déclarations de Yellen, les décisions ne devraient plus être influencées par les turbulences financières mondiales puisqu’elle même semble considérer qu’elles sont maitrisées. Est-ce que l’évolution de la conjoncture au cours des mois d’été permettra un pas vers la normalisation? Pour notre part nous sommes sceptiques. Il faudrait un miracle, sur les tendances actuelles pour que Yellen puisse recommencer à préparer une hausse des taux car n’oublions pas  qu’elle se doit d’annoncer la couleur, les fameuses guidances, pour ne pas surprendre les marchés.

L’évolution médiocre de la conjoncture a fait oublier ce que l’on considérait comme essentiel en 2014: la divergence de situation entre les USA et le reste du monde. La Fed était censée régulariser, normaliser sa politique monétaire et resserrer son dispositif grâce à une activité satisfaisante. En revanche, le reste du monde, les grands blocs étaient engagés dans de nouveaux rounds de stimulation à l’image du Japon, de l’Union européenne et de la Chine. Dans cette perspective, les marchés étaient «longs» en dollars, et «shorts» tout le reste. Le dollar index a commencé à grimper à la mi-2014 et c’est à partir de cette date que l’on a assisté aux premières perturbations financières, la tendance au riks-on s’est brisée.

La Fed a tenté de monter les taux en septembre, mais cette perspective a fait tanguer les marchés en un mini krach et Yellen a du renoncer. Elle a tenté de renouer avec sa crédibilité émoussée par une hausse en décembre. Les marchés ont menacé de se disloquer en janvier. La hausse du dollar a provoqué des craquements sur les périphéries, sur les matières premières, sur les émergents, en Chine et mis à mal le «dollar funding» des grandes Banques et des grandes Corporate. A L’apogée des craquements on a craint une poussée d’instabilité financière. Ce qui a déterminé des interventions concertées et certainement une sorte d’accord plus ou moins formel entre les banquiers centraux à Shanghai. On en saura peut être plus un jour sur le contenu  de ces accords.

Une chose nous semble sure, la conjoncture américaine n’est pas un facteur déterminant, c’est un habillage  qui permet, qui donne alibi pour différer la normalisation monétaire.

Tout banquier central sait maintenant qu’une hausse du dollar et à sa raréfaction peuvent provoquer un choc systémique. Et personne n’a envie d’en prendre le risque. La marche arrière de Yellen a laissé des traces, on sait maintenant qu’il est quasi impossible de sortir des politiques de stimulations, c’est le grand enseignement de ces derniers mois et c’est d’ailleurs ce qui justifie la recherche de solutions alternatives.

On s’est enfin rendu compte que le niveau des actifs financiers ne résisterait pas à un arrêt des mesures non-conventionnelles, on s’est rendu compte que le monétaire donnait peu de résultat finalement et depuis, on explore, on lance des ballons d’essai et on débat.

L’objectif n’est même plus de lutter contre la déflation, ou autres billevesées, l’objectif est d’éviter la révulsion, de faire en sorte que l’on puisse mettre un parachute au dessous du «mark to fantasy» financier universel. Tout le monde connait maintenant le risque pour l’avoir constaté en août 2015 puis en janvier/février 2016.

Notre hypothèse est que l’on ne va pas essayer de tenter le diable en reproduisant la divergence qui a failli nous emporter; on ne va pas mettre le feu aux poudres des mouvements de capitaux que l’on a eu tant de mal à maîtriser ces derniers mois. Le panneau «danger» est planté bien en vue pour tout le monde. Fin de la divergence.n





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