L’ingenierie sociale comme moyen de faire de la politique.

Depuis que je m’intéresse à la politique et à la finance, je m’interroge sur les rapports entre le vrai/le faux, le réel/les perceptions, le symbolique/l’imaginaire etc.

Je m’interroge sur l’impuissance sociale et sur « les raisons pour lesquelles les mensonges réussissent mieux que la vérité ».

Je développe souvent l’idée de « disjonction » c’est à dire la rupture du lien entre les signes et la réalité, disjonction qui est au coeur du pouvoir de persuasion, de la manipulation des consensus , au coeur de la domination/soumission  des masses et bien sur  au coeur de l’imaginaire financier.

Je soutiens pour simplifier que « les dominants » et leurs ingénieurs sociaux vous font vivre dans un monde imaginaire, névrotique,  construit pour vous;  un monde qui leur convient et qui assure la reproduction de l’ordre ou (des)orde social qui leur convient.

Nous sommes au dela de la propagande , nous sommes dans la fabrication des sujets qui leurs conviennent pour maintenir leur domination.

Ils fabriquent les sujets et les citoyens. Ils reconfigurent les citoyens.

Je vous parle souvent de Faust et du Pacte avec le diable qui permet de séparer les ombres des corps.

je vous en parle parce que je suis optimiste c’est à dire que je crois que même si les hommes sont impuissants, le Réel  lui, a raison des faux chefs, des illusionnistes et des  démiurges.

Le Réel c’est la Statue du Commandeur qui punit le minable don Juan.

Je soutiens que l’action des médiations sociales comme les partis politiques, les syndicats, les journaux , les associations etc est en retard, elles subissent ce que l’on appelle le développement inégal , elles agissent et se battent à un niveau archaique qui n’est plus celui ou se déroule à notre époque l’action politique.
Je soutiens que Macron est l’un des premiers à avoir assimilé ou pressenti toutes les ressources de ce que l’on appelle l’ingénierie sociale .

Je vous offre donc un texte qui explique ce qu’est l’ingénierie sociale.

Certes il faut se prendre la tête mais si c’était facile tout le monde comprendrait…

Qu’est-ce que l’ingénierie sociale ?
La culture de l’inégalité ne concerne pas que le domaine économique. Elle touche aussi à la configuration du champ perceptif. En effet, le fondement des théories de la surveillance, tel que résumé par le principe panoptique de Jeremy Bentham, est la dissociation du couple « voir » et « être vu ».

La politique comme ingénierie sociale consiste alors à bâtir et entretenir un système inégalitaire où les uns voient sans être vus, et où les autres sont vus sans voir.

Le but de la manœuvre est de prendre le contrôle du système de perception d’autrui sans être soi-même perçu, puis d’y produire des effets en réécrivant les relations de cause à effet de sorte qu’autrui se trompe quand il essaie de les remonter pour comprendre sa situation
présente.

Dans son livre sur la campagne présidentielle de Nicolas Sarkzoy en 2007, Yasmina Reza (1)  nous rapporte ces propos d’un de ses conseillers, Laurent Solly :

« (…), la réalité n’a
aucune importance. Il n’y a que la perception qui compte. »
Ce constructivisme radical, issu de l’école de Palo Alto et très en vogue dans le milieu des consultants, n’hésite pas à considérer que la perception peut être détachée de tout référent objectif, réel. L’ingénierie des perceptions devient alors une activité quasi démiurgique de construction d’hallucinations  collectives, partagées, normalisées et définissant la réalité commune, autrement dit un ensemble stabilisé de relations causales falsifiées.

Ainsi que l’avance dans un essai le célèbre pirate informatique Kevin Mitnick, l’ingénierie sociale serait L’art de la supercherie ; plus précisément l’art d’induire autrui en erreur et d’exercer un pouvoir sur lui par le jeu sur les défaillances et les angles morts de son système de perception et de défense.

Illusionnisme et prestidigitation appliqués à tout le champ social, de sorte à construire un espace de vie en trompe-l’œil, une réalité truquée dont les règles véritables ont été intentionnellement camouflées.
Ces techniques de manipulation s’appuient sur ce que l’on appelle les « sciences de la gestion », nébuleuse de disciplines qui ont commencé à constituer un corpus cohérent à partir des années 1920 et dont la théorie de l’information et la cybernétique résument les grandes lignes idéologiques : à savoir, les êtres vivants et les sujets conscients sont des systèmes d’information susceptibles d’être modélisés, contrôlés, voire piratés au même titre que les systèmes d’information non-vivants et composés d’objets non conscients.

Pour les plus connues, ces disciplines gestionnaires sont le marketing, le management, la robotique, le cognitivisme, la psychologie sociale et behaviouriste (comportementale), la programmation neurolinguistique (PNL), le storytelling, le social learning, le reality-building.

Le point commun de ces disciplines réside dans leur rapport à l’incertitude, qu’elles tentent toujours de réduire au minimum, si possible à zéro.

Le monde est ainsi perçu uniquement sous l’angle de systèmes d’échange et de traitement de l’information qu’il faut réussir à gérer du mieux possible, c’est-à-dire en réduisant l’incertitude de leur fonctionnement, en les contrôlant le plus précisément possible.

En outre, contrairement aux sciences humaines et sociales, ces sciences gestionnaires ne se contentent pas d’observer et de décrire leur objet d’étude, elles interviennent aussi dessus dans le sens d’une ingénierie, donc d’un travail de reconfiguration d’un donné.

Quand elle se fait à l’insu du système reconfiguré, la reconfiguration devient un viol furtif de l’intégrité du système et porte le nom de piratage, ou hacking. Et quand il s’applique à l’humain, cet interventionnisme reconfigurateur pirate se donne généralement pour but de reconfigurer le donné humain dans le sens d’une réduction de l’incertitude liée au comportement de ce donné humain, individuel ou groupal.

La politique, en tant qu’ingénierie sociale, gestion des masses humaines, réduction de l’incertitude du comportement des populations, s’appuie donc tout d’abord sur une phase descriptive, constituée de travaux de modélisation de ces comportements populaires afin d’en définir les structures générales et les constantes.

Ces travaux de modélisation mettent à jour les programmes, routines, conditionnements psychiques et algorithmes comportementaux  auxquels obéissent les groupes humains. L’informatique est l’outil idéal, par exemple dans le calcul complexe (probabiliste et stochastique) des mouvements de foule, qui sert à la gestion des risques dans les instances professionnelles d’hygiène et de sécurité (évacuation des bâtiments), mais aussi à la police et l’armée pour encadrer et prévenir toute manifestation qui risquerait de déstabiliser le pouvoir.

De plus, le travail d’espionnage d’une population, dans l’optique de modéliser ce qu’elle pense et ainsi désamorcer les nouvelles tendances critiques, requiert un travail de surveillance, de renseignement, de collecte d’informations et de fichage considérablement facilité par les développements de l’ « informatique ubiquitaire » (ou
ambiante et diffuse dans l’environnement, telle que théorisée par Mark Weiser) ainsi que par les « systèmes experts » de croisement des bases de données électroniques locales, publiques et privées (interception des communications, paiements par cartes, etc.).

Le recoupement de ces informations glanées sur les réseaux numériques permettant de calculer par profiling une  estimation du taux de dangerosité qu’une population (ou un individu) représente pour le pouvoir, on comprend dès lors que l’informatisation de la société, pour y faire basculer le maximum d’éléments de la vie des populations, soit une priorité des politiques contemporaines.
(1) Yasmina Reza, L’aube, le soir ou la nuit, Éditions Flammarion, 2007, p. 44.

2 réflexions sur “L’ingenierie sociale comme moyen de faire de la politique.

  1. j’hesite sur l’interpretation actuelle de l’abstention lors des elections: resultat voulu d’une ingenierie sociale des dominants ou mise en place d’une excuse de la part des citoyens francais a ne plus faire barrage au RN au futur second tour des presidentielles (C’est pas moi qui a vote marine,je me suis abstenu) ?

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  2. Cher monsieur,
    Pour compléter ce beau texte…
    Certains « ingénieurs sociaux » de fait n’ont même pas eux aussi conscience de l’être…
    C’est cela, la clef du succès d’un tel savant « dispositif » de servitude volontaire.

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