La question faut-il réformer le capitalisme est à la mode aux Etats Unis et en Grande Bretagne. J’avoue que les débats sont d’une navrante pauvreté , la médiocrité domine.
Nous sommes loin de la qualité des débats d’antan et en particulier de ceux des années 30. Le fond intellectuel est médiocre, les analyses et les propositions suent la bien pensance à courte vue. Rien qui puisse de près ou de loin s’apparenter à une démarche critique radicale c’est à dire qui va à la racine des choses . On glisse, on surfe sur les apparences sans les comprendre.
La culture étant quasi inexistante, ce qui règne c’est le gros bon sens bourgeois qui se croit plus ou moins progressiste, l’enfilage de perles positivistes, celui qui est inspiré par les évidences trompeuses.
Le débat anglo saxon sur la question « faut il réformer le capitalisme » se situe dans la bouteille, dans la névrose ou si on est méchant, dans l’asile d’alénés.
Ci dessous une traduction condensée et libre d’un texte de Mauldin qui est un penseur plutot bien intentionné, raisonnable et même avec un peu de morale dans le s ecteur de l’investissement aux USA.
Contrairement à ce que disent les populistes de gauche et de droite, les inégalité des revenus et de la richesse, les clivages idéologiques, le populisme ne sont pas dus:
a) à des riches sans scrupules qui font volontairement du mal aux pauvres ou
b) aux pauvres paresseux ou
c) aux inefficiences bureaucratiques,
Elles sont dues au fonctionnement actuel du système capitaliste.
Je crois que toutes les bonnes choses poussées à l’extrême deviennent autodestructrices et que tout doit évoluer ou mourir, et que ce constat s’applique maintenant au capitalisme.
Bien que la recherche du profit soit généralement un facteur de motivation et de répartition des ressources efficace pour l’amélioration de la productivité et pour produire le pouvoir d’achat de ceux qui sont productifs, elle produit maintenant une boucle de rétroaction qui se renforce elle-même et qui élargit les écart de revenu / richesse / opportunités au point que le capitalisme est en péril.
Le capitalisme fonctionne désormais ainsi que les individus et les entreprises considèrent qu’il est juste d’avoir des politiques et des technologies qui réduisent les coûts de main-d’œuvre. Ce qui réduit considérablement la part des salaires dans la valeur ajoutée ou dans les revenus des entreprises. Et ceci augmente symetriquement la part qui revient au capital.
En raison de cette dynamique, le système produit des spirales auto-renforçantes montantes pour les nantis et descendantes pour les non-nantis, ce qui conduit à des excès néfastes au sommet et à des privations néfastes à la base.
Plus spécifiquement, je crois que:
La recherche du profit et d’une plus grande efficacité ont conduit à l’invention de nouvelles technologies qui remplacent les personnes, permettent aux entreprises de fonctionner plus efficacement, récompensant ceux qui les ont inventées et penalisant les personnes qu’elles ont remplacées. Cette force va s’accélérer au cours des prochaines années et aucun plan n’est prévu pour y faire face.
La recherche de profits plus importants et d’une plus grande efficacité des entreprises a également conduit les entreprises à produire dans d’autres pays et à remplacer les travailleurs par des travailleurs étrangers rentables.
Premièrement, je conviens que la technologie et la mondialisation ont clairement un impact sur l’emploi aux États-Unis, mais ce n’est pas une chose récente.
Cela se passe comme cela depuis la première révolution industrielle. À un moment donné, près de 80% de la population était occupée autour d’une activité agricole. Aujourd’hui, c’est moins de 2%. De toute évidence, ce changement a été spectaculaire, mais il s’est également produit sur au moins 10 générations. Il y avait beaucoup de troubles politiques et de répulsion face à ces changements.
La mondialisation a également commencé il y a bien longtemps, avant 1930, et les républicains de cette époque y ont fait face de manière inadéquate en passant les lois Smoot-Hawley et en entamant une guerre commerciale qui conduisit à la Grande Dépression. Ils ont également mal compris et abusé de la politique de la Réserve fédérale.
Comme vous le constatez, le rythme des changements technologiques ne fera qu’accélérer. D’ici 10 à 15 ans, une partie importante, sinon la majorité, des personnes qui gagnent actuellement leur vie en tant que chauffeurs de camions ou de taxis se retrouveront remplacées par des camions et des voitures autonomes.
C’est l’une des nombreuses technologies qui réduira le besoin d’emploi humain direct.
Peu d’industries seront épargnées. Et il ne sert à rien d’essayer d’être le roi Canute et de retenir la marée. Tous les pays qui tentent de préserver «leurs» emplois du changement technologique se retrouveront bientôt à la traîne, luttant pour rester compétitifs alors que le monde avance de plus en plus vite.
L’assouplissement quantitatif et l’argent facile ont tout simplement augmenté les prix des actifs et accru l’inégalité de la richesse et des revenus, mais nous avions besoin de politiques monétaires et budgétaires mieux coordonnées.
Je pense que la politique monétaire mal conduite porte une responsabilité importante, sinon première, dans la disparité financière actuelle , avec le capitalisme de copinage, mais on verra plus ce sujet plus tard…
Depuis Greenspan, nous avons mené plus de 30 ans de politique monétaire de plus en plus souple accompagnée de taux plus bas. Cela a créé une série de bulles d’actifs dont l’éclatement a provoqué des ravages économiques. Des taux artificiellement bas ont créé la bulle immobilière, exacerbée par un échec de la réglementation et renforcée par un système financier en faillite morale .
Et avec un système complètement en feu, nous avons demandé aux incendiaires criminels d’éteindre l’incendie, très peu d’observateurs en ont reconnu l’ironie.
Oui, nous avions effectivement besoin de la Réserve fédérale pour fournir des liquidités lors de la crise initiale. Mais après cela, la Fed a maintenu les taux trop bas pendant trop longtemps, renforçant ainsi les disparités de richesse et de revenus et créant de nouvelles bulles avec lesquelles nous allons devoir composer dans un avenir proche.
Après la crise il n’y a pas eu de «beau désendettement» . Ce fut de la vilaine création de bulles et de la mauvaise affectation du capital. La Fed n’aurait pas dû souffler dans ces bulles en premier lieu.
Le simple principe selon lequel 12 hommes et femmes assis autour de la table peuvent décider du prix le plus important au monde (taux d’intérêt à court terme), mieux que le marché lui-même, commence à être contesté.
Maintenir les taux trop bas pendant trop longtemps dans le cycle actuel a entraîné une mauvaise allocation massive des capitaux. Cela a entraîné la financiarisation d’une partie importante du monde des affaires, aux États-Unis et ailleurs.
Les règles actuelles récompensent désormais les managers d’entreprises , non pas pour générer des revenus par la production de biens et services , mais pour faire monter le prix de leurs action, rendant ainsi les options et les attributions d’actions plus juteuses.
La politique monétaire des banques centrales est le problème, ce n’est pas la solution. Et même si j’ai peu d’espoir de changement à cet égard, je doute que la politique monétaire puisse nous sauver de la prochaine crise.
De plus, cette répression financière qui maintient les taux très en dessous de leur niveau naturel pénalise les épargnants et récompense les emprunteurs. Cela rend la vie particulièrement particulièrement difficile pour ceux qui se situent dans les tranches de revenus inférieures et moyennes, sans parler des retraités. Il est devenu impossible de tirer un revenu de son épargne sans avoir à prendre de risques disproportionnés.
Michael Lewis vient de terminer un podcast en sept parties intitulé Against the Rules. Il commence par parler des arbitres, en particulier des arbitres qui travaillent dur aux matchs de la NBA. Les épisodes suivants concernent les «arbitres» sur les marchés financiers, les tribunaux, la société civile et le gouvernement.
Parce que chaque jeu est maintenant revu et que les arbitres après le match ont la possibilité de voir où ils ont commis des erreurs, le jeu s’est considérablement amélioré. Les arbitres voient maintenant leurs propres préjugés et apprennent à les gérer. Le jeu n’a jamais été jugé avec autant de précision que ces dernières saisons.
La chose intéressante est que les fans ou les joueurs n’ont pratiquement pas reconnu cette amélioration. Les joueurs d’élite sont frustrés de ne plus pouvoir se permettre ce qu’ils ont eu dans le passé ou ce que d’autres grands joueurs ont fait au cours des dernières décennies.
Et pourtant, Michael Lewis dit que cela fait partie des progrès croissants de la culture.
Il existe un sentiment général que le système est truqué et que les arbitres ne sont plus équitables. Ce n’est pas seulement dans le sport, mais aussi la loi, le gouvernement, les marchés, dans tous les domaines de la vie où nous avons besoin de juges extérieurs pour faire respecter les règles du jeu.
Le thème général à gauche et à droite est que les «arbitres» ne sont plus justes ni impartiaux. Il y a une méfiance générale ceux qui se considèrent comme non protégés envers ceux qui sont protégés par les circonstances et la richesse . De plus en plus de nos concitoyens ont le sentiment d’être dans la catégorie des non protégés et que les arbitres sont nuls. Ils ne font plus confiance aux dirigeants des partis politiques pour résoudre les problèmes.
Ils préfèrent de plus en plus rejeter le système plutôt que de chercher une solution ou un compromis.
Excellent article 🙂
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Réformer le capitalisme non. Ce sont ses paradigmes même qu’il faut remplacer et faire émerger, du corps social, un nouveau modèle de production et de redistribution des richesses. Le capitalisme pas plus que le communisme n’est une fatalité. Communisme et capitalisme (au sens moderne) sont des inventions fondées sur des paradigmes obsolètes du XIXe siècle.
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