« L’économie de la richesse imaginaire est inévitablement remplacée par l’économie des actifs réels et durables ».

La lecture que je fais de la perversion du système économique occidental se retrouve dans ce discours de Poutine. Voir ci dessous.

Notre système économique a cessé de reposer sur le couple valeur d’usage/valeur d’échange.

Il a même cessé de reposer sur le trio que j’ai introduit au fil des années pour améliorer les analyses: le trio valeur d’usage/valeur d’échange/valeur désir.

La monnaie n’est même plus l’équivalent de toutes les marchandises ou du travail , non c’est l’équivalent de tous les désirs. D’ou l’appétit insatiable de monnaie.

Il a fallu introduire la valeur désir car , en raison de la manipulation introduite par la publicité et la communication , par le biais des métonymies, des métaphores, des répétitions névrotiques le désir humain ne connait plus aucune limite.

La demande fondée sur les besoins est limités, celle qui est fondée sur les désirs est sans limite. C’est ce qu’il faut au capitalisme pour durer. Avec un dictionnaire qui comporte un nombre limité de mots, on peut écrire une infinité de romans ou de discours.

L’économie de l’imaginaire , selon moi va encore plus loin, elle flirte avec mon hypothèse selon laquelle les gens vivent dans une névrose sociale, dans une sociose, dans un univers disjoint de la réalité, dans un univers autonomisé. Il a perdu ses racines, ses ancrages. il est hors sol comme on dit.

De la même façon que l’opération de 1971 de Nixon a coupé le lien entre la monnaie et l’or, puis le monde réel et le monde du travail, le même phénomène s’est produit dans notre psyché, dans ce que l’on peut pour simplifier appeler notre âme.

Nous avons perdu le contact avec le réel; les représentations du réel ont pris le dessus, elles ont pour ainsi dire escamoté le réel.

Nous avons changé de nature pour ainsi dire, d’êtres hybrides insérés en même temps dans le monde réel et dans le langage nous avons déménagé et migré vers le langage c’est à dire l’imaginaire des mots et des images.

L’épreuve de réalité nous a progressivement été épargnée; nous avons pu nous envoler dans les bulles de l’imaginaire , ces bulles étant bien sur en liaison avec les désirs ou si on veut imager, nos rêves.

Les désirs qui nous définissent et nous habitent ne sont pas les nôtres, nous sommes fabriqués, aliénés, étrangers a nous même, ces désirs sont ceux qui conviennent au système pour durer et même se reproduire.

Il y a isomorphisme entre les bulles financières et les bulles d’imaginaire dans lesquelles nos sociétés vivent. Nous avons perdu le contact avec le fondamental, avec ce qui importe. Nous avons coupé le lien qui nous faisait être sérieux , sensibles à la gravitation/gravité;

La sortie de la bulle, la sortie de la bulle de l’imaginaire est une épreuve de réalité en finance comme dans la vie . On chute on se fracasse par terre. Elle nous fait retrouver l’univers des besoins, du manque et des valeurs d’usage et tout ce qui va avec, la peine, la souffrance, l’effort , la mort etc

On découvre du même coup la rareté et la finitude

L’inflation qui nous guette, la vraie inflation, pas l’inflation actuelle qui est encore circonstancielle et appartient encore au monde ancien en crise, aura peut être à voir avec tout cela par le biais du rationnement des choses nécessaires à la satisfaction des besoins essentiels, voire à la survie.

Etre conservateur n’a rien à voir avec la droite ou la gauche et toutes les imbécilités politiques; non être conservateur c’est vouloir défendre notre nature, notre privilège, notre caractère hybride de roseau pensant comme disait Pascal. Roseau planté dans la terre, pas hors sol!

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4 réflexions sur “« L’économie de la richesse imaginaire est inévitablement remplacée par l’économie des actifs réels et durables ».

  1. Bonsoir M. Bertez

    le premier outil de la déconnexion du réel économique en France fut « la carte bleue », qui dématérialisait les paiements des individus , l’accumulation des dettes tout en érotisant la consommation forcenée de machins pour lesquels les publicitaires et hommes du marketing jouaient un rôle fondamentalement de même nature que celui des rabatteurs de gogos pour les boîtes de strip-tease de Pigalle, continuation mercantile de « Sous les pavés la plage! », « Interdit d’interdire » etc.
    Ainsi, tous les soi-disant révolutionnaires de 68 se révèlent maintenant avoir été les idiots très utiles et très malfaisants du capitalisme financier et plus particulièrement du capitalisme impérialiste anglo-saxon.

    Cordialement

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  2. Le discours de Poutine illustre une prise de conscience qui est aussi celle des chinois.

    Cette prise de conscience n’était pas explicitée mais se voyait puisque les Treasury’s ont fait l’objet de ventes nettes de la part des étrangers entre 2012 et 2020.

    Les QE de la Fed ont notamment eu pour objet de palier cette défection.

    Sans QE, les émissions US ne peuvent redevenir attractives qu’a la faveur d’un différentiel de taux favorable au dollar et d’une crise favorisant le retour de l’argent au centre.

    C’est exactement ce qui se passe actuellement et on peut y voir l’un des intérêts stratégiques des américains à l’entretien de la guerre en Ukraine quitte à fragiliser la périphérie.

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  3. Monsieur Roddier était prophétique en 2019. Mais Personne ne pouvait s’imaginer que la culture deviendrait tellement inadapté qu’elle se coupera elle-même de son flux d’énergie. on retrouve aussi en conclusion l’optimiste un peu naif des chercheurs.

    https://www.francois-roddier.fr/?p=934

    « C’est durant sa phase de crise qu’une société s’effondre. L’effondrement correspond à ce que j’ai appelé la « falaise de Sénèque » une appellation suggérée par l’italien Ugo Bardi (voir la figure du billet 93). Cette falaise correspond au palier de condensation des thermodynamiciens. Elle se situe donc au milieu de la phase de crise. Si on applique ce résultat à la société française actuelle, on doit s’attendre à ce que celle-ci s’effondre en 2023, soit à la fin du présent mandat présidentiel. Je laisse mes lecteurs juger de la pertinence d’une telle prédiction.

    À quoi doit-on s’attendre concrètement? La comparaison avec la fin des espèces végétales ou animales nous met sur la voie. Celles-ci s’éteignent lorsque leurs gènes ne sont plus adaptés à l’environnement. Dans le cas d’une société humaine, c’est sa culture qui n’est plus adaptée à l’environnement. C’est bien le cas de la société actuelle, société de compétition dont la principale source d’énergie, le pétrole, s’épuise et dont l’activité modifie le climat.

    De même que la théorie des équilibres ponctués laisse prévoir une évolution rapide des gènes à des époques très particulières, de même elle laisse prévoir une évolution très rapide de la culture à des époques très particulières. J’ai suggéré que notre société actuelle allait s’effondrer en 2023. Cela implique une fin brutale de la culture dominante présente. On pourra alors espérer voir enfin rapidement s’étendre une nouvelle culture, beaucoup moins portée vers la croissance économique et beaucoup plus orientée vers la préservation de l’environnement

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    1. Bonjour Igor
      Cette « falaise de Sénèque » pourrait être mise en parallèle avec les « avalanches » de criticité se produisant dans les systèmes auto organisés; cf Per Bak – How nature works…
      Cordialement.

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