Le gauchisme de Hamon, maladie sénile du communisme

L’aile « droite » du Parti socialiste revendique dans une tribune publiée mardi « un droit de retrait » de la campagne présidentielle, estimant que les conditions de soutien à Benoît Hamon, investi dimanche , ne sont pas réunies.

C’est donc une fin de non recevoir à l’appel au rassemblement lancé dès dimanche par Hamon. Ce dernier, dit « frondeur », en réalité opposant frontal à la  politique de Hollande, Valls et Macron a été désigné candidat officiel sans contestation possible, avec des écarts assez larges pour être significatifs d’un clivage fondamental. Notons le faible taux de participation, il a son importance bien sur.

Ce ne sont pas deux méthodes qui s’affrontent, ou de simples nuances sur la conduite des affaires, non, ce sont deux conceptions radicalement opposées :

-d’un coté une gestion sociale démocrate qui vise à adapter la France  aux exigences internationales et européistes, avec un habillage pseudo idéologique progressiste

-de l’autre, une conception fermement ancrée dans la tradition du socialisme révolutionnaire, dans la lutte des classes, dans la nécessité de dépasser le capitalisme et le marché pour sortir de la crise.

Vous noterez que les protagonistes se sont  bien gardés d’appeler un chat un chat et de mettre  le doigt sur le vrai problème: celui de la règle du jeu social. La vraie opposition est systémique, Valls accepte la règle du jeu imposée par toutes les notions de profit, de marché, d’intégration internationale et européiste tandis que Hamon sans dire qu’il les rejette, fait des propositions qui , pour être réalistes présupposent ce rejet.

La cohérence des propositions de Hamon s’inscrit et se trouve dans un autre système social et économique. Tout comme celle des mesures et propositions de Melenchon et c’est à juste titre que les commentateurs trouveraient  logique un rapprochement entre les deux leaders de ce que l’on peut appeler une première gauche.

La volte face de 2013 de Hollande , nous l’avons écrit en son temps est exactement semblable à celle de Mitterrand  dans les années 83 ; face à la dérive des premiers mois, il a du faire un choix binaire, très simple: ou bien j’abandonne l’idée de l’intégration européenne , ou bien je m’y soumets au risque de faire éclater le parti socialiste . Il a choisi, avec la conséquence que nous voyons ; l’éclatement du parti socialiste. Eclatement d’abord nuancé avec Valls puis clair, avec Macron.

En fait tout cela dépasse les protagonistes: nous sommes dans la Nécessité de l’Histoire, dans l’inéluctable. Ni Hollande, Valls et Macron d’un coté ou Hamon, Aubry et  Melenchon ne choisissent, c’est l’Histoire qui décide. Et c’est presque le hasard des ambitions personnelles qui fait que certains tombent d’un coté et d’autres de l’autre.

On s’étonne du silence de Hollande. Ce silence est pourtant très logique surtout compte tenu de la personnalité de Hollande qui a beaucoup de mal à se comporter en adulte qui fait des choix, : la politique de socialisme dit de l’offre est une politique qui va dans le sens de Macron, donc il devrait le soutenir; mais Macron a eu l’intelligence de ne pas  lier son sort à un PS en bout de course , PS auquel Hollande doit son existence politique .. le problème est insoluble sauf à enfin devenir adulte et choisir une identité, soi même, la sienne.  Sauf à faire faire advenir un authenthique Hollande.

Le mouvement historique vers la globalisation sous la houlette des anglo saxons, le mouvement historique d’intégration européenne, le progrès des techniques et des processus de fabrication, la prégnance de la consommation, la dictature de la modernité, tout cela passe le scalpel dans nos sociétés et fait que les alliances anciennes , les découpages du passé cessent d’être relevants, adaptés à l’expression démocratique.

Bien entendu il y a une période intermédiaire , une phase de confusion dans laquelle les élites cherchent à brouiller les cartes, à tromper, à faire des synthèses artificielles et nous y sommes.

Dans ces périodes,  on peut enfumer, tromper, propagander, faire prendre des vessies pour des lanternes, agiter des « nègres blancs » , faire le grand écart, nier les genres politiques, les classes , faire des diversions, mais peu à peu la conscience politique des citoyens se décante. Nous sommes dans ces processus de transition. Et il n’appartient qu’ à un vrai leader politique crédible, de droite ou de gauche de faire émerger tout cela par un discours fort, honnête, et surtout clair. Ce leader n’existe pas: le système miné , sinon pourri ne permet plus de le faire émerger.

Hamon ne veut pas gérer la crise du capitalisme, ce que Valls, hypocrite n’a pas le courage de souligner! Honte à lui car il aurait fait oeuvre progressiste. Valls a fait une pirouette et ce qu’il oppose c’est « la société de travail » à la « société post-travail » de Hamon. Une distinction idiote , malhonnête , qui ne repose que sur une supercherie, supercherie qui consiste à escamoter le fait que « pour répartir il faut produire », et même de plus en plus puisque l’on distribue du pouvoir d’achat.

La distinction n’est pas entre société du travail et société post-travail, elle est dans les conditions de production; est-ce que l’on produit sous contrainte de profit, sous contrainte de compétitivité, sous contrainte capitaliste ou bien  est-ce que l’on produit « socialement » en fonction d’autres critères, socialistes, humains, humanistes, écologiques. Est ce que l’on produit pour « la marge » ou est ce que l’on produit « pour le tout du produit ». Est ce que l’on produit pour le bénéfice, pour la plus value  ou pour la satisfaction des besoins, voila le grand clivage. Je ne rentre pas dans la discussion des mérites comparés des deux systèmes, je ne fais qu’énoncer le grand clivage. Chacun, pour me lire, sait que je suis pour le capitalisme de production conservateur.

Hamon veut échapper aux lois du capital, à la dictature de la comptabilité, à la  nécessité de faire des profits pour investir et rentabiliser, à l’obligation  d’équilibrer ses comptes, de réduire les déficits, d’honorer  ses dettes et par conséquent même si il ne le dit pas  il présuppose une autre logique. Cette autre logique, Valls a répondu que c’était un rêve, une illusion, une forme de socialisme utopique. Ce qui est extraordinaire, c’est que lors des  débats, les adversaires  se sont bien gardés de mettre le doigt sur le vrai problème de cet utopisme: l’intégration internationale et européiste. Ils se sont bien gardés de mettre le projecteur sur  l’attitude face au profit, de la placer  au centre de leur discussion; pourtant elle est centrale puisque toute la politique de Hollande, celle que Hamon et les frondeurs  récusent, vise à restaurer le taux de  profit par la baisse des charges, par la baisse du pouvoir d’achat des salaires directs et indirects.

Valls aurait pu et du  souligner d’emblée que le programme de Hamon était contraire à tous les traités signés par la France et au traité de Paris en particulier, mais il ne l’a pas fait car visiblement il y a accord au moins tacite au sein de l’ex PS pour continuer d’enfumer sur cette  question pour collecter des suffrages non mérités : la question centrale est celle de l’appartenance de la France à un ensemble qui fixe l’essentiel de ses orientations, face à un ensemble qui impose le taux de profit moyen des capitaux investis  après avoir imposé la libre circulation de ce même capital.

Si nos zozos politiciens avaient réfléchi un peu ils auraient abouti à une découverte essentielle  pour la conscience politique des français:  c’est le monde global qui, en régime de libre circulation des capitaux  , détermine le taux de chômage dans  un ensemble économique ouvert.

La position de Melenchon et ses amis est un peu plus élaborée que celle de Hamon: Hamon n’a pas d’envergure il ne peut aborder les questions internationales, mais Melenchon est en plein dedans. Il place son discours dans la critique de l’Europe et surtout de l’Allemagne, dans  la critique des Grands Traités commerciaux internationaux, dans la critique de l’ordre de la finance. Il essaie de racoler du côté de la sauvegarde de la planète .

La logique des hiérarchies intellectuelles impliquerait que Mélenchon absorbe Hamon dans la mesure ou Hamon est un avatar gauchiste de la pensée communiste – je n’ose dire marxiste-mais cela ne se fera pas car Hamon à ses propres ambitions. Et surtout une clientèle que je qualifierai de « non productive ».

Hamon est ce que l’on peut appeler un gauchiste, son départ du gouvernement est un comportement de gauchiste  pas un comportement de stratège. Il fut un temps ou Lénine disait que le gauchisme était une maladie  infantile du communisme, ce temps est dépassé, le gauchisme  est  devenu une maladie du communisme sénile, vieillissant, incapable de se régénérer.

Héraut de « la vraie gauche », socialiste frondeur sous le gouvernement de Manuel Valls, le vainqueur de la primaire de « la belle alliance populaire », a lancé dès dimanche soir un appel au rassemblement des factions de son parti. Benoît Hamon a également tendu la main aux écologistes et à « la gauche de la gauche » en proposant de construire « une majorité gouvernementale sociale économique et démocratique » face à la droite et l’extrême droite.

« Le rassemblement, c’est le respect de tous associé à des actes, ce ne peut être l’obligation, pour chaque socialiste, de se convertir à la ‘fronde' », écrivent en réponse  les députés Christophe Caresche et Gilles Savary dans les colonnes du Monde, précisant s’exprimer au nom du Pôle des réformateurs du PS.

 

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