Editorial. Analyse en profondeur des enjeux du scrutin: je voterai Macron quand…

Editorial Bruno Bertez du 30 avril 2017

Titre : Analyse en profondeur des enjeux du scrutin : je voterai Macron quand…

Les économistes mainstream sont plus préoccupés de soutenir les politiciens que de penser. On l’a vu lors du premier tour des présidentielles en France avec la prolifération imbécile de pétitions signées par des centaines d’économistes en faveur ou défaveur des candidats. Ces zozos ne se sont même pas rendu compte que la diversité et les contradictions de leurs manifestes les déconsidéraient? Qu’est-ce qu’une science si elle produit des résultats contradictoires, tout en prétendant au même but: l’intérêt général? Au moins les économistes des Banques Centrales, ceux de la BCE en particulier, eux, ne s’embarrassent pas de l’intérêt général, ils ne dissimulent même plus à ce stade leur objectif: la reproduction de l’ordre ancien au bénéfice des ploutos, des banques et de l’entité abstraite Europe.

Les causes de la crise de la croissance, de la stagnation/régression des revenus, du chômage, de la déqualification, de la précarité, de l’instabilité, de l’accroissement des inégalités, tout cela ne passionne plus personne. On a mis des œillères aux chevaux, ils ne regardent pas sur les côtés, ils suivent le chemin tracé par les élites financières.

Qui, parmi les candidats aux élections, fait encore référence à la crise de 2008, alors qu’elle a déterminé le parcours suivi depuis lors et qu’elle est le fondement de la dislocation de nos arrangements/systèmes politiques?

Qui sait que le prix de la crise n’a pas encore été payé, que l’on n’a fait que repousser l’échéance grâce au crédit, à la création de monnaie et à la monétisation des dettes des gouvernements par les QE, achats monétisés de dettes à long terme.

Qui comprend que Macron incarne la volonté du système de se préserver, de se reproduire, de nier ses contradictions et ses antagonismes en faisant payer le prix de la crise aux classes moyennes et laborieuses au risque  de leur destruction.

Qui comprend que Mélenchon et Marine, c’est la même chose sous cet aspect: le refus de faire payer les classes moyennes et laborieuses, le refus du déclassement?

Qui comprend que la seule différence entre les deux est la position philosophique sur l’Universel et sur la Nation. Mélenchon veut à tout prix maintenir l’Universel et donc l’ouverture, l’immigration, le remplacisme, il croit à l’Homme abstrait,  alors que Marine considère que lutter contre les prétentions du capital ne peut se faire que dans un cadre protégé, fermé, national. Marine croit aux hommes concrets. A ceux qui vivent ici et maintenant.

Qui comprend que les autres, tous les autres, sont des mystificateurs sociaux, des pseudo-démocrates, des enfumeurs, des nègres-blancs,  dont la fonction historique est de brouiller, de flouter, d’empêcher que les peuples prennent conscience des enjeux  et donc des solutions?

Les idéologies anciennes, les lignes de partage  traditionnelles sont sous-jacentes, toujours adaptées, « relevantes » pour comprendre, mais elles sont dynamitées, éclatées ou recouvertes: regardez le nombre de politiciens qui prétendent dépasser les clivages, n’être ni de droite, ni de gauche! Ils les dépassent, soit en prenant un peu de chaque côté, soit en jetant sur le monde le voile de la modernité. Elle a bon dos la modernité!  Et le pire, c’est que, de tous les temps, on s’en est servi pour les mêmes objectifs: enfumer afin de mieux préserver l’ancien, le « mort » au détriment du « vif ».

Plus près de nous, pensez à l’opération de Mitterrand qui a échoué à changer la vie et a renvoyé Mauroy au nom de la modernité incarnée par Fabius? N’y a t-il pas plus ringard que Fabius? La modernité, cela passe vite.  La pseudo-modernité de Fabius à l’époque n’a servi qu’à licencier, qu’à détruire des pans de notre industrie, comme le fera le sinistre Macron, dit le moderne.

Notre société vit et se nourrit de mystifications, d’inversions et de propagande. Elle ne repose surtout pas sur le socle de la vérité.

La pierre angulaire de nos sociétés, c’est le profit, le taux de profit. Mais c’est le grand secret qui ne doit pas venir à la conscience publique, populaire.

S’il y a du chômage, c’est parce que le profit est insuffisant pour faire vivre l’entreprise et payer les salaires.

S’il n’y pas d’investissement, c’est parce que ceux-ci ne sont pas assez profitables. S’il y a destruction, fermeture, c’est parce que le  taux de profit est insuffisant pour survivre.

Comprenez bien personne n’est fou, personne ne va se priver de la possibilité de gagner de l’argent; donc si on n’investit pas, si n’emploie pas, c’est parce que ce n’est pas rentable. Quand on vous vend la tarte à la crème de la compétitivité -le socialisme de l’offre de Hollande-  comprenez que la nécessité de payer les salaires, les impôts, les dettes, les intérêts, les matières premières et les profits/dividendes, oblige à reculer, à abandonner des parts de marché. On est moins compétitifs quand/parce que  la rentabilité du capital est insuffisante. Quand on vous dit, il faut baisser les charges (le CICE), on ne vous dit rien d’autre que ceci: il faut monter les profits.  Quand on dit, il faut baisser le coût du crédit, on ne vous dit rien d’autre que ceci: il n’y a pas assez de profit et donc il faut compenser par le crédit et le rendre gratuit.

Vous avez compris: tout le système repose sur le profit et la nécessite de le réaliser, de l’accumuler, de le réinvestir, de le distribuer un peu pour rémunérer le capital.

Et retenez bien ceci, la globalisation n’est rien d’autre que le moyen auquel le capital a recours pour dépasser, compenser l’insuffisance du profit, pour compenser la chute de la rentabilité du capital. La globalisation est le moyen de réintroduire la loi du plus fort et de faire en sorte que le profit, rare, aille au plus fort, au plus adapté.  La globalisation répartit la rareté! La globalisation, dans son essence est ceci: la libre circulation des capitaux qui les met tous en concurrence, férocement, afin qu’ils aillent chercher le profit le plus élevé, le profit maximum si possible, sinon le profit moyen,  et qu’ainsi s’opère la sélection des plus rentables, des plus profitables, des plus forts.

La compétition n’est jamais dans son essence autre chose que la compétition pour le profit, mais il faut que cela reste secret, non-dit. L’Européisation est une sous-globalisation avec la même fonction ; simplement, la lutte est à l’intérieur de l’espace européen d’abord, avant d’être mondiale. C’est une lutte  dont la fonction objective, non consciente bien sûr,  est de bonifier le taux de profit allemand.

Vous comprenez tout de suite l’enjeu de la flexibilité, de la souplesse, l’enjeu colossal de la réforme du droit du travail en France : il faut assouplir, briser les rigidités de la main d’ouvre, détruire les droits anciens, les avantages acquis. Il faut assouplir… les échines.  Macron en est le chantre avec Parisot et le Medef.  Il faut organiser le marché du travail, ou plutôt en faire un vrai marché. Il faut faciliter  la mise en compétition des salariés, organiser mieux leur expérience, leur mise à niveau,  leur formation continue et, pour les autres, comme les taxis par exemple, il faut détruire leur fonds de commerce, les uberiser: il s’agit de transmettre au facteur-travail les contraintes qui s’exercent sur le taux de profit du fait de la lutte pour le profit, de sa rareté, du fait de ce qu’ils appellent la compétition internationale.

Le sens profond du Macronisme, sous couvert de modernité, c’est de réduire les efforts que l’on demande au capital,  aux banques,  aux ploutocrates et kleptocrates en augmentant ceux que l’on exige des classes moyennes et laborieuses.

La nécessité de reconstituer le taux de profit en France est incontestable, il est insuffisant. La France ne peut soutenir la lutte internationale pour le profit parce qu’elle est socialiste, c’est à dire qu’elle refuse la sélection du capital, son euthanasie quand il est zombie.  Elle veut que, même le capital inutile, inefficace, le capital de poids mort, continue de vivre. Elle refuse la destruction créatrice, c’est le résultat du keynésianisme, du monopole Enaniste, du poids d’une « self-perpetuating  elite ». 

La France est profondément conservatrice, elle refuse les sanctions, même en cas d’inefficacité et d’échec, elle refuse la destruction du capital périmé, inutile, fictif, bancaire, lorsqu’il est pourtant  pourri, irrécouvrable.  Donc, pour maintenir en vie, sous perfusion, ce capital, elle moyenne, elle lisse, elle égalise, elle fait donc baisser le taux de profit moyen du système par la péréquation; c’est à cela que servent les dépenses et les prélèvements de l’Etat: a péréquationner. A ponctionner les uns pour maintenir en vie les autres. En fait, le socialisme dont la France fait preuve au niveau des citoyens et contribuables, elle l’applique au capital, ce qui est un comble.

Le capital ne peut accomplir sa mission et être légitime que s’il est sélectionné, s’il est sanctionné, s’il est détruit quand il est inefficace. Mais en refusant de sacrifier les traînards, les dépassés, les pourris, les inadaptés, les parasites spéculatifs, alors elle affaiblit tout le monde, tout le système. Le poids des prélèvements de l’Etat et de ses dépenses (57% du GDP) est le symptôme et, en même temps, le révélateur de tout cela.

L’insuffisance du taux de profit en France est ancienne et il y a eu peu de rémissions sur la pente de la dégradation.

L’insuffisance a deux origines.

La première est le phénomène de l’accroissement de la composition organique du capital; c’est à dire le poids des investissements qu’il faut réaliser pour produire dans le monde ouvert contemporain. C’est incontournable: celui qui ne dépense pas en capital disparaît et il faut toujours plus de capital. C’est de cela que l’on parle quand on parle de productivité.

La seconde, c’est l’excès de capital insuffisamment productif, l’excès de capital dépassé, l’excès de capital fictif, l’excès de capital protégé. Si le taux de profit est insuffisant, c’est par ce que le dénominateur du ratio est trop grand, injustifié  par son utilité sociale et économique. La France a un excès de zombies du fait de son socialisme généralisé. C’est ce que l’on peut appeler un excès de  capital de poids mort, à condition de bien veiller à y inclure l’ensemble des dettes publiques et privées. Car ce que l’on oublie toujours, c’est que les dettes des uns constituent le capital des autres. Et quand le scélérat Draghi dit « endettez-vous », il ne dit rien d’autre  que ceci : inflatez le capital des autres, le capital de ceux qui prêtent, le capital des usuriers.

Macron, c’est celui qui veut que les  usuriers fassent leur plein, ne perdent pas un centime sur leurs créances.

Je voterai Macron quand il répartira l’effort, le sacrifice, c’est à dire qu’il détruira les droits acquis du capital fictif, inefficace, périmé, autant qu’il détruira les droits des classes moyennes et laborieuses. 

 

7 réflexions sur “Editorial. Analyse en profondeur des enjeux du scrutin: je voterai Macron quand…

  1. Macron sera élu parce qu’il représente l’aboutissement ultime du système. Probablement la représentation d’une fin… qui débouchera sur quoi?… Le début d’une nouvelle ère? Une nouvelle servitude en tout cas…. eh oui… Nous passons d’une servitude à une autre.

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  2. Merci de partager votre point de vue très intéressant, et de toute évidence vous ne voterez pas Macron avant moi. Et de mon point de vue d’informaticien, je voterais Macron quand vrai = faux, ce qui est une manière comme une autre de programmer une boucle infinie.

    Ça fait toujours un bien fou de voir des gens qui regardent les choses avec un peu de recul, attitude qui devient rarissime à l’ère de la spéculation « à haute fréquence » qui est au niveau bancaire et financier du même ordre que le bonneteau : une escroquerie ou le maitre du jeu gagne toujours.

    J’ai un point de vue différent du vôtre, mais il n’y a pas qu’un seul angle pour regarder une montagne.

    Merci encore de votre analyse très pertinente. Beaucoup trop pertinente pour ne pas comprendre que nous sommes régis que par des menteurs et des escrocs qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez au point de finir par croire eux même à leur mensonge et escroquerie.

    On voit ça dans les sectes, les gourous-escrocs qui finissent par se prendre pour Dieu.

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  3. Sans vous commandez, la notion de « capital zombie » est assez abstraite ; Serait-il possible d’argumenter, ou simplement donner des exemples à ce sujet ? Du genre exemple \ causes \ conséquences…
    Désolé si vous avez déjà expliquer ce sujet, j’ai dû le manquer, mais comme ça a l’air d’être une notion de plus en plus centrale dans vos positions, je préfère demander ! Bien à vous.

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    1. Le capital zombie est le capital qui normalement, économiquement n’est plus compétitif, n’est plus adapté, est dépassé. Par exemple une machine périmée. Par exemple un restaurant pourri qui refuse de fermer ses portes et brade les prix ce qui fait du tort aux autres, par exemple une banque ruinée mais qui continue à fonctionner grace à l’argent gratuit de la BCE.
      Le capital dépassé, obsolete, pour continuer à fonctionner préleve des ressources mais les utilise mal, il gaspille au niveau économique du pays ou de l’ensemble auquel il appartient. Une firme qui a beaucoup d ‘activités, mais conserve celles qui sont structurellement déficitaires sans raison stratégique, gaspille des ressources et ce faisant elle pèse sur le taux de profit non seulement de son groupe mais du pays.
      Prenez Heuliez , chere à Ségolène en son temps; l’entrepise était condamnée économiquement , morte, mais pour la maintenir en vie on a accordé des prets, des subventions, cela ne l’a pas empechée de crever , elle a fonctionné en tant que zombie longtemps. Elle a ponctionné sur le capital et le profit du pays par le biais des crédits que lui ont accordé les banques, sur ordre.

      Le secteur le plus clairement zombie est bien sur le secteur bancaire italien. Mais au niveau européen , sur des bases comptables et reglementaires normales, non truquées tout le secteur est zombie. Si on acceptait de considérer que les créances des banques sur certains états et gouvernements étaient irrecouvrables, ce qui est la réalité, alors on devrait deprecier ces creances, les banques concernées n’auraient plus de fonds propres, plus de capital et on verrait qu’elles sont zombies, mais on ne le fait pas. On maintient le mythe et on augmente les impots sur les citoyens pour entretenir la fiction, ainsi les banques survivent malgré leur absence réelle de capital et elles ponctionnent sur le surproduit global donc font chuter le taux de profit moyen.

      L’uberisation de certaines professions est en sens inverse un moyen de faire remonter le profit moyen d’un pays, car elle tue des professions anciennes, devalorise leur fonds de commerce et en les detruisant peu à peu elles les empechent de continuer à concourir pour s’attribuer un peu de profit. L’uberisation c’est cela: la destruction du capital de certaines professions, sa transformation en capital zombie; le detenteur continue quelque temps alors même que ce n’est plus rentable, puis il baisse les bras, le zombie meurt.
      Le keynesianisme, dans sa fonction generale aboutit à maintenir en vie les zombies, la dette est le moyen, pour le capital mort, de faire semblant de se maintenir en vie. Si vous observez la masse croissante de dettes dans le système capitaliste, vous concluez que la masse de capital qui ne survit que grace aux dettes est énorme La dette est un moyen de reculer la mort. Mais elle augmente la masse de capital fictif, non productif dans le système , donc elle rend de plus en plus inéluctable la destruction, la crise future. Augmenter les dettes dans un système de plus en plus zombie, c’est creuser de plus en plus profond … pour sortir d’un trou.

      Le système capitaliste n’est defendable et legitime que si il est dur, impitoyable avec lui même. C’est à dire que si il élimine les capitalistes les plus faibles, les moins efficaces. C’est la symétrie qui rend le système defendable: les salariés sont mis au chomage et le capitaliste est ruiné. Le capitalisme est un moment de l’histoire progressiste, efficace dans la mesure ou il élimine sans pitié le capital fictif/dépassé qui ne correspond à aucune utilité sociale. L’invention du keynesianisme et de la sociale démorcatie empêche le capitalisme de se purger, de se regénérer , et donc elle le fait muter en un système qui devient non défendable. Nous y sommes. Si il ne le fait pas alors il évolue vers le socialisme, il devient moins efficace, plus inégalitaire, plus rentier et donc il manque à sa fonction historique qui est de produire plus et de plus en plus efficacement.
      C’est ce que je dis dans un article, on a fait du socialisme dans le capitalisme, on a socialisé le capital et ce faisant on détruit sa légitimité et sa fonction historique. Le système social-democrate, système des nègres blancs, est un système pourri, profondement conservateur qui empêche le neuf, le plus afficace, le plus adapté de naitre. Mon ennemi, c’est la sociale democratie.

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