Le peuple a souvent le sentiment que la réprésentation démocratique est biaisée. Il sent confusément que les règles du jeu sont faussées et qu’elles se retournent contre lui. Quand on veut lui imposer une mesure ou une orientation qu’il récuse, on lui oppose le fameux : « vous avez voté « pour », il faut vous soumettre ».
Camus disait qu’une démocratie authentique se reconnait à sa capacité à respecter les minorités. Ce temps est dépassé, nous sommes dans le cynisme arithmétique. La règle majoritaire est tordue, détournée, elle permet de constituer des majorités de circonstances, collections de minorités de défense d’intérêts particuliers comme celle dont a bénéficié Hollande en 2012 grâce aux minorités déviantes, au LGBT, aux musulmans etc. En fait la règle majoritaire n’a de sens que sur la base de l’intérêt général. quand il s’agit de la sommes d’intérêts corporstistes, elle n’a aucune légitimité.
Le peuple, les citoyens, les individus ont compris cela et c’est la raison pour laquelle, chacun l’ayant compris sans l’avouer, on tolère que face à des propositions politiquement majoritaires, des oppositions se lèvent. Malgré les Assemblées, malgré l’Exécutif, les manifestations, la violence dans les rues, les pétitions réussisent à s’opposer victorieusement aux coups de force des soi disant majorités. Il suffit pour s’en persuader de se souvenir des grands combats de rue, sur l’école, sur les retraites, sur les portiques chers à Ségolène etc. on ajoutera également dans ces combats, l’importance du rôle joué par les sondages, ils constituent une composante de ce que l’on peut appeler les rapports de force en faveur des élites. Notez bien « rapports de force ».
Tout ceci pour dire que nos sociétés tout étant fondées sur un état de droit reconnaissaient dans la pratique la notion de rapports de forces. Et nous dirons même que ceci est déterminant de la position politique des candidats aux élections. Ainsi juppé, face à Fillon fait valoir que Fillon est trop brutal, trop radical et qu’il ne pourra réaliser son programme car la rue s’opposera à sa mise en oeuvre.
L’hypocrisie trouve ses limites, on se prétend un état de droit, mais on argue des rapports de force dans la rue. Dans la rue, cela signifie en grande partie dans les médias, car se sont les médias, dans ce monde ou les solidarités sont pulvérisées et fracassés, ce sont les médias qui produisent les mobilisations. L’exemple de l’élection de Trump vient immédiatement à l’esprit pour souligner l’importance des médias à la fois pour lutter contre le (dés)ordre établi par les élites, mais aussi pour imposer une autre vision non conventionnelle, voire dans certains cas rebelle.
La situation, contrairement au bon sens n’est pas symétrique. Je m’explique. Les médias puissants sont controlés, partout par l’establishment, je ne connais aucune exception. Le découpage droite/gauche est une mystification et l’apparence de pluralisme a maintenant été clairement démontée. Nous sommes dans le bonnet blanc/ blanc bonnet aussi bien au plan des formations politiques qu’au plan des outils de propagande de l’establishment. Le reste est rejeté hors du jeu politique et médiatique comme extrème ou fasciste ou primaire ou ringard. Tout ce que vous pouvez imaginer de dévalorisant constitue un qualificatif adapté.
L’un des enjeux du combat contre les élites est la liberté de parole, le rétablissement de la symétrie. Il faut sortir de l’ancien débat sur le pluralisme car c’est un instrument de domination. Le pluralisme est bidon dès lors qu’il est dans les mains des mêmes couches sociales; Bouygues ou Drahi, quelle importance? Dans les mains des même propriétaires et tiers payants publicitaires. Le pluralisme cela ne consiste pas à autoriser_-rien que le mot autoriser est liberticide- les opinions différentes et à les organiser, non cela consiste à laisser parler des sources, de gens des intérêts différents voire opposés? L’important n’est pas le contenu des messages, non l’important c’est qui parle. L’identité du locuteur.
Nous en sommes au point ou ce phénomène est perçu et utilisé. Ainsi aux USA sitôt l’élection de Trump, les médias MSM ont à l’unanimité sauté sur l’occasion de dénigrer les médias populaires, populistes, les médias sociaux, ceux d’en bas. Le débat sur les « fake news » bat son plein. Ce fut la même chose à l’occasion du Brexit.
En France cette semaine Juppé, candidat de l’establishment a repris l’argument des « fake news », clairement, de façon identifiée, puisqu’il a accusé « Riposte Laique » de colporter des fausses informations et des mensonges.
Je vois poindre comme une offensive concertée, mondiale contre les médias non alignés. Précurseur, le penseur de l’impérialisme, Zbig Brzezinski a, il a quelques années donné une conférence remarquable, attirant l’attention des élites sur ce phénomène de basculement de l’information du haut vers le bas. C’était avant les printemps arabes.
Les élites n’avaient pas accordé d’attention à Zbig, elles ont maintenant compris qu’il avait raison. Les mesures subreptices de censure, d’encadrement favorisant l’autocensure, se multiplient, dispersées, mais convergentes en diable. Elles sont arbitraires puisque laissées à la discrétion des propriétaires de supports. Cependant elles font l’objet de concertations sérieuses et de guidelines de bonne conduite ou si on veut de bonne censure.
Savez vous qu’en Grande Bretagne les autorités quasi sans motif, et sans contrôle ont le droit de consulter toute votre activité sur Internet. Je dis bien « toute »! C’est un intrument de chantage, de fichage, de pression, de répression, et de domination sans pareil. Une classe sociale et ses alliés s’est accordé ce droit! C’est un instrument de terreur, comme si un jour quelqu’un se donnait le droit de pénétrer dans votre tête, car ce que vous faites sur internet est du même ordre, c’est de l’ordre la vie intime. Vous projetez dans internet en fait ce que vous avez dans votre cerveau, vos pensées les plus secrètes, vos désirs, votre personnalité.
L’action des médias non conventionnels, des médias d’en bas est très semblable à celle des manifestations populaires. Cette action constitue un soulèvement. Elle est révolutionnaire. Mais les armes de la révolution sont … entre les mains de vos ennemis! En avez vous conscience? Vous compteez sur leur bonne foi, sur leur respect? Moi je compte sur leur cynisme.Et sur la lacheté de la populace.
De la même façon que pour lutter contre les manifestations de rue , les Pasqua et autres Cazeneuve ont organisé les débordements par les bandes de casseurs qui brisent la légitimité des manifs, ils organisent les excès d’internet, les violations à la vérité et au respect. Les débordements de casseurs permettent de limiter l’influence de la rue, les débordements de l’internet permettent déja d’attaquer sa crédibilité et son utilité sociale.
Les armes du système sont sans cesse complétées, renouvelées et face à la menace de la parole venue d’en bas, la riposte s’organise.
En Prime, ce texte écrit en 2014
En 1830 La Charte a accordé la liberté d’opinion aux Français. Enfin. N’importe qui avait le droit de publier son opinion. Hélas, pour publier une feuille, il fallait consigner 100 000 francs auprès du Trésor. Si vous ajoutez le coût de confection d’une feuille, la distribution etc… vous arrivez à une mise minimum de 200 000 francs. Inutile de dire que seuls les Pereire, les Rothschild, les Delessert pouvaient publier une feuille, stipendier des journalistes et ainsi manipuler le Pouvoir et l’Opinion.
Inutile de dire que c’est ce qu’ils ont fait avec les journaux ou prétendus journaux comme « Le Globe » ou le « Journal des Débats» Ces journaux n’ont été que des instruments pour enrichir leurs propriétaires financiers et marchands, par les emprunts publics, les monopoles des transports, les canaux, les intrigues de politique étrangère, et autres campagnes plus ou moins scélérates.
De nos jours, rien n’a changé. Vous avez les Bouygues, les Dassault, les LGBT, les financiers cachés derrière Libé, bref les puissances d’argent et les marchands qui contrôlent la presse. Un jour je raconterai mon histoire, j’ai été le seul à tenter et à réussir, pendant quelque temps, à arracher la presse financière et économique au CNPF. Fin de digression.
L’art de tout détruire en deux jours
De chaque côté de l’Atlantique, une grave décision a été prise les semaines passées concernant le Web
Deux dates: 13 mai 2014, 15 mai 2014. Ces deux jours marqueront à coup sûr l’histoire d’Internet. Et de la manière la plus sombre qui soit. En quelques heures, via deux décisions majeures, l’Europe et les Etats-Unis viennent de poser les bases d’un déséquilibre majeur d’Internet.
La première décision partait d’une intention louable. La Cour européenne de justice estimait, dans un arrêt rendu à propos de Google, que les moteurs de recherche devraient, sur requête d’internautes, effacer des liens leur portant atteinte. Le référencement d’une page vous déplaît? Un e-mail à Google ou Microsoft et l’occurrence disparaît. Séduisant en apparence, ce principe ouvre la porte à toutes les dérives imaginables. Avec, à la clé, un risque réel de réécriture de l’histoire – sans parler d’une mise en pratique cauchemardesque.
Ensuite, c’est à Washington que s’est joué un autre acte dramatique. Le régulateur américain des télécoms, la FCC, a fait avancer son projet de loi autorisant des opérateurs télécoms à favoriser des services tiers, en leur donnant un accès prioritaire sur leur ligne, contre paiement. Un coup très dur au principe de la neutralité d’Internet, qui risque de tuer l’innovation en asphyxiant les start-up et en créant une ségrégation insupportable.
Fait intéressant, Bruxelles et Washington sont en désaccord total sur ces deux décisions. Mais ces dissensions ne seront sans doute pas suffisantes pour que ces règles funestes ne s’appliquent de chaque côté de l’Atlantique.
PAR ANOUCH SEYDTAGHIA /Le Temps
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/c76fb628-deb2-11e3-bf49-e55884b592d3/Lart_de_tout_d%C3%A9truire_en_deux_jours
Si « les marchands » «ils » n’ont aucun pouvoir apparent dans la rédaction ils ont le pouvoir réel par le biais de la pub, du recrutement, des promotions, du carnet d’adresse etc… Le pouvoir des marchands et des banquiers sur la presse est devenu « soft », il n’en est pas moins, je pèse mes mots, total. Dans la presse actuelle seuls les médiocres bien dociles parviennent au sommet. Les journalistes sont des laquais. Sans espoir d’être un jour des hommes libres car le comble est qu’ils n’ont pas conscience de leur rôle de larbin et de femmes de ménages des pouvoirs dominants. Leur docilité est culturelle, systémique, « embedded » comme on dit en anglais.
La clef d’un monde bottom-up, c’est à dire ou c’est le peuple qui est souverain c’est l’argent. Mais le peuple, l’argent c’est son point faible. Il n’aime pas payer; Il aime les cadeaux, le gratuit.
C’est avec l’argent que l’on fait donc dire au peuple tout ce que l’on veut qu’il dise et surtout pense; tout ce qui est utile au maintien de la servitude; on lui fait aimer ses chaines. C’est la fonction de la presse MSM. Regardez l’évolution par exemple d’Atlantico, devenu média, il a cessé d’être chien fou incontrôlable, il a besoin d’argent.
L’internet coute peu sinon rien et c’est en cela que se situe son caractère irrémédiablement révolutionnaire. Pour publier ses analyses, ses opinions, les faire partager, il faut peu de moyens; l’essentiel peut être consacré au travail, à la réflexion, et à l’étude.
L’internet c’est une bouteille à la mer, certes, avec du bon et du mauvais, mais c’est un médiat, médiat avec un « t », puissant, ouvert, dont le potentiel est infini. C’est pour cela que prolifèrent les tentatives d’atteinte à sa liberté, les tentatives de le faire rentrer dans le rang. L’internet est par construction le contraire de top-down, il est radicalement bottom-up.
Avez-vous remarqué que dans les émissions de la classe jacassante, c’est toujours le dominant, le représentant du Pouvoir qui a le droit de parler en dernier. C’est une règle absolue; pourquoi? Pour avoir comme on dit « le dernier mot ».
Avec Internet, ces gens cessent d’avoir « le dernier mot ».
BRUNO BERTEZ LeVendredi 30 Mai 2014
illustrations et mise en page by THE WOLF