Aujourd’hui, les menaces qui pèsent sur le monde sont devenues de plus en plus inquiétantes et notre capacité à y résister semble moins certaine.

Paul Volcker était un fonctionnaire courageux. Les élites mondiales se seraient honorées en lui rendant hommage et surtout en retenant la leçon qu’en son temps, au début des années 80, il a donné: « il faut suivre sa pente à condition que ce soit en montant ». ou bien « a man has got to do what a man has got to do ».

Du New York Times: «Il a prévalu en produisant une thérapie de choc, entraînant l’économie dans une profonde récession pour persuader les Américains d’abandonner leurs anticipations  bien ancrées que les prix continueraient d’augmenter rapidement.»

Beaucoup de choses ont été écrites ces  dernièrers  semaines en l’honneur d’une vie extraordinaire. Elles donnent à réflêchir sur l’intelligence et la sincérité de ceux qui se prétendent être nos dirigeants.

Ecoutons Powell:

«Je connais Paul Volcker alors que j’étais secrétaire adjoint au Trésor en 1992 ou 1991. Il venait de quitter la Fed , et j’avais même peur de le rencontrer. J’étais tellement intimidé par cette figure mondiale. Et il n’aurait pas pu être plus gentil et plus intéressé à m’aider et à me soutenir et nous avons en quelque sorte continué. C’était vraiment une personne formidable à connaître. J’ai lu de nombreux récits de sa vie. Ce livre, si vous ne l’avez pas lu, le résume vraiment très bien. Je ne pense pas qu’il y ait eu un plus grand fonctionnaire dans notre vaste région au cours de notre vie. Il a vraiment fait exactement ce qu’il pensait être la bonne chose – tout le temps. Et il laisse les « jetons » tomber où ils le pouvaient . Il a été hué à un match de basket des Washington Bullets parcequ’il avait porté les taux à des niveaux très élevés… C’est un grand homme.et nous pouvons tous espérer être à la hauteur de ce qu’il est. »

Ainsi Volcker fut un grand homme, tout ce que nous pouvons espérer c’est d’être à sa hauteur, mais .. pas au point d’être courageux et de faire comme lui, de briser le dos de l’inflation qui submerge les marchés financiers.

En trois semaines, face à la débandade du derniers trimestre 2018, Powell a fait volte face, il a baissé son pantalon, il a ruiné une image qui pourtants ‘annonçait sinon rigoureuse, du moins courageuse.

Powell avait espéré être à la hauteur d’une partie de l’héritage de Volcker. Son courage pour résister aux marchés a été neutralisé  de manière décisive en quelques semaines.

Il s’est ridiculisé quand après avoir claironné que la politique de normalisation monétaire était en auto-pilote, il a fait volte face, terrorisé par la chute des marchés. Hélas, on ne peut normaliser sans mécaniquement provoquer la chute des marchés. C’est aussi nécessaire que un et un font deux. Les miracles n’existent pas. Ce qui fait monter les Bourses, le pognon gratuit, les fait chuter quand il se rarefie et devient plus cher.

Powell n’est pas un mauvais bougre, c’est simplement une victime.

D’abord il n’a pas appréhendé la situation réelle du système mondial quand il a accepté le poste.

Ensuite, il a préjugé de sa determination face au chantage des marchés boursiers.

Enfin Powell n’avait pas de plan pour faire face à une destruction de l’effet de richesse. La leçon est que les bulles non réprimées deviennent progressivement plus puissantes.

Le vrai grand Président de la Fed, celui qui cesserait d’être un otage, ce serait le Président qui prendrait le poste avec en tête un plan pour faire face à la chute des marchés et éviter l’engrenage récessionniste mondial. Celui la n’existe pas.

Le Volcker des temps modernes, c’est l’homme qui d’une part a décidé de crever la bulle, qui sait que toutes les autres bulles vont crever en cascade et qui a, dans ses cartons, un dispositif, un plan d’ensemble, pour faire face à cette destruction pacifique des fausses valeurs sans, je dis bien sans plonger le monde dans le chaos.

Celui là n’existe pas; le monde ne l’a pas encore produit.

Et qu’ a dit notre Bernanke à grosse tête, celui qui prétend toujours avoir tout compris de la crise de 1929 parce qu’il a lu Milton Friedman? Citation du NYT: «Il est venu pour représenter l’indépendance. Il incarnait l’idée de faire quelque chose politiquement impopulaire mais économiquement nécessaire. »

Remarquer la lâcheté qui consite a faire semblant d’honorer Volcker tout en balayant son oeuvre. Le mérite de Volcker selon Bernanke c’est d’avoir affirmé l’indépendance de la Fed, et d’avoir accepté d’être impopulaire.

Un bien pauvre mérite, superficiel qui atteste  bien de la superficialité de la pensée de Bernanke lui même. Non le mérite de Volcker ce n’est pas cela , c’est d’avoir compris le fondamental, c’est  d’avoir vu précisement ce que Bernanke et ses suiveurs n’ont pas vu, à savoir que l’inflation, qu’elle qu’elle soit, est un engrenage qui demande toujours plus.  Ce que ces zozos n’ont pas vu.

« Paul Volcker a été le président le plus efficace dans l’histoire de la Réserve fédérale. » a commenté Alan Greenspan. Pauvre Greenspan qui lui aussi a évité le débat théorique, et preféré nager en surface sans oser aller au fond de ce que suggérait la leçon que Volcker avait donnée en son temps.

De la part de Greenspan on attendait autre chose car ce fut une belle mécanique intellectuelle… il y a longtemps.

On attendait  par exemple une mise en comparaison montrant que d’une part il y a une similitude entre la situation à laquelle Volcker a du faire   face, l’inflation, mais qu’en même temps et d’autre part , il y a  une différence énorme :   l’inflation sur les prix des biens  et services  a été remplacée par l’inflation des prix des actifs.

Inflation dans les deux cas mais inflation sur deux segments différents, les biens et services d’une part et inflation sur les prix des actifs d’autre part.

On attendait  que Greenspan reflêchisse car il avait les outils pour le faire , il sait pour l’avoir expliqué lui même en son temps, que les deux inflations sont voisines, communes, semblables et que l’inflation des prix des actifs est une anticipation de celle des prix selon la chaîne suivante:  en faisant monter le prix des actifs, on anticipe les cash flows futurs et  si on anticipe des cash flows futurs en forte hausse, alors on anticipe  des revenus futurs fortement accrus et  si on anticipe des revenus futurs accrus,  très croissants alors cela veut dire que l’on anticipe une forte accelération de la hausse de tous les prix, une forte accélération de l’inflation et peut être une hyper inflation.

Et Greenspan qui a un excellent bagage théorique sait que dans tous ces domaines il faut compter non sur le linéaire mais sur les ruptures, sur les effets de seuil. Greenspan a raté l’occasion de justifier son titre de Maestro ou de Lord.

Note La chaine est la suivante: prix des actifs= anticipation  des cash flows futurs =anticipation des  revenus futurs du pays =anticipation des  prix des biens et services.

La chaine ici exposée n’est  prise en défaut que si et seulement si la part que le capital peut s’attribuer dans le GDP peut continuer à monter au détriment des salaires, ce qui est inconcevable, il y a des limites, compte tenu du niveau déja anormal de la répartition de la valeur ajoutée.

Le gourou mondial du keynesianisme fabien Martin Wolf du Financial Times a rendu un hommage vicieux à Paul Volcker. «Paul Volcker est le plus grand homme que j’ai connu. Il est doté au plus haut degré de ce que les Romains appelaient virtus (vertu): courage moral, intégrité, sagacité, prudence et dévouement au service de la patrie. »

Puis vient le coup de pied de l’âne:  la propagande inflationniste: «Cependant, lorsque la demande est faible et l’inflation basse, les banques centrales doivent assouplir la politique monétaire. Mais la politique expansionniste est techniquement difficile lorsque les taux d’intérêt à court terme atteignent zéro. Les banques centrales doivent envisager diverses alternatives non conventionnelles: expansion des bilans via un «assouplissement quantitatif»; taux d’intérêt négatifs; et ce que le monétariste Milton Friedman a appelé « helicopter money », des distributions   d’argent au public par le biais de paiements directs ou d’un financement monétaire permanent des déficits fiscaux. »

De quoi rire , Wolf , c’est l’hommage du vice inflationniste à la vertu desinflationniste!

Volcker était résolument déterminé à faire éclater la bulle de l’inflation des prix à la consommation. Personne n’ose envisager de faire éclater la bulle inflationniste actuelle des prix des actifs. Pourtant c’est l’inflation la plus menaçantes de l’histoire.

Non seulement elle constitue un engrenage dont on ne peut plus sortir, mais elle a des conséquences sur le système financier et sa stabilité, sur l’économie réelle, sur l’ordre social, et finalement sur l’ordre politique.

Déja le populisme est produit par cette première phase des conséquences alors que nous sommes encore  dans la phase euphorisantes des « free lunchs ». Que sera-ce quand on rentrera dans le moment de la présentation de l’addition, quand ce sera the day of reckoning? Que sera-ce quand il faudra payer?

Extraits d’un récent texte  de Paul Volcker publié dans le 11 décembre 2019 dans le Financial Times

(hat Tip D. N.)

« À la fin de l’été 2018, il était déjà clair que les États-Unis et l’ordre mondial qu’ils avaient aidé à établir de mon vivant étaient confrontés à  de prodigieux  challenges  économiques, culturels. 

Néanmoins, je me suis rassuré en pensant  au  rappel par ma mère que les États-Unis avaient subi une guerre civile brutale, deux guerres mondiales, une grande dépression, et qu’ils étaient toujours apparus comme le leader du «  monde libre  », un modèle de démocratie, de marchés ouverts, de libre-échange. et la croissance économique. C’était, pour moi, une source de fierté et d’espoir.

Aujourd’hui, les menaces qui pèsent sur ce modèle sont devenues de plus en plus inquiétantes et notre capacité à y résister semble moins certaine.

De plus en plus, il semble y avoir un mouvement pour saper la confiance des Américains dans notre gouvernement , ses politiques et institutions. Nous sommes allés bien au-delà du credo de l’ancien président Ronald Reagan selon lequel «le gouvernement est le problème», dans le but de renverser des décennies d’expansion fédérale.

Aujourd’hui, nous voyons quelque chose de très différent et de bien plus sinistre. 

Les forces nihilistes sont en train de démanteler les politiques pour protéger notre air, notre eau et notre climat. Et elles cherchent à discréditer les piliers de notre démocratie: le droit de vote et des élections équitables, l’État de droit, la presse libre, la séparation des pouvoirs, la croyance en la science et le concept de vérité elle-même.

Sans eux, le modèle américain que ma mère chérissait tant reviendra au type de tyrannie qui semblait jadis en voie d’extinction – bien que, malheureusement, il reste ancré dans certaines régions moins fortunées du monde …

La politique monétaire est importante, mais elle ne peut pas à elle seule maintenir un leadership mondial. Nous avons besoin de marchés ouverts et d’alliés solides pour soutenir la croissance économique et les perspectives de paix. Ces politiques américaines constructives ont été une grande partie de ma vie. Au lieu de cela, la confiance dans les  États-Unis est menacée.

Il y a soixante-quinze ans, les Américains ont relevé le défi de vaincre la tyrannie à l’étranger. Nous nous sommes joints à nos alliés, reconnaissant vivement la nécessité de défendre et de maintenir nos libertés démocratiques durement acquises. La génération d’aujourd’hui est confrontée à un test différent, mais tout aussi existentiel. La façon dont nous réagirons déterminera l’avenir de notre propre démocratie et, en fin de compte, de la planète elle-même. »

 

2 réflexions sur “Aujourd’hui, les menaces qui pèsent sur le monde sont devenues de plus en plus inquiétantes et notre capacité à y résister semble moins certaine.

  1. le déclin des USA et des états satellites vassaux est un « progressiste » processus d’obsolescence naturelle; il en est des empires comme du vivant que ce qui est né, doit un jour mourir et les USA sont depuis des décennies dans une gestation morbide; elle fait écho à la mise en garde de Lincoln: “A quel moment, donc, faut-il s’attendre à voir surgir le danger [pour l’Amérique]? Je réponds que, s’il doit nous atteindre un jour, il devra surgir de nous-mêmes. […] Si la destruction devait un jour nous atteindre, nous devrions en être nous-mêmes les premiers et les ultimes artisans. En tant que nation d’hommes libres, nous devons éternellement survivre, ou mourir en nous suicidant.” Cela fait écho aux propos désabusés de Volcker: « Aujourd’hui, nous voyons quelque chose de très différent et de bien plus sinistre.
    Les forces nihilistes sont en train de démanteler les politiques pour protéger notre air, notre eau et notre climat. Et elles cherchent à discréditer les piliers de notre démocratie: le droit de vote et des élections équitables, l’État de droit, la presse libre, la séparation des pouvoirs, la croyance en la science et le concept de vérité elle-même ».

    Les forces nihilistes que dénoncent Volcker ne viennent pas de la Russie ou encore de la Chine, se sont des forces « progressistes sociétales » impulsées par des magnats apatrides, elles fomentent une future révolution sociale-sociétale qui ne touchent pas que les USA mais aussi l’occident et tenteront de s’imposer au delà de ce périmètre trop restreint.
    Le « green new deal », l’eugénisme déguisé sous PMA/GPA, la conversion à la bouffe de synthèse fake-food au nom de la conscience animale et des pets de méthane de nos vaches…. sont une contribution malsaine du pivot central des revendications du climato-réchauffisme, Cela légitime les sacrifices pour « sauver le climat » et permet de réclamer une gouvernance mondiale sous influence de lobbys entrepreneuriaux et financiers. Les politiques malthusiennes auront le vent en poupe pour de nombreuses raisons comme la disponibilité alimentaire, la pollution, la robolution et l’explosion du chômage compté, sous l’angle utilitariste, comme une masse d’ inutiles (nouveaux intouchables pour une nouvelle caste mondiale féodale)….

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  2. Paul Volcker en montant les taux a aussi participé à la renaissance du monstre, il a cassé les hausses de salaires de la classe moyenne, il a attiré aux usa tous les placements mondiaux, il est l’un par qui les déficits jumeaux ont trouvé leurs raisons d’être….Peut être même qu’il a été l’alchimiste qui a transformé l’inflation sur les biens en inflations sur les actifs… Paul Volcker a relancé Wall street…

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