Essai : l’IA n’est pas une révolution neutre, mais un artefact réflexif de Wall Street, où succès ou effondrement dépendent de nos illusions collectives.

Résumé de ma thèse: L’IA n’est plus une technologie, mais un mythe auto-réalisateur – qui durera jusqu’à ce que la faillibilité humaine le brise.

Pour travailler financierement le secteur de l’IA, il faut se concentrer sur l’analyse critique et le suivi du mythe.

L’IA n’est plus un choix, c’est marche ou crève, la logique de la finance, celle de l’accumulation et de la Necessité de la mise en valeur du Capital ont choisi pour nous!

La théorie de la réflexivité de George Soros affirme qu’il existe une relation bidirectionnelle entre les perceptions des acteurs du marché et la réalité économique.

Les perceptions des investisseurs influencent la réalité (fonction participative) et la réalité à son tour influence les perceptions des investisseurs (fonction cognitive).

Cette boucle de rétroaction peut provoquer des cycles auto-renforçateurs qui éloignent les marchés de l’équilibre, créant des bulles et des krachs, et s’oppose à l’idée économique classique d’un marché qui tend naturellement vers l’équilibre. 

Voici ce qu’écrit un observateur , écrit qui a suscité ma réflexion.

LE PIÈGE À 1,5 MILLIARDS DE DOLLARS : COMMENT WALL STREET A ENFERME L’HUMANITÉ DANS LA SUPRÉMATIE DE L’IA.

Le 7 novembre 2025 a marqué le jour où les marchés financiers ont cessé d’être des marchés. 1,34 milliards de dollars ont été investis dans les ETF de semi-conducteurs en 168 heures. Pas des millions, mais des milliards. Un record absolu. Simultanément, 1,2 milliards de dollars ont été investis dans des fonds technologiques à effet de levier.

Soit un total de 43 milliards de dollars cette semaine-là.

Rien que cette année, 1 140 milliards de dollars ont été investis dans les ETF américains.

Il ne s’agit pas d’investissement. Il s’agit de la plus grande réallocation forcée de capitaux de l’histoire de l’humanité.

LE MOTEUR EST LA PEUR DE RATER, LA PEUR DE NE PAS PARTICIPER;

Voici ce que personne ne vous dit : chaque dollar qui afflue dans ces fonds sert de garantie à une dette colossale de 1 500 milliards de dollars finançant une infrastructure d’IA sans fin.

La corrélation est de 0,65, ce qui signifie que les deux tiers de cet argent sont directement investis dans des entreprises qui développent l’infrastructure informatique du siècle prochain.

À des taux d’intérêt de 9 à 12 %. Le piège est déjà refermé. La logique de la finance est mise en branle.

Les flux d’investissement dans les ETF font grimper les valorisations. Ces valorisations gonflées servent de garantie pour les actions. Ces actions financent le développement de l’IA. Le développement de l’IA génère des revenus. Ces revenus attirent de nouveaux investissements.

Le cycle est bouclé. Auto-entretenu.

Imparable. 2 900 milliards de dollars d’investissements dans l’IA d’ici 2028.

Si la monétisation de l’IA tombe en dessous de 2 fois les dépenses d’investissement, toute la structure s’effondre sur elle-même. Ce n’est pas une bulle. Les bulles éclatent. Il s’agit d’un pacte avec l’avenir. Les années 2020 resteront dans les mémoires comme la décennie où Wall Street n’a pas financé l’innovation en IA, mais a financé son caractère inévitable. Désormais, chaque fonds de pension, chaque plan d’épargne retraite, chaque investisseur particulier est pris au piège d’un système qui doit réussir ou s’effondrer.

Analyse du texte à la lumière de la théorie de la réflexivité de George Soros

Ce texte dépeint un « piège » financier autour de la suprématie de l’IA comme un cycle auto-entretenu et potentiellement destructeur.

La théorie de la réflexivité de George Soros, un concept clé en économie comportementale et en finance spéculative s’y impose tout à fait naturellement..

Pour rappel, Soros, dans L’Alchimie des finances (1987), explique que les marchés ne sont pas des systèmes en équilibre rationnel (comme le postulent les économistes classiques), mais des processus réflexifs : les perceptions des acteurs (investisseurs, entreprises, régulateurs) influencent les fondamentaux économiques, qui à leur tour valident ou amplifient ces perceptions, créant des boucles de rétroaction positives.

C’est vous le savez également mon cadre analytique; les marchés sont un symptôme d’une névrose plus vaste, sociale. Ils sont tout sauf rationnels et efficaces.

Cela mène souvent à des bulles (hausse irrationnelle) ou à des crashes (correction brutale), car la « réalité » est déformée par une cognition humaine faillible d’une part et biaisée d’autre part. Soros l’a appliqué à des crises comme celle de 2008, où les prix immobiliers gonflés ont justifié plus de crédit, renforçant la bulle jusqu’à l’implosion.

Le texte ci dessus expose un « pacte avec l’avenir » où Wall Street impose l’inévitabilité de l’IA via des flux massifs de capitaux.

Analyse en deux parties :

(1) un résumé du texte, (2) son interprétation réflexive sorosienne.

1. Résumé du texte : Un cycle infernal d’investissement forcé . Le texte alerte sur un basculement historique des marchés financiers, transformés en machine à réallouer des capitaux vers l’IA :

  • Flux records : 1,34 milliard de dollars en ETF semi-conducteurs en 168 heures (fin novembre 2025), 1,2 milliard en fonds tech à effet de levier, totalisant 43 milliards cette semaine-là. Année 2025 : 1 140 milliards en ETF US.
  • Mécanisme du piège : Ces investissements servent de garantie à une dette de 1 500 milliards finançant l’infrastructure IA (corrélation 0,65 avec les entreprises d’infra-compute). Taux d’intérêt : 9-12 %. Cycle : Flux → Valorisations gonflées → Garanties pour actions → Financement IA → Revenus → Nouveaux flux.
  • Conséquences : Prévisions optimistes (2 900 milliards en IA d’ici 2028, +20 000 milliards de PIB per Goldman Sachs), mais coûts cachés (1 million d’emplois perdus, 600 milliards en énergie manquante, 5 % de risque de black-out). Géopolitique : Taiwan Semiconductor (TSMC) +15 %, mais « otage » des tensions mondiales.
  • Thèse centrale : Pas une bulle qui éclate, mais un système auto-entretenu, une sorte d ‘engrenage où tout échec (monétisation IA < 2x investissements) effondre l’ensemble. L’humanité – via fonds de pension et épargnes – est piégée dans l' »inévitabilité » de la singularité IA, financée par Wall Street.

C’est un constat imparable : les marchés ne financent pas l’innovation, ils la rendent inévitable. La recherche du profit , la mise en valeur obligatoire des capitaux rendent inevitable la création d’un fardeau collectif. Le financement met en branle une chaine qui conduit à un déséquilibre extrême, potentiellement à une « super-bulle » (comme il l’appelait pour la crise de 2008).

Voici comment le cadre sorosien éclaire le propos :

  • Perceptions déformant les fondamentaux (côté cognitif) : Les investisseurs perçoivent l’IA comme « inévitable » (singularité « déjà exploitée »), boostée par des narratifs comme ceux de Goldman Sachs (+20 000 milliards de PIB). Cela crée une fallibilité cognitive collective : biais d’optimisme (confirmation que l’IA transformera tout) et illusion de contrôle (marchés « doivent réussir ou s’effondrer »). Soros insiste sur la faillibilité humaine : nos croyances ne reflètent pas la réalité, elles la façonnent. Ici, la peur de rater le train IA (FOMO) produit les flux records, rendant la suprématie IA « réelle » par pure perception.
  • Rétroaction sur les fondamentaux (côté manipulation) : Le texte décrit un cycle parfait de réflexivité :
    1. Flux initiaux (ETF semi-conducteurs) → Valorisations +15 % (ex. TSMC).Valorisations → Garanties pour dette (1 500 milliards à 9-12 %).Dette → Développement IA (infrastructures infinies).IA → Revenus/revenus anticipés → Nouveaux flux (auto-entretenu).
    C’est du Soros pur : les prix (valorisations) ne mesurent pas les fondamentaux (valeur intrinsèque de l’IA), ils les créent. Comme dans la bulle immobilière de 2008, où prix ↑ → crédit ↑ → prix ↑, ici c’est investissements ↑ → dette ↑ → IA ↑ → investissements ↑. La corrélation de 0,65 citée illustre cette boucle : les deux tiers des flux sont « réflexifs », pas purement productifs.
  • Risques de rupture (côté déséquilibre) : Soros avertit que ces boucles positives mènent à des points de bascule quand la réalité contredit la perception (ex. monétisation IA < 2x dépenses). Le texte l’évoque : pas une bulle qui « éclate », mais un effondrement systémique (réseaux défaillants, emplois perdus, géopolitique). Ajoutez le levier (dette à haut taux) et l’interconnexion (fonds de pension piégés), et vous avez une « super-bulle » sorosienne : interventionniste (Wall Street force la réallocation) et globale (humanité « prisonnière »). Des analystes appliquent déjà cela à l’IA : la hype (perception) attire capitaux qui financent l’AGI (fondamentaux), mais un doute (ex. retours décevants) pourrait inverser en réflexivité négative (panique → ventes → crash).

La description qui se donne pour rationnelle devient une allégorie sorosienne d’un marché qui « vit » sa propre fiction, où l’IA n’est plus une technologie, mais un mythe auto-réalisateur – jusqu’à ce que la faillibilité humaine le brise.

Une réflexion sur “Essai : l’IA n’est pas une révolution neutre, mais un artefact réflexif de Wall Street, où succès ou effondrement dépendent de nos illusions collectives.

  1. Bonsoir M. Bertez

    On connait depuis longtemps les trois petits singes qui se cachent de leurs mains l’un les yeux, l’autre les oreilles et le troisième la bouche, mais il y a d’autres mains qui aussi vont par trois:
    la main de ma soeur, la main invisible des marchés et la main de « Dieu »(alias Maradona)
    Force nous est de constater que les unes ne valent pas mieux que les autres.

    Cordialement

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