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Johannes Stern , Alex Lantier

Lors d’une réunion des chefs d’armée de l’OTAN à Bruxelles jeudi, le commandant en chef de l’OTAN, Christopher Cavoli, a annoncé l’exercice Steadfast Defender, qui débutera la semaine prochaine et durera jusqu’en mai. Cette manœuvre de l’OTAN, la plus importante depuis la guerre froide, prépare une mobilisation de guerre totale de l’OTAN contre la Russie.

« L’exercice Steadfast Defender 2024 sera le plus grand exercice de l’OTAN depuis des décennies, avec la participation d’environ 90 000 forces des 31 Alliés et de notre bon partenaire la Suède », a déclaré Cavoli. « L’Alliance démontrera sa capacité à renforcer la zone euro-atlantique via des mouvements transatlantiques de forces depuis l’Amérique du Nord. Ce renforcement se produira lors d’un scénario de conflit émergent simulé contre un adversaire proche.

Plus de 50 navires de guerre, dont des porte-avions et des destroyers, y participeront. Il y aura également 80 chasseurs, hélicoptères et drones et plus de 1 000 véhicules blindés, dont 133 chars et 533 véhicules blindés de transport de troupes. Géographiquement, l’exercice s’étend à travers la Scandinavie et les États baltes jusqu’à la Pologne, la Roumanie et l’Allemagne. Outre les États-Unis, certains États européens envoient également plus de 10 000 soldats. La Grande-Bretagne contribuera à hauteur de 20 000 et l’Allemagne à hauteur de 12 500.

Il ne s’agit pas simplement d’un exercice, mais d’une préparation visant à transformer la guerre de l’OTAN contre la Russie en Ukraine en une guerre mondiale menée à travers l’Europe. Les hauts responsables de l’OTAN ne mâchent pas leurs mots. 

À Bruxelles, l’amiral néerlandais Rob Bauer, président du comité militaire de l’OTAN, a exigé « une transformation guerrière de l’OTAN ».

« Il n’est pas acquis que nous soyons toujours en paix », a déclaré Bauer. En cas de guerre, a-t-il ajouté, « c’est l’ensemble de la société qui sera impliquée, que cela nous plaise ou non ».

Bauer a salué les récentes déclarations du ministre suédois de la Défense civile, Carl-Oskar Bohlin, qui a appelé le peuple suédois à se préparer à la guerre. « Il pourrait y avoir une guerre en Suède », a déclaré Bohlin. « Êtes-vous un particulier ? Avez-vous réfléchi à la possibilité de rejoindre une organisation de défense bénévole ? Sinon : bougez !»

Bauer a commenté : « Le fait que les gens …achètent par conséquent des radios et des batteries, c’est formidable… Cela commence [avec] la prise de conscience que tout n’est pas planifiable, que tout ne se passera pas bien. –»

Ces Dr Folamour des temps modernes planifient une guerre totale, poursuivant de manière mégalomane l’objectif suicidaire de vaincre militairement la Russie qui est une puissance nucléaire. immédiat.

Dans une « note au président » intitulée « Un programme audacieux pour le sommet de Washington » et publiée par l’influent groupe de réflexion Atlantic Council, un groupe d’ambassadeurs et de commandants militaires américains à la retraite appellent à une escalade colossale de l’OTAN contre la Russie. « L’objectif doit être sans ambiguïté : la victoire de l’Ukraine », écrivent-ils. Ils prônent la conquête de la Crimée sous contrôle russe et l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN – c’est précisément ce pour quoi le Kremlin est entré en guerre en Ukraine.

Après l’échec de la « contre-offensive » ukrainienne l’année dernière, une telle politique de conquête nécessiterait un engagement massif et manifeste des troupes de l’OTAN contre la Russie. De manière significative, le mémo insiste sur le fait qu’une telle escalade devrait se poursuivre même si elle provoque une guerre nucléaire :

« La Russie pourrait menacer d’intensifier la guerre en réponse à une invitation de l’OTAN à entamer des négociations d’adhésion, y compris l’utilisation éventuelle d’armes nucléaires. … L’OTAN ne devrait pas se laisser dissuader par la rhétorique nucléaire russe. La dissuasion nucléaire de l’OTAN reste forte et l’Ukraine a déclaré sa volonté de lutter contre toute escalade russe.»

L’OTAN accélère également les exercices d’entraînement pour mener une guerre nucléaire. En octobre dernier, 60 avions de l’OTAN en Italie, en Croatie et en Méditerranée ont participé à un exercice intitulé « Steadfast Noon », s’entraînant à effectuer des bombardements pour larguer des armes nucléaires sur leurs cibles.

Comme lors des deux guerres mondiales du XXe siècle, les élites dirigeantes impérialistes ont le sentiment qu’elles disposent de peu de temps et que seule une escalade rapide peut contrecarrer les puissantes forces politiques – dans la situation militaire et dans la lutte des classes internationale – qui travaillent contre elles.

Les médias européens qui soutiennent la guerre contre la Russie admettent désormais que l’OTAN est confrontée à un désastre en Ukraine. Même avec les armes de l’OTAN, l’Ukraine ne peut raisonnablement espérer vaincre les forces russes numériquement supérieures, mais seulement les retenir dans une guerre d’usure acharnée que l’Ukraine, avec sa population bien plus petite, finirait par perdre. Des centaines de milliers d’Ukrainiens sont morts et, même si Zelensky déclare à l’OTAN que son gouvernement est prêt à se battre dans une guerre nucléaire, il craint une révolte interne. 

Le Financial Times de Londres admet :

Les chefs de l’armée ukrainienne ont demandé à Volodymyr Zelensky de mobiliser jusqu’à 500 000 personnes alors que le pays se prépare à une guerre d’usure prolongée contre la Russie l’année prochaine. … Mais jusqu’à présent, Zelensky s’est montré réticent à recourir à une conscription plus large, craignant que cela n’attise les tensions sociales.

Les élections présidentielles américaines de novembre prochain, au cours desquelles les sondages donnent Trump ou d’autres candidats républicains à la tête du candidat démocrate sortant Joe Biden, rendent la situation encore plus explosive. Certaines sections du parti républicain se sont opposées au financement de l’Ukraine, dans le but de détourner l’attention du renforcement militaire de Washington contre la Chine. Les factions de la classe dirigeante appelant à une escalade de la guerre cherchent à créer des faits sur le terrain afin qu’une potentielle nouvelle administration Trump ne puisse pas se retirer de la guerre OTAN-Russie.

Surtout, les planificateurs de l’OTAN sont terrifiés par la montée de la lutte des classes. L’arrêt des exportations énergétiques russes vers l’Europe a entraîné une hausse massive des prix de l’énergie, les prix dans la seule zone euro ayant augmenté de 18 % depuis le début de la guerre. Conjuguée aux réductions des dépenses sociales alors que les gouvernements de l’OTAN transfèrent des centaines de milliards de dollars ou d’euros aux dépenses militaires, cette situation a provoqué une éruption internationale de grèves et de protestations.

L’année 2023 a été marquée par des grèves et des luttes historiques : des travailleurs américains de l’automobile, des scénaristes de cinéma et des cheminots ; par des millions de travailleurs en Allemagne, en Grande-Bretagne et dans toute l’Europe, y compris par les travailleurs français opposés aux réductions des retraites ; et les manifestations mondiales contre le génocide israélien contre Gaza. Les premières semaines de 2024 ont été marquées non seulement par une escalade des protestations contre Gaza, mais aussi par une grève des conducteurs de train, des protestations d’agriculteurs et des manifestations de masse contre l’extrême droite en Allemagne.

Néanmoins, un fossé important existe encore entre la conscience de masse et les dangers imminents posés par la Troisième Guerre mondiale naissante. Les travailleurs ne peuvent pas résoudre la crise mondiale au sein du système capitaliste d’État-nation, sous le contrôle des bureaucraties syndicales nationales et des partis politiques de pseudo-gauche qui négocient avec les gouvernements capitalistes et soutiennent l’effort de guerre.