Editorial: Crise financière, on vous ment, le problème et les risques sont systémiques. SVB est la pointe de l’iceberg.

Vendredi, la banque californienne Silicon Valley Bank (SVB) est devenue la plus grande banque à faire faillite depuis la crise financière de 2008. Des dizaines de milliards de dollars appartenant à des entreprises et à des investisseurs sont bloqués. Des centaines de milliards sont partis au paradis du pognon sur les marchés.

SVB a reçu des dépôts et accordé des prêts à des entreprises du cœur du secteur technologique américain. La Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) des États-Unis agit désormais en tant que séquestre. La FDIC est une agence gouvernementale indépendante qui assure les dépôts bancaires et supervise les institutions financières. Elle liquidera les actifs de la banque pour rembourser ses clients, y compris les déposants et les créanciers.

 La cause proche de la défaillance a été l’annonce par SVB qu’elle avait vendu à perte des titres dans lesquels elle avait investi et qu’elle devrait vendre 2,25 milliards de dollars d’actions nouvelles pour essayer de consolider son bilan. 

Vous voyez l’effet multiplicateur des chiffres: on part d’un trou de fonds propres de 2,5 millards, on arrive a un autre besoin fiancier de 50 milliards puis a une perte sur les marchés de 500 milliards en quelque heures? Ceci pour vous dire que la finance ce n’est pas de la petite arithmétique. Tout s’enchaine, tout se multiplie.

NOTE 87% des 173 milliards de dollars de dépôts de la banque n’étaient pas assurés.

Cela a déclenché une panique parmi les principales entreprises technologiques de Californie qui détenaient leurs liquidités chez SVB. La banque a dû empêcher les déposants de retirer de l’argent. Le cours de l’action de la société s’est effondré, entraînant avec lui d’autres banques. La négociation des actions SVB a été interrompue. SVB n’a pas trouvé d’ acheteur, ce qui a conduit la FDIC à en prendre le contrôle. 

La SVB figurait parmi les 20 premières banques commerciales américaines (la 16e plus grande), avec 209 milliards de dollars d’actifs totaux à la fin de l’année dernière, selon la FDIC. 

SVB offrait ses services à près de la moitié de toutes les entreprises de technologie  et de soins de santé soutenues par du capital-risque aux États-Unis. La SVB détenait l’argent des « venture capitalists .

SVB a fait des investissements avec les dépôts obtenus. Ses investissements ont commencé à faire des pertes. SVB avait parié sur l’achat d’obligations d’État américaines apparemment sûres. Lorsque la Réserve fédérale a entamé son cycle de hausse des taux d’intérêt pour « contrôler l’inflation », la valeur de ces obligations a fortement chuté et le bilan de la SVB a commencé à prendre de l’eau. C’est un phénomène général que j’ai a plusieurs reprises signalé et analyse: tous les comptes des institutions financières sont faux à cause de la dépreciation des actifs portés au bilan.

Lorsqu’elle a informé le monde financier qu’elle vendait ces obligations à perte pour faire face aux retraits d’espèces des clients, la ruée sur la banque a déferlé. N’ayant pas obtenu de financement supplémentaire en emettant des actions nouvelles , SVB a dû déclarer faillite et être mis sous séquestre par la FDIC.

Certains écartent l’idée que l’effondrement de SVB est un signe des choses à venir. « SVB était petite, avec une base de dépôts très concentrée », a déclaré le responsable de la recherche actions européennes d’Amundi, Ciaran Callaghan. Il n’était « pas préparé aux sorties de dépôts, n’avait pas les liquidités nécessaires pour couvrir les rachats de dépôts et, par conséquent, était un vendeur forcé d’obligations qui a conduit à une augmentation de capital et a créé la contagion. C’est vraiment un cas isolé et idiosyncratique.

Ce serait donc un cas unique. Bien sur que non. L’effondrement de SVB est dû à un événement plus large, à savoir les hausses agressives des taux d’intérêt de la Réserve fédérale au cours de l’année écoulée. Lorsque les taux d’intérêt étaient proches de zéro, des banques comme la SVB ont fait le plein de bons du Trésor à long terme et apparemment à faible risque. Mais alors que la Fed a augmenté les taux d’intérêt pour « lutter contre l’inflation », la valeur de ces actifs a chuté, laissant de nombreuses banques assises sur des pertes non réalisées. 

Nous sommes face à un problème de fond!

« Les défis institutionnels de SVB reflètent un problème systémique plus vaste et plus répandu : le secteur bancaire est assis sur une tonne d’actifs à très faible rendement qui, grâce à la dernière année de hausses de taux, sont désormais loin sous l’eau – et en train de couler », a déclaré Konrad Alt , co-fondateur du Groupe Klaros. Alt a estimé que les hausses de taux avaient « effectivement anéanti environ 28 % de tous les capitaux du secteur bancaire à la fin de 2022 ».

Analyse de fond:

Le système de regulation mondiale est un système moderne, fondé sur la constitution de bulles, leur éclatement puis le nettoyage.

Ce sont des cycles longs fondés sur les effets de richesse et de patrimoine. Ils s’originent dans le marché financier et non plus dans les systèmes des banques commerciales. Cependant les deux sont imbriqués car l’ensemble du dispositif moderne passe par le maintien d’une relative liquidité et de l’appétit pour le risk, le risk-on. Bref, dans le monde moderne, le crédit repose sur l’appetit spéculatif et sur les valeurs boursières..

Le marché boursier joue un role central dans le maintien de la liquidité par le levier et l’entretien du ponzi.

Ce nouveau mode de fonctionnement je l’apelle également le réglage par coups d’accordeons.

Cette forme de regulation initiée par Greenspan est efficace , mais elle a des faiblesses;

-le marche financier est colossal

-pour le piloter il faut un doigté considerable;

-il est gouverné par les animal spirits ce qui veut dire qu’il est quelquefois imprevisible et irrationnel

-il a une capacité d’apprentissge rapide .

Enfin quand la boule de neige se forme, quand la transitivité se met en branle et quand la reflexivite apparait les risques deviennent énormes.

Greenspan a évoqué tout cela dans son ouvrage ou il nous parle de ces territoires inconnus que l’on explore sans carte et sans boussole.

Mais je pense qu’il s’est trompé le principal probleme de ce mode de régulation n’est pas celui de la connaissance, on peut améliorer la connaissance des animal spirits et c’est ce qui est fait depuis Bernanke,- non ce qui est le vrai problème de ce mode de régulation c’est sa non-reversibilité. Son asymetrie. Ce sont les effets de stocks, d’accumulation.

Les autorites savent gérer les effets de flux, elles ne savent pas comment gérer les effest de stocks. Le problème c’est l’accumulation, c’est le fait que chaque fois que l’on repart, que l’on enclenche un cycle on part de plus haut en matière de masse d’actifs financiers et de plus bas en matière de marge de manoeuvre sur les taux d’interêt réels. On a affaire a un immense paquebot et on ne dispose que d’un minuscule gouvernail. Avec des mers et des écueils non connus.

C’est un système qui est en fait non reversible contrairement aux souhaits de ses promoteurs.

C’est un système non symétrique.

C’est un système qui ne fonctionne pas véritablement de façon dérivable et graduelle , il a des effets de seuils.

Bref c’est un système de nature fractale alors qu’ils ne savent gérer que le dérivable, le graduel, les grenouilles ébouillantées.

Pourquoi ? Parce que l’on ne peut plus jamais faire éclater les bulles autant qu’il le faudrait pour assainir. Les tentatives d’éclatement des bulles doivent et sont toujours interrompues par un accident d’ampleur qui menace de devenir systémique.

Les autorités ont retenu la leçon de Lehmann: on ne peut aller trop loin sans déclencher une siprale de destruction.

A l’automne dernier pareille situation s’est produite ! La grosse baleine britannique s’est échouée et elle a failli tout polluer. Il a fallu reflater en catastrophe.

Les marchés ont suivi le mouvement, après avoir chuté ils sont repartis de l’avant , à juste titre puisque la lutte contre l’inflation a marqué une pause.

Le même scénario vient de se reproduire.

On était reparti pour un nouveau round de resserrement , on avait écarté le pivot et on s’apprêtait à déflater dans l’espoir d’atteindre l’economie réelle et puis patatras , le système se fissure une nouvelle fois.

Avant même que tout cela ne s’enclenche un nouveau sinistre est intervenu, et pas des moindres puisqu’il s’agit d’une pièce centrale du dispositif de financement des Start-up dans la Silicon Valley.

Pourtant on avait a peine connu un vrai resserrement!

Alors que le crédit commençait à peine mais enfin a ralentir voila que deja le gros accident arrive.

Nous n’en étions qu’ à l’ébauche d’un début de ralentissement du crédit , nous n’étions pas encore rentré dans le vif du sujet!

Le rapport sur le crédit de la Fed pour le quatrième trimestre 2022 Z.1 sur les « flux de fonds » a été publié jeudi dernier . 

Les données aident à clarifier la toile de fond la plus inhabituelle d’aujourd’hui. 

Fait important, la croissance du crédit a nettement ralenti au quatrième trimestre. Le contexte sous-jacent au sinistre SVB est donc celui d’une bulle de crédit défaillante.

La croissance de la dette non financière (NFD) a ralenti à un rythme de 3,00 % au quatrième trimestre, le taux le plus lent depuis le premier trimestre de 2017.

La croissance de la dette hypothécaire des ménages a ralenti à 4,39 % (contre 6,66 % au troisième trimestre), tandis que la croissance de la dette à la consommation non hypothécaire a augmenté à 6,96 % . 

La croissance des emprunts totaux des entreprises est tombée à 2,16 %, contre 4,00 % au troisième trimestre, la plus faible expansion depuis le troisième trimestre 2020.

Dans ce qui s’inversera sûrement bientôt, la croissance de la dette fédérale a ralenti pour atteindre un taux de croissance annuel de 3,98 %, le plus bas en cinq trimestres.

Et bien que la croissance du système de crédit ait ralenti, le refroidissement ne s’est pas encore matérialisé dans les données sur les prêts bancaires. 

Les prêts bancaires ont augmenté de 361 milliards de dollars, soit 10,5 % en rythme annualisé, au cours du quatrième trimestre pour atteindre un record de 14 054 000 000 $. Cela a poussé la croissance des prêts en 2022 à un record annuel de 1,424 trillions $, soit 11,3 %. 

Les prêts hypothécaires bancaires ont ralenti pour s’établir à 142 milliards de dollars, ou 9,0 %, toujours solides. À 541 milliards de dollars, la croissance des prêts hypothécaires bancaires en 2022 a été la plus forte depuis 2004.

Les prêts bancaires à la consommation ont augmenté de 87 milliards de dollars, ou 13,5 % en rythme annualisé, portant la croissance de 2022 à un record de 303 milliards de dollars, ou 12,8 %. Activités « non classées ailleurs » au quatrième trimestre Les prêts ont augmenté de 131 milliards de dollars, ou 11,0 %, pour atteindre un record annuel de 584 milliards de dollars, ou 13,6 %.

Curieusement, les emprunts du secteur financier ont augmenté à un rythme de 10,0 % au quatrième trimestre, contre 6,71 % au troisième trimestre et 6,25 % au quatrième trimestre 2021. 

Les actifs des GSE (entreprises parrainées par le gouvernement) ont augmenté de 241 milliards de dollars, soit 10,7 % en rythme annualisé, au cours du quatrième trimestre, pour atteindre un record de 9 224 000 000 $. La croissance record de 921 milliards de dollars l’an dernier, soit 11,1 %, a dépassé de 54 % le précédent record de 2020. Le record pré-pandémique était de 301 milliards de dollars établi en 2007. Sur 12 trimestres, les actifs de GSE ont bondi de 2,094 trillions $, soit 29,4 %.

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Une réflexion sur “Editorial: Crise financière, on vous ment, le problème et les risques sont systémiques. SVB est la pointe de l’iceberg.

  1. Je partage bien entendu.
    Les BC peuvent sauver les banques mais pas tout ce qui touche aux finances.
    Exemple :les retraites françaises.
    Macron a raison sur le fond,il faut trouver de nouvelles ressources.Mais il ne donne pas les bonnes raisons.
    Les caisses de retraites ont toutes passé de grosses provisions pour préparer l’avenir.
    Ces provisions étaient essentiellement placées en obligations.
    La hausse des taux a tout fait partir en fumée!
    On doit donc maintenant trouver de nouvelles ressources.
    Cet exemple s’applique a de nombreux domaines.Assurances vie notamment.
    Les BC en montant les taux ont détruit beaucoup.En toute connaissance.
    Pour lutter contre l’inflation,se redonner des marges de maneuvre sur les taux,et redonner de la valeur a la monnaie.
    Et peut etre permettre aux gouvernements occidentaux de financer leurs déficits en étant plus attractifs que les marchés d’actions.

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